Chères agricultrices, chers agriculteurs,

Quelle est votre valeur si nous en jugeons par le temps consacré par nos dirigeants à notre sujet ?

Le temps d’un ministre

Un ministre à mi-temps qui ne se sent pas responsable de nos problèmes et ne cherche pas à les résoudre, nous propose que de petites « mesurettes », bien étudiées pour être inefficaces ou trop complexes pour être appliquées : 

  • baisse des cotisations sociales pour des agriculteurs qui n’ont plus de revenu
  • report d’annuités que les banques sont réticentes à faire appliquer
  • fixation de prix de nos produits sans l’accord des acheteurs

Toujours des mesures conjoncturelles ne résolvant en rien nos problèmes structurels.

 

Le temps d’un représentant de notre profession

Ce supposé "représentant des agriculteurs", comme l'appellent certains journalistes, dont il nous est très difficile de statuer du temps passé à défendre notre métier. La seule évocation de ses responsabilités me prendrait trop de temps ; citons-en tout de même quelques-unes :

  • Président d’Avril gestion
  • Président du Conseil d’administration de Sofiprotéol
  • Président du Conseil de surveillance du Grand port maritime de La Rochelle
  • Administrateur national du Crédit agricole
  • Président du CESER Centre
  • Président du Conseil de surveillance de l’Institut de prospective économique du monde méditerranéen
  • Et tant d’autres encore…

Comment cet homme peut-il accomplir toutes ces fonctions ?

Sûrement un surhomme, oui, puisqu’il est capable de faire croire à une majorité de notre profession qu’il peut gérer la présidence d’une très grosse unité de l’industrie agro-alimentaire sans s’exposer à des conflits d’intérêts.
Effectivement, pour lui, aucune ambiguïté à développer une agriculture au service de l’agro-alimentaire, où certains agriculteurs s’y font une belle place, pour atteindre des prix de matières premières de moins en moins élevés afin de dégager de plus en plus de profits à travers son industrie.

Le temps des décideurs européens

Ces décideurs, hautement rémunérés pour passer leur temps à désorganiser nos productions agricoles, la dernière en date pour 2015 : la fin des quotas laitiers.
Imaginer,organiser, construire une politique agricole demande du temps, mais détruire les derniers outils qui permettent de maintenir une rémunération de nos productions peut ne pas nécessiter de temps. Beaucoup de productions demandent de très longues années pour obtenir une génétique performante, des plantations productives, souvent l’investissement de plusieurs générations successives d’agriculteurs pour être balayées l’espace d’un instant par des personnes qui n’ont que faire de cette persévérance.
Mais que font-ils de leur temps ? Est-il bien utile de payer très cher des gens qui désorganisent nos marchés ?

Le temps de la simplification

Dernière nouveauté : les Surfaces non agricoles (SNA). Nous avons affiné depuis plusieurs années le contour de nos exploitations ; cela devait être trop bien : les pouvoirs publics ont décidé de tout reprendre, mais cette fois, ils ont dû déléguer le travail à une entreprise de sous-traitance !
Ils nous prennent pour des imbéciles : des contours sans aucune logique, la rivière, le lotissement voisin, le bois, la route, même certains outils agricoles apparaissent maintenant sur nos surfaces exploitées. Tout un travail à reprendre.
2015, la dernière mouture, l’apothéose de la simplification de nos déclarations PAC. Si seulement c’était vrai, on ne peut imaginer la physionomie de la déclaration PAC 2016, mais nous n’en sommes pas là. Il nous faudrait encore déjà clôturer la déclaration 2015 avant la fin de l’année 2016.
La simplification, Monsieur le ministre de l’Agriculture, quelle en est votre définition ?

Chères agricultrices, chers agriculteurs,
Du temps, vous en consacrez pour produire une matière première de qualité, de plus en plus de temps pour respecter les normes, de plus en plus de temps pour les contraintes environnementales, de plus en plus de temps pour les contraintes administratives. Mais nous n’avons plus de temps pour vivre, pour nous occuper de nos familles. Nous n’avons plus le temps d’attendre, la pression est telle, que beaucoup d’entre nous finissent par arrêter le temps !

Et maintenant, je dois vous parler de cette minute, cette minute demandée à notre président de la Chambre d’agriculture lors de la session du 26 février 2016. Une simple minute de silence pour s’associer à l’action menée sur la commune de Charroux ayant lieu au même instant, afin de rendre hommage à la mémoire des agriculteurs qui se sont suicidés et témoigner notre soutien à leurs familles et amis.
Sa réponse : un NON catégorique ! Raison invoquée : un ordre du jour chargé... Aucun mot ne sera assez fort pour décrire cette attitude mais celle-ci révèle la façon dont il nous considère.
Aujourd’hui comme hier, ce dont je peux vous assurer, c’est l’intérêt que tous les membres de notre syndicat portent à vous défendre dans toutes les instances où nous siégeons, s’efforçant à travailler pour trouver des solutions à tous nos maux. Ces membres donnent énormément de leur temps, sans aucune recherche d’intérêt personnel, si ce n’est celui de vous voir réussir dans votre métier.
Merci à tous.

Philippe TABARIN
Président de la CR86

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