Le 27 février, les eurodéputés ont adopté (329 voix pour, 275 contre et 24 abstentions) la loi sur la restauration de la nature.

Cette loi fixe un cadre dans lequel les États membres mettent en place des mesures de restauration, avec pour objectif de restaurer 20 % des zones terrestres.

Si la version adoptée par le Parlement est édulcorée par rapport à la version initiale de la Commission, elle s’est néanmoins renforcée depuis son adoption en 1ère lecture lors des négociations interinstitutionnelles (notamment avec le retour de l’article sur la restauration des écosystèmes agricoles).

Le renforcement des exigences environnementales et le lien avec la PAC interrogent. En effet, cette loi de restauration de la nature ne s’accompagne pas d’un budget spécifique. Pour la Coordination Rurale (CR), il est donc à craindre que les efforts seront (encore !) supportés par les agriculteurs, sans aucune valorisation économique sur leur revenu ni la vente de leurs productions.

 

Points positifs

Si l’article sur la restauration des écosystèmes agricoles – supprimé en juillet dernier en 1ère lecture au Parlement européen – est revenu (devenant article 11), il n’est en revanche plus assorti de l’objectif visant à ce qu’au moins 10 % de la surface agricole de l’Union soit constituée de particularités topographiques à haute diversité à l’horizon 2030.

L’ajout de l’article 27 sur la suspension temporaire est un autre motif de satisfaction, en ce qu’il ménage – pendant un an – la possibilité d’un arrêt des mesures prévues par la loi dans le cas où la sécurité alimentaire serait menacée.

 

Points de vigilance

Pour l’agriculture, la vigilance porte notamment sur les zones Natura 2000. On peut donc craindre un renforcement des mesures contraignantes pour les exploitations situées dans ces zones.

De manière générale, plusieurs indicateurs seront scrutés : oiseaux, papillons de prairies, carbone organique dans les sols et part des terres agricoles présentant des particularités topographiques à haute diversité.
Cela pose la question de l’évaluation de ces indicateurs : qui réalise et qui paie ?

La CR s’inquiète de l’utilisation récurrente d’un vocabulaire imprécis, lequel peut laisser place à des interprétations variées : « bon » ; « suffisant » ; « favorable » ; etc.

Les annexes couvrent une liste pléthorique d’espèces animales et végétales, ce qui pourrait conduire à mettre en place des mesures sur une grande partie du territoire. Par exemple, le loup figure en annexe IV (« intérêt communautaire qui nécessite une protection stricte »). Comment définir l’habitat de cette espèce qui est justement capable de coloniser tous types d’écosystèmes terrestres ? Espèce dont le « bon état » de conservation ne fait pas non plus consensus en terme de population chiffrée ou de zone géographique…

La loi de restauration de la nature sera liée à la PAC (considérant 84), notamment pour ce qui est des objectifs de part d’écosystèmes restaurés.

L’annexe VII du règlement donne des exemples de mesures pour aboutir à la restauration de ces zones dont certaines visent directement le secteur agricole, et font la part belle à des mesures improductives ou de décroissance.
Pour la CR, elles peuvent être particulièrement contraignantes et limiter la production agricole. Leur renforcement, sans en connaître l’intensité à ce stade, pourrait être très pénalisant, quand certaines sont totalement déconnectées des enjeux agricoles et de la nécessité de retrouver une autonomie alimentaire.

La CR s’inquiète de l’objectif de restauration de la connectivité naturelle des cours d’eau et des fonctions naturelles des plaines inondables adjacentes. Elle avait déjà réagi sur cette problématique.

Enfin, la CR s’inquiète sur la vision toujours idéalisée de la capacité de création d’activités économiques et d’emplois – en particulier en lien avec l’agriculture biologique – tout en affirmant qu’il est nécessaire de fournir des aliments « abordables ».

Encore une fois, la CR regrette que les politiques publiques oublient que les agriculteurs ont besoin d’un revenu digne couvrant les coûts de production pour mener à bien leur mission de production de nourriture et d’autant plus pour atteindre les objectifs ambitieux qui leur sont assignés en matière de transition écologique.

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