Encore un rendez-vous raté pour l’exécutif français. Le 12 mars dernier avait lieu au Parlement européen le vote sur la révision de la directive IED. Malgré les demandes des éleveurs de sortir l’élevage de cette directive, le texte a été adopté sans les amendements qui auraient maintenu les seuils historiques pour les élevages porcins et avicoles.

Pourtant, lors de leur rencontre avec la Coordination Rurale la veille du vote, le Premier ministre et le ministre de l’Agriculture avaient assuré que le statu quo serait maintenu, avec un maintien des seuils pour les éleveurs porcins et avicoles. Dans un courrier envoyé le 25 mars au ministre de l’Agriculture, la Coordination Rurale se demande si l’influence de la France est aujourd’hui à ce point réduite qu’elle ne permet plus de protéger ses éleveurs.

En effet, la nouvelle directive concernerait plus de deux tiers de la production  bretonne de porc, alors même que les orientations de la PAC ont poussé les élevages à s’agrandir. Contrairement à l’objectif affiché de la directive, qui souhaite limiter les élevages de taille dite « industrielle », la production se concentre de plus en plus. Les petits élevages de moins de 100 porcs ont été divisés par trois entre 2007 et 2015, et les exploitations détiennent désormais 215 truies en moyenne contre 183 en 2007. Les conséquences pour les élevages de volailles, et de poules pondeuses notamment (pour lesquels le seuil a été baissé de près de la moitié soit de 40 000 à 21 500) sont dramatiques, puisque la nouvelle directive va précipiter l’arrêt de la production chez nombre d’éleveurs dans l’incapacité d’amortir les investissements requis par les mises aux normes.

Si l’élevage bovin a finalement été écarté du projet final soumis aux députés européens, celui-ci ne bénéficie que d’un sursis. En effet, une clause de revoyure est prévue pour fin 2026, dans laquelle la possibilité d’inclure les élevages bovins à partir d’un certain seuil sera étudiée. Le Commissaire européen à l’Environnement, Virginijus Sinkevičius, assure que « les spécificités de l’agriculture seront prises en compte ». Dans un courrier qui lui a été adressé le 25 mars, la Coordination Rurale s’interroge : cela signifie-t-il que les externalités positives de l’élevage (entretien du paysage, production d’engrais naturel, maintien de la biodiversité, etc.) seront enfin prises en compte ? Ou encore que la Commission a déterminé qu’importer des produits d’origine animale de l’autre bout du monde (voir les récents traités avec le Chili, l’Australie ou encore la Nouvelle-Zélande) est un non-sens au regard du coût environnemental en termes de transport ? L’Europe a-t-elle réalisé que la production issue des pays extra-européens ne respecte pas les normes environnementales imposées aux éleveurs européens ?

L’Europe doit être capable de protéger ses éleveurs qui sont les garants d’une alimentation saine et produite en toute transparence. L’agriculture et l’environnement, trop souvent opposés, vont pourtant de pair, et les agriculteurs en sont les premiers maillons. La souveraineté alimentaire européenne est en jeu, la Coordination Rurale espère que nos décideurs politiques français et européens en saisissent toute la mesure.

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