La première consultation régionale dans le cadre de la loi d’orientation et d’avenir agricoles (LOA) a eu lieu mercredi 15 mars sur le thème de la formation et l’orientation. L’objectif de cette première réunion a été annoncée aux principaux acteurs du milieu agricole et de l’éducation : formuler 5 propositions par groupe syndical afin de former une synthèse discutée par la suite en comité restreint, puis transmise au ministère de l’Agriculture afin d’établir le futur Pacte d’orientation et d’avenir agricoles.

Une « aventure du vivant » pour les futurs agriculteurs

Or, la réunion n’avait de concertation que le nom, comme nous l’explique Christophe Letissier, éleveur bovin viande et exploitant grandes cultures dans les Ardennes. Les deux heures, originellement consacrées au débat, ont été majoritairement consacrées à la présentation des dispositifs de formation et de la conjoncture éducative actuelle dans le Grand Est. Bien que l’idée soit de promouvoir une « aventure du vivant » pour les futures générations en agriculture, Christophe Letissier souhaite couper court à toute illusion : « C’est bien gentil mais pour l’instant, l’agriculture, ce n’est pas une aventure du tout. C’est un métier sérieux ».

Devant une succession de propositions que beaucoup estiment difficiles à mettre en œuvre, la Coordination Rurale milite pour une union rurale qui permettrait de prendre réellement en compte les aspirations des exploitations : « Dans ce genre de comité, il faudrait que les syndicats se réunissent en amont et réussissent à imposer le milieu agricole car à la réunion à laquelle on a participé, c’est surtout l’éducation qui a été évoquée ».

Laisser davantage la place et la parole aux représentants du milieu agricole ne peut être que bénéfique puisque cela permettrait de discuter de sujets ancrés dans la réalité et éviter les inepties comme celles proposées par l’Éducation nationale…

Vers une agriculture 3.0 ?

À l’heure de la réalité virtuelle et des nouvelles technologies, la question se pose : comment créer de l’attractivité en agriculture pour les jeunes ?

Au-delà de simplement prendre en compte l’agribashing dont est victime le monde paysan, une véritable réflexion se crée autour d’une agriculture 3.0. : « La chambre d’agriculture a commencé à parler de casques de réalité virtuelle » raconte l’éleveur ardennais, dépité : « Un représentant de l’Éducation Nationale a même suggéré d’initier les jeunes à Farming Simulator [un jeu vidéo qui invite les joueurs à gérer une exploitation agricole derrière un écran] ».

Une proposition qui n’a pas fait l’unanimité à en juger par la mine déconfite des syndicalistes présents. Beaucoup sont conscients que la formation et l’orientation des nouvelles générations en agriculture représentent un immense budget et estiment « que l’Éducation nationale veut investir dans des choses incohérentes » confirme Christophe Letissier.

La déception est grande : « Pour en avoir parlé avec d’autres acteurs du métier à la réunion, de toute façon, l’agriculture, c’est dehors, pas dedans. Il n’est pas question de nous parler de réalité virtuelle ! ».

réalité virtuelle

La réalité virtuelle, l'avenir de l'agriculture ?

Un modèle agricole fantaisiste qui ne sera pas sans conséquences…

Le représentant de la CR évoque ses craintes : « Ils veulent attirer les gamins avec les nouvelles technologies mais il ne faut pas non plus exagérer : si on leur fait croire à des illusions, les générations futures seront composées de jeunes qui se seront fait avoir et c’est cela que l’on veut éviter ».

« L’impression qu’on a en les écoutant, c’est qu’ils veulent que des gamins viennent, quoi qu’il en coûte parce qu’il faut remplir les écoles ». À force de vouloir créer des statistiques pour faire remonter les chiffres de l’agriculture, Christophe Letissier craint les conséquences d’une agriculture fantaisiste comme celle que prône le syndicat dit majoritaire : « D’ici quelques années, on va avoir des directives en CDOA disant qu’il faut faire passer un non agricole, quitte à ce qu’il se retrouve en grande difficulté après plusieurs années et qu’il ne soit pas aidé mais ce ne sera pas pris en compte vu que tout ce qui les intéresse, ce sont les statistiques positives ».

L’avis de la Coordination Rurale

Une véritable amélioration pour l’orientation et la formation en agriculture serait par exemple de tenir compte des aléas climatiques. C’est justement l’objet du groupe 3 de concertation consacré à l’adaptation et la transition face au changement climatique.

Les trois thèmes, l’orientation et la formation, l’installation et la transmission et enfin, l’adaptation et la transition face au changement climatique ne se croisent pas et ne sont pas synchronisés au sein des groupes de concertation. Néanmoins, ils sont intrinsèquement liés et il est nécessaire de prendre en compte les aspects de chaque thème afin de mesurer les interactions entre les différents sujets.

La Coordination Rurale regrette également cette posture de présentation plutôt que de débat concret et surtout l’absence de concertation réelle avec les acteurs du terrain que sont les agriculteurs.

La CR sera néanmoins présente pour participer aux prochaines concertations courant avril…

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