Et si, à cause de l'inflation, les consommateurs renonçaient aux produits bio ? Après quatorze années consécutives de hausse des ventes qui les ont fait passer de 2,1 à 13,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires, les ventes de produits alimentaires issus de l’agriculture biologique continuent de baisser en 2022.

« En 2020 ce marché enregistrait encore une croissance à deux chiffres de l’ordre de +12%. Mais en deux ans seulement, la courbe est en train de s'inverser », déplore Franck Olivier, responsable de la section Bio à la Coordination Rurale.

Les Français délaissent les produits bio

Une tendance qui se vérifie dans le panier du consommateur. L’an passé, plus de 9 Français sur 10 déclaraient consommer des produits biologiques et 15% précisaient en consommer tous les jours. Aujourd’hui, alors que l’inflation touche le pouvoir d’achat des Français, ces derniers délaissent de plus en plus l’alimentation bio. Ils privilégient désormais une consommation responsable, mais moins chère.  « Soumis à des arbitrages budgétaires, les consommateurs ont tendance à se détourner des produits bio, qui ont la réputation d’être plus chers », confirme Frank Olivier.

Une baisse générale de la consommation

Toutefois selon le responsable de la section Bio, ce ralentissement n’est pas uniquement lié à l’inflation. « Les Français ont commencé à acheter moins de produits bio avant la hausse des prix généralisée que l’on connaît maintenant. D’ailleurs, le bio est plutôt moins touché par l’inflation, car on utilise moins d’engrais, et moins d’intrants, importés et coûteux en énergie. En réalité, on consomme aussi moins de bio, parce qu’on consomme moins de tout : les Français ont réduit le budget alimentaire global ».

Les producteurs, premiers impactés

La baisse ne semble pas impressionnante : moins d’1% en 2021 par rapport à 2020, mais elle est tout de même inédite. « Et les premiers à s’en rendre compte, ce sont les producteurs », rappelle Frank Olivier. « Ce décrochage du bio intervient dans toutes les filières, dont certaines sont aujourd'hui en situation de surproduction. Cela pousse les industriels à actionner le freinage d'urgence et les agriculteurs à vendre leurs produits bio à prix moindre, et donc à perdre de l'argent ».

Une baisse des conversions

Résultat, ce ralentissement du bio s’observe aussi dans les champs. « Les agriculteurs sont de moins en moins nombreux à se convertir. Certains font même le choix de revenir à d’autres modes de production », regrette Frank Olivier. Pour l’instant, selon l’Agence Bio, chargée de la promotion de ce mode de production, le taux de déconversions ​- qui comprend les départs à la retraite – est quasi stable, à environ 4 %, soit un peu plus de 2 200 exploitants qui ont quitté les rangs sur les 53 000 installés en bio.

> Pour rappel, 10 % des surfaces agricoles françaises sont consacrées au bio : « C’est bien, mais c’est encore très loin de l’objectif national fixé à 18% d’ici 2027. Pour l’atteindre, il faudrait déjà que le marché redémarre », souligne Frank Olivier.

Soutenir la demande

Pour le responsable de la section Bio, la priorité n’est toutefois pas de soutenir l'offre - autrement dit, l'installation de nouveaux agriculteurs bio. « Vu la conjoncture actuelle et la tendance qui risque de ne pas s’inverser, il faudrait aller jusqu’à mettre en place une année blanche en matière de reconversion, hormis pour les agriculteurs qui peuvent obtenir une contractualisation de leur production à un prix rémunérateur ».

Selon lui, la priorité est surtout de soutenir la demande.  « Depuis le 1er janvier 2022, la loi Egalim impose à la restauration collective publique de proposer au moins 50% de produits durables et de qualité dont au moins 20% de produits bio. A la Coordination Rurale nous demandons que cette règle s'applique, mais surtout qu'il s’agisse de produits d’origine française ! ».

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