Suite à la vidéo de présentation du 6 juillet 2021 (https://youtu.be/e8Aqpc-29v0) sur les propositions du Think tank agroalimentaire du groupe des Échos, réalisée par Jean-Marie Séronie, agroéconomiste, la Coordination Rurale se pose de nombreuses questions. Voici la réaction de Véronique Le Floc’h, vice-présidente de la CR, qui soulève plusieurs interrogations :

Est-ce que nous comprenons bien ce que dit M. Séronie ?

Actuellement, les fonds d’investissements existent déjà sous différentes formes telles que les FCPI (Fonds commun de placement dans l’innovation – 25 % de réduction d’impôts avec obligation de les garder 5 ans), les SCPI (Société civile de placement immobilier), SICAV (Société d’investissement à capital variable), etc.

Ces fonds sont mis sur le marché par des banques ou d’autres institutions qui payent les intérêts aux porteurs de parts, lesquels peuvent être des fonds de pension, des fonds d’investissements, ou des particuliers directement.

Le montant du fond, donc du prêt, est en général rapporté au montant de l’actif immobilisé. Plus le risque de dépréciation de l’actif est faible dans le temps, plus le prêt via ces fonds est élevé et peut aller jusqu’à 80 % de sa valeur.

Pour illustrer mes propos, prenons l’exemple suivant : un agriculteur souhaite financer une stabulation de 100 places à 7,5 k€/VL (contre 2,5 k€ en 2000) avec un ratio de financement par le fond de 50 %. Ainsi, nous aurions :

  • 375 k€ financés via un fond avec en général une somme légèrement moindre versée pour tenir compte des frais de départ
  • 375 k€ empruntés par l’agriculteur sur 15 ans
 

Par conséquent, le coût du projet serait de :

  • 18,75 k€/an d’intérêt : 5 % rémunérant le fond de 375 k€ comme dans l’exemple de M. Séronie
  • 30 k€/an de remboursement (capital + intérêts) pour le prêt sur 15 ans
 

CEPENDANT, il est nécessaire de prendre en compte les points suivants :

  • Entre 18,75 k€ et 30 k€/an, sans rembourser de capital, le « vrai disponible » permis, selon les termes de la vidéo des Échos, ne serait que de 11,25 k€/an ; ce n’est que 3 k€ pour 100 k€ financés via le fond et non 20 k€ pour 100 k€ comme indiqué dans la vidéo de présentation.
  • Comme l’outil se déprécie, contrairement à des bureaux ou d’autres locaux commerciaux (la SDT de 150 k€ ne vaut peut-être pas plus que 25 k€, les tapis et les logettes sont presque à changer, les normes ont évolué…), au bout de 15 ans il ne vaut en réalité que ces 375 k€.
 

En admettant que la durée d’engagement des fonds placés sur ce fond soit de 15 ans aussi pour les investisseurs, ces parts ne seront pas à terme reprises par d’autres investisseurs puisqu’elles auront déjà été financées !

L’agriculteur devrait-t-il alors rembourser le fond et donc repartir sur un emprunt de 375 k€ pour le solder ? Quelle banque le suivrait ?

Ou, si ces fonds étaient liés à une hypothèque comme au Danemark, le bâtiment serait-il mis en vente ? Ou, si l’agriculteur trouvait preneur à 375 k€, le fond serait soldé, mais lui n’aurait rien de son outil, uniquement le prix des vaches et du matériel ?

Nous pouvons aussi imaginer l’opération avec des intérêts à taux fixe (plus le risque incluant la dépréciation est important, plus le taux pourrait être élevé) ou variable avec des conséquences suivant l’inflation ! Si en raison d’un endettement déjà important sur l’exploitation, la part portée par le fond était de 80 % (et non 50 % comme dans mon exemple), l’agriculteur serait-il engagé sur ses biens propres ??

Si l’exploitation était liquidée, le fond pourrait perdre ses créances. Jusqu’où pourrait aller la garantie du trésor ? Nous les agriculteurs, devons-nous accepter un tel système qui garantirait les investisseurs, mais pas nous, investisseurs travailleurs ?

Et pourquoi pas ces avantages fiscaux directement aux agriculteurs investisseurs ? Des crédits d’impôts plutôt que des réductions !

Pour conclure, où est la différence avec Labeliance Invest qui n’a pas marché ?

Plus d’infos sur la réaction de la CR sur Labeliance Invest  : https://www.coordinationrurale.fr/labeliance-agri-business-angel-exige-135-a-155-de-rentabilite/ https://www.coordinationrurale.fr/la-financiarisation-de-lagriculture-est-en-marche/

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