Il ne se passe pas un jour sans que nous entendions parler d’environnement. L’environnement conditionne tout désormais, et toute action passe par son spectre. Je n’ai pas à juger de cette évolution de la société, mais je suis exaspéré par son application à deux vitesses et par l’hypocrisie qui caractérise le débat public à ce sujet.

Nous en avons eu un parfait exemple cette semaine à propos de deux sujets qui ont fait l’actualité agricole : le CETA et le glyphosate. D’un côté, les gouvernants et la société civile tentent de jeter le discrédit sur les agriculteurs qui utilisent un herbicide essentiel dans la pratique de l’agriculture de conservation ; de l’autre, on accepte sans broncher de poursuivre la mise en œuvre du traité de libre-échange avec le Canada, un pays connu pour l’exploitation du gaz de schiste, pour l’utilisation d’hormones de croissance et de 46 produits phytosanitaires interdits en Europe en raison de leur dangerosité pour la santé et pour l’environnement.

L'hypocrisie de la majorité des ONG

La première hypocrisie se situe au niveau des associations qui prétendent défendre l’environnement et surtout le bien-être animal. Depuis le début des négociations sur le CETA, menées dans la totale opacité, l’ensemble des professionnels de la filière viande n’ont eu de cesse de mettre en garde les pouvoirs publics sur les conséquences de cet accord. Je ne m’attarde pas sur ces risques, déjà maintes fois énoncés et même confirmés par multiples rapports, car personne ne veut les entendre ou les comprendre. En effet, mis à part quelques rares ONG qui restes cohérentes - comme Foodwatch – je n’entends presque pas la société civile se dresser contre cet accord, et avec beaucoup moins de véhémence que pour nous attaquer, nous les éleveurs qui sommes essentiels à l’environnement et à la biodiversité. Personne ne réagit lorsque 65 000 tonnes tonnes de bœufs doivent traverser un océan par cargo ! Personne ne réagit lorqque cette viande est issue d’un pays ou les feedlots industriels sont la norme, où les animaux sont « traités » grâce à des produits interdits en Europe ! Je ne supporte plus cette bien-pensance environnementale et animaliste à deux vitesses !

La disparition programmée de l'élevage

Face à cette imposture, je suis tenté de croire que nos dirigeants souhaitent volontairement programmer la disparition de l’élevage en Europe. Cette perte ne doit hélas pas peser lourd aux yeux des pouvoirs publics qui préfèrent, pour des raison électoralistes, entendre la voie d’une minorité influente sur l’opinion. Après la désastreuse réforme de la PAC de 2014, le Ceta n’est en effet qu’une étape supplémentaire vers l’abandon généralisé de l’élevage par les politiques publiques. La viande importée viendra concurrencer un marché déjà largement saturé. Par manque de rentabilité, les fermes d’élevage se tourneront de plus en plus vers la culture de céréales, et des milliers d’hectares de prairies, qui stockent le carbone et sont des puits de biodiversité, seront menacés. On ne peut dès lors que s’insurger face au plan de mise en œuvre présenté cette semaine par le gouvernement comme un« véto climatique » au Ceta. Il s’agit plutôt d’un habillage vert qui tente de masquer les conséquences économiques, sociales et environnementales de l’accord.

Dans les EGA, les associations de consommateurs ont indiqué que la demande se porte de plus en plus sur des produits "plus" (santé, ..) et des produits "sans" (édulcorants, conservateurs, ..). Résultat : quelques hauts dirigeants européens vont leur servir avec le CETA de la viande avec CO2 et sans éleveurs. Voilà comment une minorité décide pour une majorité sans se préoccuper de l’intérêt collectif.

Je ne suis cependant pas crédule, je sais bien que cette négligence envers la majorité (les consommateurs) et ce sacrifice d’une minorité (les éleveurs), servira les intérêts des grands groupes industriels qui vont avoir accès au marché canadien. Au niveau de l’Europe et du gouvernement, la classe politique a choisi son camp, et tant pis pour l’activité nourricière. Espérons que les députés français soient plus clairvoyants.

Dans la même catégorie

Viande
Bio
Grandes cultures
Alimentation