Jeudi 13 avril 2017, 9h00

Devant le siège régional de l’ASP, dans la banlieue Sud d’Orléans, une quarantaine d’agriculteurs de la Coordination Rurale du Centre et de l’Île-de-France, s’agglutinent face à un portail fermé à double tour.

Ils sont venus du Cher, du Loir-et-Cher, du Loiret, de l’Eure-et-Loir, de l’Essonne ou encore de la Seine-et-Marne, avec cette lueur d’espoir que seuls les paysans sont encore capables d’avoir malgré la fatigue et les difficultés quotidiennes. Le froid du petit matin fige quelques sourires pour certains, des larmes pour d’autres. Une guillotine est installée, symbole précaire de leurs souffrances et de la Terreur administrative dont ils sont victimes. Philippe Ribault, président de la CR Centre tonne d’une voix résignée à l’adresse des fonctionnaires présents : « Vous débarquez chez nous à plusieurs pour y effectuer des contrôles. Et, ici, nous n’avons pas accès à vos bureaux ! Sachez que nous refuserons désormais tout contrôle PAC, tant que le solde restant dû des années précédentes ne sera pas crédité sur nos comptes. Vous ne rentrerez plus sur nos fermes ! »

Un propos qui permet à une délégation d’agriculteurs d’être reçue par Jean-Luc Guyoux, directeur régional adjoint de l’ASP, assisté de Stéphanie Mathe, responsable des paiements de l’ASP, et d’Isaline Bard, cheffe du service Agriculture de la DDT 45.

La discussion s’engage autour du non-versement des aides. Très rapidement, le directeur adjoint avoue entendre la détresse des agriculteurs, mais que cette situation, à cheval sur trois campagnes, ajoute de la complexité à un système déjà emmêlée. Il rappelle que l’objectif est que le paiement soit effectué le plus vite possible pour tous les dossiers. L’administration tente de se dédouaner des retards en justifiant l’application des nouvelles règles PAC, du FEAGA, de l’audit de l’Union européenne critiquant la qualité et la précision du RPG. Un travail jugé « monstrueux » et « pharaonique », selon M. Guyoux qui a assisté aux travaux dans le Loiret.

« Si l’on peut vous aider à aller plus vite, dites-le nous ! » l’interpelle un agriculteur présent.

La discussion se poursuit avec âpreté : les paysans rappellent que les règles changent tous les deux ans. Cela engendre de l’instabilité, une adaptabilité forcée, des perturbations à outrance. Sans les aides PAC, le montant des DPB, et la connaissance des règles un ou deux ans à l’avance, plusieurs niveaux de blocage sont mis en avant :

• les banques tout d’abord, qui exigent toujours plus de garanties de montant et de remboursement ; • les jeunes, qui hésitent à s’installer de peur de ne pouvoir vivre du métier ; • les agriculteurs, perdus dans l’angoisse de ne jamais « faire ce qu’il faut à temps », avec des situations pouvant conduire au suicide.

Face aux regards insistants des agriculteurs et agricultrices présents, M. Guyoux évoque un semblant de calendrier :

• MAE 2015, début d’été après réalisation des contrôles ; • MAE 2016, une ATR a été versée en mars/avril ; • DPB, 95 % des aides en mai ; • Paiement vert, 95 % fin mai ; • Solde de ces 5 % en juin ; • Confirmation que le remboursement de trop-perçus se fait en priorité sur les aides à percevoir, mais qu’en est-il des dossiers qui ne recevront plus d’aides ?

Alors qu’à l’intérieur des bâtiments administratifs, la déception marque peu à peu les visages de nos agriculteurs, ceux qui sont restés dehors manifestent leur impatience, aidés en cela de cornes de brumes. Décision est prise en fin de matinée de préparer un casse-croûte, un apéritif à la hauteur de ce que savent faire les paysans… L’émotion du matin cède le pas à la paix et la joie de la convivialité.

Enfin, vers 12h15, la grande porte de l’ASP s’ouvre dans une sorte de solennité quasi-pontificale, libérant les agriculteurs et agricultrices de leur réunion. On peut distinguer des visages graves, des têtes baissées. Accueillis par leurs collègues restés dehors, leur rencontre avec le directeur-adjoint de l’ASP est méticuleusement racontée. « Du blabla ! », évoquent certains d’entre eux. « Ils écoutent mais n’entendent pas » reprend une autre.

Mis à part un calendrier de paiement aux allures de promesse électorales, la proposition de revenir à un code unique et permanent de connexion à Telepac a été refusée car trop compliquée pour l’administration ! De même, qu’aucune réponse n’a été obtenue sur les dossiers PAC transmis avant l’entretien…

La manifestation se disperse en début d’après-midi : les agriculteurs repartent vers leurs exploitations, déterminés à revenir rapidement si l’administration ne tient pas parole. « L’ASP, Agence pour la Suppression des Paysans », lâchent certains…

M. Guyoux, directeur régional adjoint de l’Agence de service et de paiement, est prévenu…

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