La mise en place des contrats dans le secteur de la viande est obligatoire depuis le 1er janvier 2022 avec l’application de la loi Egalim 2. Synonyme de contrainte pour les uns, de garantie à produire pour les autres, une chose est sûre, les contrats peinent à se mettre en place. La section Viande de la Coordination Rurale en est persuadée, il faut avoir le choix ; c’est pourquoi elle a toujours défendue une position de 70 % / 30 %, pour laisser une marge de manœuvre aux éleveurs. Mais qu’est-ce qu’implique un contrat pour l’éleveur ? Quelles sont les garanties et les limites qu’il offre ? Voici l’expérience de Bruno Bourasseau, éleveur de race Blonde d’Aquitaine en Vendée, sous contrat depuis avril 2022.
Dans quel contexte avez-vous signé votre contrat ?
J’ai été approché par l’association « C’est du Coin » mise en place par Leclerc lorsque ma vache bouchère a été primée en 2014 au Salon de l’Agriculture à Paris. Dès lors, j’ai commencé à vendre toute ma production à un magasin Leclerc près de chez moi. Récemment, Leclerc a souhaité se mettre en règle vis-à-vis de la loi Egalim, et s’est rapproché de LR Viande (grossiste à Challans) pour l’aider à mettre en place notamment les plannings de livraison. J’ai moi-même proposé mon contrat, en envoyant le document préparé par la section Viande de la Coordination Rurale à LR Viande. Nous avons ensuite négocié ensemble les modalités du contrat, que j’ai signé en avril 2022.
Quelles sont les modalités de votre contrat ?
Mon contrat porte sur 100 % de mes bêtes conformées R ou U, soit environ une vingtaine par an. LR Viande s’engage à acheter toutes mes bêtes, même si je venais à augmenter mes volumes. Quant à la fixation des prix, j’ai souhaité que le prix soit basé à 100 % sur l’indicateur de coût de production*. À cela s’ajoute l’indicateur « race » d’Interbev, qui prévoit +25 % pour la race Blonde d’Aquitaine. Ainsi actuellement, je vends mes bêtes au prix de 6,61 €/kg de carcasse rentrée abattoir (6,21 € prix de base, auquel sont ajoutés 20 centimes de transport, et 20 centimes par la filière Leclerc).
Mes bornes de prix se situent entre 4,8 € et 8,0 € actuellement ; le prix peut être revu mensuellement, mais toujours dans la limite de ces bornes et en prenant en compte les prix du marché. C’est le grossiste avec lequel j’ai passé mon contrat qui s’occupe du règlement de mes bêtes et du planning, et à ce titre, il est relativement flexible sur la conformation et le type de bêtes que je lui propose.
Cela fait maintenant quelques mois que votre contrat est en place ; en êtes-vous satisfait ?
J’ai désormais le contrôle sur mes propres factures et mon prix a été maintenu à un très bon niveau, je suis donc très content de mon contrat. Le système fonctionne, parce que nous avons établi une relation de confiance, qui permet une certaine flexibilité ; je sais que des arrangements sont possibles, si l’une de mes bêtes qui doit partir est malade par exemple. La confiance est importante, mais avec le contrat, on a la sécurité en cas de pépins. Grâce aux bornes de prix et à la prise en compte des indicateurs, je sais que mes coûts de production seront couverts. D’ailleurs, je fais partie des mieux payé par rapport à mes voisins, qui n’osent pas réclamer plus de 6 €/kg de carcasse, malgré les cotations actuelles. Enfin, je suis rassuré de savoir que mes bêtes restent sur un circuit local : elles sont abattues localement, n’attendent pas des heures et subissent donc peu de stress. Le bien-être de mes animaux est important pour moi.
* Les indicateurs de prix de revient ont été publiés par l’IDELE et Interbev le 14 février dernier pour le 2e semestre 2022, conformément à l’accord interprofessionnel relatif à la méthodologie de calcul des indicateurs de prix de revient. Pour rappel, ces indicateurs sont mis à disposition des fédérations membres de la section bovine sur la base de la méthodologie validée pour permettre leur utilisation dans les contrats. Pour consulter ces indicateurs, rendez-vous sur : https://idele.fr/detail-article/les-indicateurs-de-reference-cout-de-production-et-prix-de-revient-pour-la-viande-de-gros-bovins