La Grande Maison appelle à manifester jeudi à Paris. Notre situation en tant qu'agriculteur et plus particulièrement en tant qu'éleveur est telle qu'il est normal de vouloir se défendre, manifester, se faire entendre pour vivre. Il ne faut pourtant pas se tromper de combat , ni se faire manipuler et se poser les bonnes questions. Pourquoi manifester jeudi ?


Jeudi, je n'irai pas manifester à Paris car ce n'est pas, et ça n'a jamais été, le combat des prix qui sera engagé. Le seul mot d'ordre est la compétitivité, mais laquelle ? Celle qui nous conduit à produire toujours plus pour gagner toujours moins. Celle qui veut nous faire exporter ? Ouvrons les yeux, ce n'est pas nous qui exportons notre production et nous nous battons sans armes sur un marché mondial.

Jeudi, ce ne sont pas les agriculteurs qui seront défendus, mais bien les filières, celles-là même que l'on nous demandait de bloquer les semaines précédentes. A quoi cela a-t-il abouti? A rompre le dialogue avec nos clients.

Jeudi, je ne monterai pas dans un bus comme un animal dans un camion vers l'abattoir, pour défendre des filières qui ne nous rémunèrent pas. Les filières doivent vivre, c'est normal et nous en avons besoin, mais cela ne doit pas se faire sur notre dos. Nos coopératives, nos propres outils, que notre activité finance chaque jour, se sont perverties en créant des sociétés privées et des holdings qui sont aujourd'hui bradées à des fonds de pensions européens dans le meilleur des cas, le plus souvent américains, chinois, brésiliens...

Jeudi, la vérité ne sera pas mise sur la place publique, comme toujours avec la FNSEA. Un exemple parmi tant d'autres : il y a deux ans, je me suis présenté aux élections aux chambres d'agriculture en réclamant un profond changement de notre régime social. En face, le système MSA était présenté comme étant le bon, et voilà qu'aujourd'hui, ils manifestent pour réformer la MSA. Ou va-t-on ou plutôt ou veulent-ils encore nous amener ?

Je laisse chacun juger de l'intérêt de manifester jeudi, au delà de tout clivage syndical, en son âme et conscience, mais pour moi, cela ressemble à une nouvelle esbroufe pour capitaliser sur notre détresse. Pour moi, les prix et la régulation sont le vrai combat, celui que porte la CR depuis 20 ans, quand nos aînés avaient bloqué Paris pour refuser de prendre le chemin qui nous a conduit dans cette situation.

Bertrand Venteau

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