Dans la quête de nouvelles sources d’énergie de substitution au pétrole, l’agriculture est souvent mise à contribution. Non contente de devoir nourrir le monde, elle est proposée comme devant être directement ou indirectement source d’énergie. Avant toute chose, il nous paraît essentiel de rappeler qu’un des objectifs prioritaires de l’agriculture européenne est de viser l’autosuffisance alimentaire de l’Union européenne qui n’est pas atteinte. Loin de là !

Pour autant, face au manque de rémunération des produits agricoles, les agriculteurs doivent savoir saisir toutes les opportunités qui se présentent pour améliorer leurs conditions de vie, notamment celles liées à la politique de la transition énergétique avec ses objectifs nationaux du PPE (Plan pluriannuel de l’énergie).

Alors que la puissance installée en photovoltaïque est aujourd’hui de 10 GW, le PPE prévoit un objectif de 35 à 44 GW pour 2028 soit un multiple de 4 en 7 ans. Sachant qu’il a fallu plus de 12 ans pour atteindre 10 GW installés il est clair que le défi est de taille pour cette source d’énergie.

Pour saisir concrètement ce que représentent ces puissances supplémentaires attendues dans l’espace agricole, considérons qu’on peut installer 1MWc de photovoltaïque au sol sur 1 ha. Donc pour réaliser 30 GW de plus en 7 ans, une surface au sol de 30 000 ha environ est nécessaire. Cela représente 2 000 sites potentiels de production de 15 ha en France.
Pour atteindre ces objectifs, il est évident que des centrales photovoltaïques seront installées sur des terres agricoles. En plus des implantations de panneaux dédiées quasi exclusivement à la production énergétique on parle aussi d’agrivoltaïsme qui doit permettre de concilier production agricole et production d’électricité photovoltaïque.

Or, ce sont les agriculteurs qui gèrent et valorisent, souvent difficilement, près des deux tiers du foncier de ce pays et l’Histoire nous montre que pour tous les projets, la valeur ajoutée leur est systématiquement confisquée. Le bon sens paysan et le fait que la production d’énergie soit en lien avec l’activité agricole, impliquent que l’agriculteur reste maître de la gestion de ces sols occupés par des panneaux photovoltaïques.

Chaque projet est unique, il en va de même pour la faisabilité et la rémunération. La CR invite les agriculteurs à bien évaluer leur projet et les met en garde notamment au sujet du coût du raccordement qui peut être onéreux et problématique. En effet, les réseaux électriques appartenant à EDF, ces derniers appellent une location au mètre linéaire.

La CR déplore la déprise foncière et constate que chaque année 33000 ha quittent l’agriculture pour retourner à la forêt ou la friche. Certaines régions ne trouvent plus d’agriculteurs pour reprendre ces terrains et/ou y installer des jeunes. La CR qui se bat pour la souveraineté alimentaire est consciente de l’importance pour notre pays d’aller vers la souveraineté énergétique. Étant les premiers acteurs du monde rural, les agriculteurs doivent s’imposer dans ce dossier afin de capter de la valeur sur les fermes pour les rendre résilientes et cessibles, plutôt que laisser faire les énergéticiens à qui il faudrait, par ailleurs, restreindre l’accès à l’achat du foncier.

Artificialisation

Contrairement à la bétonisation, la CR reconnaît la réversibilité de ces dispositifs en cas d’arrêt de la production.

Une partie de la valeur ajoutée pour les agriculteurs

Les projets dans l’agrivoltaïsme représentent des millions d’euros d’investissement et ne sont donc pas accessibles à un seul agriculteur. Pour récupérer une partie significative de la valeur ajoutée permise par ces projets, rentables mais très exigeants en capitaux, il est nécessaire de créer un fonds d’investissement porté par des agriculteurs. Tout au moins il convient d’avoir des contrats équilibrés et rémunérateurs pour l’agriculteur.

L’activité agricole doit rester significative

L’implication des agriculteurs dans ces investissements a du sens car cela va leur permettre de veiller à la bonne adéquation entre ces dispositifs et des activités agricoles pérennes. En outre, compte tenu de la rentabilité de ces projets, il est plus que légitime que la valeur ajoutée permise par l’utilisation du foncier agricole retourne vers les agriculteurs (sans oublier les propriétaires).
Le principe fondamental établissant que l’activité agricole doit rester significative doit être la règle nationale, sans cadre ou précision supplémentaire. Cela permet à tous les dossiers d’être examinés en CDPENAF, et d’être évalués selon les contextes locaux par rapport à ce principe.

L’avis de la CR

Déplorant que l’acte de production alimentaire ne soit plus reconnu à sa vraie valeur et ne permette plus aux agriculteurs de vivre normalement de leur profession, la Coordination Rurale ne s’oppose pas à ce qu’une partie de l’espace agricole soit utilisé à cette fin de production d’énergie. Mais la Coordination Rurale attire sur plusieurs points l’attention des agriculteurs tentés par cette activité énergéticienne.

La Coordination Rurale est très attachée à la liberté des agriculteurs et s’oppose à toute sélection de terrains éligibles autre que celle réalisée par les agriculteurs eux-mêmes en accord avec les propriétaires s’ils sont preneurs.

Elle leur recommande de se prémunir contre toute mauvaise surprise à moyen et long terme qui pourrait résulter d’une défaillance de l’exploitant si l’exploitation est déléguée, tout en cherchant à participer autrement que de façon marginale aux bénéfices tirés de l’exploitation des installations posées sur leurs terrains.

Ils doivent également s’assurer qu’en fin d’exploitation photovoltaïque, les terrains soient totalement débarrassés des installations principales et accessoires nécessaires à la production et à la vente de l’électricité.

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