Reconnaître l’activité agricole comme vectrice de biodiversité

La loi biodiversité pose un principe de complémentarité reconnaissant l’activité agricole comme « porteuse d’une biodiversité spécifique » (1). De plus, certains schémas régionaux de cohérence écologique (SRCE) présentent les espaces cultivés et les milieux prairiaux comme des supports de continuités écologiques (trames vertes) et reconnaissent leur rôle bénéfique (ex : richesse en oiseaux de plaine). Il est donc nécessaire de les préserver, tant de la déprise agricole (disparition d’agriculteurs), que de l’artificialisation (constructions). C’est à ce titre que la CR a demandé un cofinancement complémentaire de l’Indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) sur le budget du ministère de la Transition écologique.

Le recul de l’élevage dans les zones intermédiaires, la friche, la spécialisation des régions et des cultures (absence d’oléoprotéagineux dans les rotations) sont autant de renoncements politiques nationaux et européens (libéralisme, absence de régulation) portant atteinte au principe de complémentarité.

Reconnaître les agriculteurs comme acteurs de la biodiversité

Même en zone de grandes cultures, on trouve des espèces d’oiseaux rares, comme l’alouette calendrelle. Cela est connu parce que des associations écologistes affiliées à France Nature Environnement proposent aux agriculteurs des diagnostics de biodiversité.

Si une baisse du nombre d’oiseaux est observée, le phénomène ne se produit pas qu’en milieu rural et il est d’origine multifactorielle : artificialisation des sols, mises aux normes hygiénistes, circulation automobile, fin de la traction animale, explosion de la population de chats ensauvagés et des prédateurs des oiseaux en général, maladies, changement des couloirs migratoires, prédation des busards relâchés par la LPO sur les alouettes et passereaux, généralisation des moutardes comme CIPAN supprimant les zones de nourrissage pour les oiseaux migrateurs (vanneaux huppés et d’alouettes) qui stationnaient à cette même période et qui se nourrissaient de vers dans les plaines ouvertes (sols nus)…

Les agriculteurs sont déjà sensibilités et soucieux de la biodiversité, qu’ils contribuent à façonner. Certaines pratiques agricoles améliorent les conditions de la biodiversité : rotation des cultures, optimisation des traitements phytos et du travail du sol, couverts végétaux, mode de conduite des prairies, sauvegarde des éléments fixes du paysage, couverts faunistiques et mellifères…

En outre, les agriculteurs œuvrent à la préservation des bordures de champs, jouant un rôle important dans le maintien des populations de perdrix grises qui y nidifient. Ces bordures contiennent de la biodiversité, par exemple la fleur centaurée, intéressante pour les pollinisateurs tels que les syrphes, papillons, abeilles et bourdons. Mais il faut veiller à ce que les plantes ne montent pas à graine afin d’éviter la dissémination d’adventices dans les parcelles adjacentes.

Ne pas sanctuariser le paysage agricole

Trames vertes et bleues (SRCE) et documents d’urbanisme (2), BCAE VII (éco-conditionnalité), et verdissement de la PAC : toutes ces réglementations visent à figer des éléments du paysage comme les prairies permanentes, haies, bosquets, mares, arbres…

Si la CR ne voit pas d’inconvénients à répertorier les éléments du paysage faisant office de corridors écologiques, elle s’oppose à ce que ces éléments soient figés pour une période indéterminée. Il faut inciter à protéger ces éléments mais ne pas interdire de les supprimer ou de les déplacer, en fonction des besoins de l’exploitant agricole, auquel la Commission européenne demande par ailleurs « d’être à l’écoute des signaux du marché » !
Il en va différemment pour les MAEC, qui sont librement contractualisées par les agriculteurs, que ce soit pour la préservation de l’eau ou de la biodiversité (Nature 2000).

Rendre aux agriculteurs leur droit de ressemer librement, pour réserver la biodiversité cultivée

Les lobbies semenciers ont tout fait pour retirer à l’agriculteur son droit de ressemer librement ses propres récoltes. Aujourd’hui, il faut soit payer des royalties (CVO ou contributions volontaires obligatoires ! ) sur les 34 espèces (3) autorisées à la multiplication, soit s’abstenir, pour toutes les autres espèces, sous peine d’être accusé de contrefaçon ! Or, le retrait de cette prérogative paysanne plurimillénaire est un sérieux coup dur porté à la biodiversité cultivée ! Les semenciers se sont indûment approprié le travail de sélection effectué depuis le début de l’agriculture par les agriculteurs.

Indemniser les agriculteurs, sur les zones prioritaires pour la biodiversité

La CR ne s’oppose pas à la mise en place de telles zones, à la seule condition qu’une indemnisation pérenne et régulièrement réactualisée des exploitants et propriétaires soit prévue, afin de compenser les manques à gagner ou moins-values liés aux atteintes à la liberté d’entreprendre et au droit de propriété.

Instaurer un réel pluralisme à l’AFB

L’agriculture valorise la moitié de la surface du territoire national. À ce titre, il est déplorable que l’ensemble des syndicats représentatifs ne siègent pas à l’Agence Française de la Biodiversité (AFB). En janvier 2017, la CR a demandé une place au conseil d’administration de l’AFB, ce qui lui a malheureusement été refusé.

Pourtant, la CR organise depuis 1999 un festival dédié à l’agro-écologie, le NLSD (non labour et semis direct), ce qui fait d’elle un pionnier en la matière !
Elle participe aussi assidûment aux travaux de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), dont elle est membre du Conseil d’orientation stratégique (COS).

(1) Article L110-1 du code de l’environnement
(2) Article L123-1-5 du code de l’environnement
(3) Soit 21 espèces visées par la loi du 8 décembre 2011 : l’avoine, l’orge, le riz, l’alpiste, le seigle, le triticale, le blé tendre, le blé dur, l’épeautre, les pommes de terre, le colza, la navette, le lin oléagineux, le pois chiche, le pois fourrager, le lupin jaune, la luzerne, le trèfle d’Alexandrie, le trèfle de Perse, la féverole et la vesce commune.
+ 13 espèces visées par le décret du 1er août 2014 : le trèfle violet, le Trèfle incarnat, le ray grass d’Italie, le ray grass hybride, la gesse, le soja, la moutarde blanche, l’avoine rude, le pois protéagineux, le lupin blanc, le lupin bleu, la lentille et le haricot.

Télécharger cette fiche thématique

Dans la même catégorie

Nos revendications
Nos revendications
Nos revendications
Nos revendications