La fin des quotas laitiers transformera notre métier

« En Bretagne comme ailleurs, l'année 2015 s'annonce pleine d'incertitudes et d'inquiétudes sur le devenir de nos exploitations laitières. La fin des quotas était annoncée depuis des années. Pourquoi n'a-t-on pas plus anticipé ? Nous voyons déjà se profiler les conséquences de la dérégulation que nous avons toujours combattu dans les rangs de la CR et de l'OPL.

 

Ici, les réunions à la Chambre régionale d'agriculture se sont enchaînées et ont dévoilé peu à peu la stratégie portée par les représentants FRSEA. La vision est claire, il faut industrialiser et financiariser l'agriculture. Déjà, le Crédit Agricole crée une société pour entrer au capital des fermes à hauteur de 30 %. Comment peut-on aller si loin dans l'aveuglement ? Les agriculteurs n'en sortiront pas gagnants car ils ne seront plus maîtres de leurs exploitations.

Afficher un objectif de 6 milliards de litres sur la région en 2020 ne choque personne dans ces assemblées bien menées, bien préparées. Mais combien de producteurs resteront pour faire ce lait et avec quelle charge de travail ? Il faudra investir plus et s'endetter encore pour la robotisation, les bâtiments, les machines et la main d’œuvre. Selon moi, cette logique de course effrénée aux volumes n'est pas représentative de la volonté des éleveurs. Sans aucune vision sur les prix du lait à l'avenir on ne peut pas prendre raisonnablement de décisions. C'est à se demander si on a encore le droit de réfléchir à nos systèmes.

Et que dire des relations avec les laiteries ? Chaque opportunité est saisie pour nous asservir un peu plus. Qu'elles soient coopératives ou privées, elles cherchent à s'assurer un volume sur le long terme  pour alimenter les marchés d'export. Mais la valeur ajoutée n'est pas au rendez-vous pour le lait produit. La contractualisation devient la norme. Les volumes supplémentaires sont attribués à tour de bras, poussant les jeunes à s'endetter sur 20 ans et donc à produire coûte que coûte. Les prix et les coûts de production ce ne sont pas leurs soucis. On nous dit : c'est un marché mondial ! Entre temps, ce sont bien les paysans d'ici qui font tourner les outils et leur durabilité doit être une priorité pour l'industrie !

Les effets de la fin des quotas sont visibles dès aujourd'hui avec plus de volatilité des prix. Nous en payons les frais depuis septembre 2014 avec une chute annoncée jusqu'à 30cts/L. Par contre, les écarts de paiement du lait entre la France et les autres pays européens ne trouvent pas de justification dans ces changements. La seule différence c'est notre manque de soutien des producteurs par la filière !

Alors pour l'année à venir nous devons redoubler d'efforts pour faire valoir nos revendications. Les exemples ne manquent pas pour démontrer aux décideurs politiques que le libéralisme ne fonctionne pas, qu'il détruit nos emplois et nos territoires. La filière laitière doit changer la donne en remettant les éleveurs au centre des négociations. Notre avis compte autant que les industriels et les distributeurs. Je refuse de subir plus longtemps cette organisation bancale qui nous laissera sur la paille ! »

 

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