Tracteur

L'irrigation : un des grands sujets agricoles. La CR apporte quelques éclaircissements, ses positions et solutions.

De l’intérêt de l’irrigation

En période de sécheresse, l’irrigation agricole est couramment accusée d’être la cause du déficit d’eau en France et les irrigants sont souvent victimes d’une inversion : ce n’est pas parce qu’ils arrosent qu’il y a de la sécheresse mais c’est à cause de celle-ci qu’ils doivent arroser !

La critique est facile, cependant la réalité des relations entre l’eau et l’agriculture est plus complexe. L’eau pour les plantes, c’est la vie ! Tous les végétaux consomment de l’eau pour leur développement, y compris les cultures non irriguées et les forêts.

Contrairement aux autres syndicats, la CR défend l’irrigation sans complexe à partir du moment où elle respecte les équilibres vitaux, c'est-à-dire sans assécher les cours d’eau ou les ressources en eau potable. L’irrigation, ce n’est jamais que d’essayer de s’affranchir des contraintes climatiques ou pédologiques pour ramener aux racines l’eau de pluie que le sol n’a pu stocker comme l’avaient déjà compris les Maures en créant les réseaux d’irrigation dès le VIIIème siécle en Andalousie.

Cette pratique coûteuse pour l’agriculteur en matériel, en énergie et en main d’œuvre, régularise les rendements des cultures, assure la bonne utilisation des fertilisants, augmente l’hygrométrie de l’air et donc contribue à réduire la température en période de canicule. Elle lutte donc doublement contre l’effet de serre, car elle permet aussi de fixer une grande quantité de CO2.

L’irrigation est source de richesse et d’emplois. Il faut l’encourager, c’est pourquoi la CR est pour la gratuité de l’eau d’irrigation aux agriculteurs qui engagent d’énormes investissements et qui consomment de l’énergie pour la mettre en œuvre. Elle est donc contre le principe des volucompteurs obligatoires, coûteux, peu fiables et dont l’objectif principal est de faire payer l’eau comme si l’usage de l’eau d’irrigation avait les mêmes caractéristiques que celui de l’eau domestique rejetée salie.
La CR œuvre pour une politique ambitieuse à long terme de création de nouvelles réserves, par le développement de retenues dans les bassins versants.

Ce sont les surfaces agricoles qui, en France, réalimentent principalement les nappes phréatiques.

L’agriculture, bien qu’importante utilisatrice d’eau, est le seul secteur dont le bilan hydrique soit positif : elle consomme infiniment moins d’eau  que  celle qu’elle reçoit sous forme de pluie recueillie sur les prés et les champs, et elle en restitue donc beaucoup dans le sous-sol.
Il se perd des milliards de m³ d’eau tous les hivers et l’irrigation utilise 1% de la pluviométrie annuelle. (4,5 milliards (Mrd) de m³ sur les 440 Mrd m³ qui tombent sur le sol français, source http://eau.fne.asso.fr/documents/publi-et-outils/Dossier_GestionEauFrance.pdf).

L’eau, en quantité constante sur et autour de notre planète s’inscrit dans un cycle auquel l’agriculture comme la forêt participent. Aujourd’hui, le problème auquel nous sommes confrontés concerne plus la réalimentation des nappes et le besoin global en eau des différents secteurs - dont l’agriculture -, que la seule irrigation agricole. De plus les plantes, irriguées ou non, utilisent la même quantité d’eau pour assurer leur croissance. La différence tient en fait à la capacité de rétention des terres dont certaines ne nécessitent pas d’irrigation parce que capables de stocker l’eau en quantité suffisante alors que d’autres, très filtrantes ne la retiennent pas et nécessitent un arrosage plus ou moins fréquent et abondant.

La sécheresse sévit déjà Le mois d’avril ayant été exceptionnellement sec, et la sécheresse se poursuivant en mai, 33 départements français sont déjà touchés par des restrictions d’usage de l’eau :
Ain (01), Ardèche (07), Charente (16), Charente-Maritime (17), Cher (18), Côte-d’Or (21), Dordogne (24), Doubs (25), Eure (27), Gers (32), Indre (36), Indre-et-Loire (37), Isère (38), Jura (39), Loire-Atlantique (44), Lot (46), Lot-et-Garonne (47), Maine-et-Loire (49), Nièvre (58), Oise (60), Rhône (69), Haute-Saône (70), Savoie (73), Seine-Maritime (76), Seine-et-Marne (77), Deux-Sèvres (79), Somme (80), Tarn (81), Vendée (85), Vienne (86), Yonne (89), Territoire de Belfort (90), Essonne (91), Val de Marne (94).

La ministre de l’Ecologie Nathalie Kosciusko-Morizet a convoqué un « comité sécheresse » pour la mi-mai. Ce comité se réunira ensuite toutes les 6 semaines pour préparer la secheresse à laquelle on peut s’attendre pour cet été.

En France, environ 58% des réservoirs d’eau affichent un niveau inférieur à la normale.
Pour tordre le cou à certaines idées reçues Les cultures irriguées ne représentent que 4% des besoins en eau de l’agriculture et seulement 2 % des besoins si on y ajoute la forêt et les espaces verts. L’irrigation n’utilise que 4,5 Mrd m³ d’eau, contre 18,5 Mrd m³ pour les centrales thermiques, 6 pour la consommation humaine et 4 pour l’industrie.
Sur sol sableux comme dans les Landes, le maïs irrigué est moins exigeant en eau que les forêts de pin maritime, réputé économe en eau ! Le maïs est en fait la grande culture qui consomme le moins d’eau, avec sa photosynthèse en C4.
En une seule journée d'hiver à Agen, il passe plus d'eau dans la Garonne que n'en utilisent tous les irrigants du Lot et Garonne pendant l'été.

 

La loi sur l’eau : un vrai millefeuille règlementaire

La police de l’eau ne se limite pas à la réglementation contenue dans la législation se rapportant directement à l’eau. On en retrouve certains aspects dans d’autres textes, par exemple la loi du 9 août 2004 relative à la santé publique et loi du 13 août 2004 sur les libertés et les responsabilités locales.
Cette omniprésence s’explique par le fait que nous sommes tous concernés par la police de l’eau : toute personne qui ouvre un robinet d’eau y est confrontée. Les différents usages qui peuvent être fait de l’eau ou les conséquences que peuvent avoir les activités humaines sont très variés et sont d’importances diverses ou du moins considérés comme tel.
Ainsi, le principe de gestion équilibrée et durable de la ressource doit permettre de satisfaire ces multiples usages. La loi de 2006 a défini une hiérarchie des usages : en priorité les exigences de la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l'alimentation en eau potable de la population. La satisfaction d'autres usages, et notamment ceux de l'agriculture, de la pêche, des cultures marines est secondaire, comme d'ailleurs les autres activités économiques et sportives. Elle est, en outre, mise sur le même plan que la conservation de la vie biologique du milieu récepteur, la conservation et le libre écoulement des eaux au titre de la protection contre les inondations.
Chaque schéma d'aménagement et de gestion des eaux peut, au demeurant, définir des priorités d'usage de la ressource, ainsi que la répartition de volumes globaux de prélèvement par usage.

Les différentes lois sur l’eau

La loi sur l’eau est en fait la résultante de nombreuses lois, créant un vrai millefeuille règlementaire dont voici les grandes lignes :

tableau loi irrigation

La gestion de l’eau touche tous les aspects de cette ressource : cela va donc de la lutte contre les inondations à la lutte contre la sècheresse, sans oublier la qualité de l’eau. C’est ainsi que l’on rencontre en agriculture des mesures comme la directive nitrate ou l’obligation des bandes enherbées pour maintenir la qualité de l’eau et les autorisations de prélèvement en vue de l’irrigation pour maintenir le niveau de la ressource.
Actuellement, le changement le plus important est celui qui concerne la procédure d’autorisation des prélèvements avec la mise en place d’un organisme unique de gestion collective, celui-ci pouvant être désigné d’office par le Préfet dans les zones considérées comme déficitaires (ZRE).

En zone de répartition des eaux, le préfet peut désigner d'office un organisme unique de gestion collective sur le périmètre qu'il détermine.

La gestion collective de l’irrigation

irrigation2


L’idée est de mettre en place une gestion collective de l’irrigation en ayant une vue d’ensemble. Il s’agit de déterminer le volume d’eau maximum qui peut être prélevé dans une ressource sans la mettre en péril et de faire en sorte que le volume total prélevé par l’ensemble des irrigants ne l’excède pas.
Si la somme des volumes actuellement autorisés dépasse le volume prélevable, il faudra faire en sorte de les diminuer pour les aligner progressivement, pour que l’ajustement total soit réalisé dans six ans.

Pour cela un organisme intermédiaire est créé : l’organisme unique de gestion collective (OU). C’est lui qui est censé recueillir les souhaits des irrigants et qui détiendra une autorisation globale pluriannuelle de prélèvement. L’OU se substitue de plein droit aux pétitionnaires ayant présenté une demande d'autorisation de prélèvement d'eau pour l'irrigation en cours d'instruction à la date de sa désignation.
Il répartira ensuite les volumes entre les irrigants selon un plan de répartition arrêté chaque année.

Le calendrier de mise en place

Etape 1 : l’identification des zones en « déficit quantitatif » et le classement en ZRE

Les préfets avaient jusqu’au 31 juillet 2008 pour identifier les zones en « déficit quantitatif », c'est-à-dire des zones ayant des problèmes avec leur ressource en eau les rendant prioritaires. Les préfets pouvaient décider de classer ces zones en ZRE. Si tel était le cas, les procédures de classement devaient être engagées avant le 1er septembre 2008.

Etape 2 : la détermination des volumes prélevables et des volumes prélevés autorisés

Il fallait déterminer avant le 31 juin 2009 le volume total qu’il est possible de prélever dans une ressource sans la mettre en danger 8 années sur 10. Ce volume global prélevable s’entend tous usages confondus. A l’intérieur de ce volume, un volume prélevable pour l’irrigation est identifié. La Police de l’eau devait dresser un état de la situation administrative des prélèvements dans le département afin de déterminer le volume total prélevé autorisé. Dans le cas où le volume prélevé autorisé est supérieur au volume prélevable, les préfets devaient mettre en œuvre un programme de révision pour faire en sorte d’aligner ces deux volumes. Cela implique donc une réduction progressive des volumes autorisés.  Le volume total autorisé devra être au plus égal au volume prélevable avant une date fixée par le préfet coordonnateur de bassin après avis du comité de bassin, et au plus tard le 31 décembre 2014.

Etape 3 : les candidatures des OU = l’étape en cours

Il s’agira d’une personne morale de droit public ou privé qui sera désignée par le préfet du département concerné à l’issu d’un processus de candidature assez long et d’un dossier complexe. Il semblerait logique que cette structure représente les irrigants mais en théorie  ce peut être un syndicat d’irrigants, une chambre d’agriculture, une association de protection de l‘environnement ou encore toute structure en mesure de répondre à l’appel d’offre lancé par le Préfet. En effet, le texte réglementaire n’impose pas que ce soit une structure agricole, reprenant le terme générique de « personne morale ». La circulaire semble « privilégier » un organisme agricole ou mixte… à suivre !

Dans le cas où l’OU serait compétent sur plus d’un département, il est nommé par un arrêté conjoint des préfets concernés. Cette situation devrait se rencontrer fréquemment dans la mesure où les périmètres des OU sont censés correspondre non à des limites administratives mais hydrologiques mais il semble que les Préfets soient très attachés à leurs limites départementales.

Attention au peu d’information : il n’y aura pas d’enquête publique mais un registre sera tenu à la disposition du public à la préfecture et en sous-préfecture.

Etape 4 : l’autorisation globale pluriannuelle de prélèvement

Dès la nomination de l’OU, plus aucune autorisation individuelle de prélèvement n’est accordée. C’est l’OU qui recueille les souhaits des adhérents et qui ensuite fait une demande pour un volume global à prélever. Attention : l’invitation de l’OU aux irrigants de son périmètre à émettre des vœux se fait par voie de presse. Un avis est inséré dans deux journaux locaux ou régionaux 4 mois avant la date butoir de remise des souhaits.

 

Une enquête publique est réalisée avant la délivrance de l’autorisation unique pluriannuelle de prélèvement. C’est l’OU qui reçoit cette autorisation. Il répartit ensuite le volume qu’il a ainsi obtenu en fonction d’un plan de répartition. Ce plan est revu tous les ans et doit être élaboré en concertation avec les irrigants du périmètre. Le volume qui a été autorisé à l’OU est en revanche accordé pour plusieurs années (maximum 15 ans) mais cela ne signifie pas que le volume à prélever pendant cette période sera le même pour chaque année. Comme dit plus haut, un échéancier peut être prévu pour ramener les volumes autorisés au volume prélevable.

Dans le cas où des demandes individuelles sont en cours d’instruction au moment de la désignation de l’OU, ce dernier se substitue automatiquement au demandeur. Celui-ci recevra un courrier qui l’en informera. Il ne recevra donc pas de réponse à sa demande de la part de l’administration mais devra s’adresser à l’OU.

Etape 5 : l’interdiction des autorisations temporaires dans les ZRE au 31 décembre 2010

A compter du 1er janvier 2012, les Préfets ne pourront plus inclure de ZRE dans les périmètres où la délivrance d’autorisations temporaires communes à plusieurs irrigants restera possible (une exception est prévue pour les ZRE délimitées depuis le 1er janvier 2009, qui disparaîtra elle aussi au 1er janvier 2014). Un renouvellement des autorisations temporaires sera en principe possible s’il est demandé avant la date limite ainsi fixée.
Dans tous les cas, si une fois passé la période de validité de l’autorisation temporaire (initiale ou renouvelée) aucun OU n’est opérationnel dans la zone concernée, les irrigants qui utilisent ce type d’autorisation devront demander des autorisations permanentes. Ce sera alors la règle du « premier demandeur/premier servi » qui s’appliquera. En effet, il ne sera possible d’autoriser les prélèvements qu’à hauteur du volume prélevable maximum. Une fois ce volume atteint, les demandes suivantes ne pourront se voir accordées.

Conséquences

Le nouveau système soulève de nombreuses interrogations : nombre de ces questions quant à sa mise en place et à son fonctionnement concret doivent être soumises aux Préfets, qui en sont directement responsables, ainsi qu’au ministère de l’agriculture et au ministère de l’écologie.

 

irrigation3

Comment s’appliquera la réglementation à ceux qui bénéficiaient d’autorisation avant 1992?
Que va avoir à gérer l’OU ? Toute l’eau autorisée (et celle d’avant 1992 ?) ? Toute l’eau ? Quid des nappes de surface et des nappes profondes : sont-elles considérées comme une seule et même ressource à gérer par un OU ? Quelle définition des « périmètres cohérents » ? Quelle échelle considérer ? Comment gérer les limites administratives (départements, régions) qui s’ajoutent aux limites physiques des bassins et est-il souhaitable qu’un OU d’un autre département gère une ressource ? Quel arbitrage avec les autres usages (et notamment les carrières, qui prélèvent en nappe superficielle pour rejeter dans la rivière) ?

Si dans l’hypothèse où le nouveau système s’applique malgré ses incohérences – ce qui risque fort d’être le cas -, des autorisations sont délivrées, celles-ci sont attaquables dans les 2 mois, ce dont les environnementalistes, s’ils ne sont pas satisfaits, ne risquent pas de se priver. Or, l’autorisation concernant l’ensemble des prélèvements d’irrigation pour un bassin, cela pourrait bloquer tout le système et empêcher toute irrigation.

Les agriculteurs ayant financé sans aucune subvention la création de certains ouvrages de stockage doivent aujourd’hui payer pour avoir accès à l’eau de ces réserves. En outre, le paiement est encore au forfait, mais il se pourrait que cela devienne bien plus coûteux. Par ailleurs, des chantiers de création de réserves sont abandonnés du fait des actions des environnementalistes. Pour créer un lac collinaire, il faut environ 10 ans ! Dans les faits, seuls les lacs dits « de substitution » sont autorisés à la création, la réglementation n’autorisant pas la création de nouvelles ressources.

Adour Garonne : le mauvais exemple

eau2

La mise en place des volumes prélevables pose souci dans le bassin Adour Garonne. L’exemple du bassin de la Thèze est parlant : en 2009, qui était une année très sèche, 230 000 m3 ont été utilisés. Ce volume a été mesuré, il est connu et certain. Au départ, l’administration avait fixé le volume prélevable à 40 000 m3 seulement ! Aujourd’hui, le volume prélevable est de 150 000 m3, ce qui sera insuffisant pour maintenir les cultures en année sèche. Ceci alors que la meilleure assurance sècheresse, c’est l’irrigation !

Le bassin du Clain à l'étude

La directive-cadre sur l’eau (DCE) du 23 octobre 2000  vise à obtenir le « bon état écologique » des milieux aquatiques et des bassins versants pour 2015. Pour atteindre cet objectif et notamment le retour à l’équilibre entre les besoins et la ressource en eau, il a été défini, sur le bassin du Clain, des volumes prélevables dédiés à l’irrigation. Ainsi, sur les 37,1 millions m3 actuellement attribués seuls 23,5 millions m3 seraient attribuables en 2017.
Pour ce faire, la Chambre d’Agriculture de la Vienne est en train d’établir un contrat territorial de gestion quantitative de ressource en eau sur ce bassin. Ce contrat mobilisera l’ensemble des acteurs (les irrigants, les services de l’état, les pêcheurs et diverses associations) afin de répondre à cette directive tout en préservant une agriculture économiquement viable. Une des solutions serait la création de réserves de substitution qui pourraient pallier en grande partie cette diminution de volume.
Pour atteindre les objectifs fixés et répondre à la rentabilité des exploitations agricoles, les pouvoirs publics devront montrer une très forte implication, notamment par un soutien financier à la création des retenues.

Philippe Tabarin, CR86

Les volucompteurs : pas pour le 47 !

La Chambre d’Agriculture du Lot et Garonne, l’une des deux chambres CR, s’est opposée aux volucompteurs. Conséquence : les agriculteurs du Lot et Garonne sont en résistance active contre cette règlementation inique ! Dès le départ, la CR avait annoncé que ces contraintes augmenteraient. En effet, si les compteurs ont été subventionnés à l’achat pour être mieux admis, leur entretien et leur contrôle sont à la charge des irrigants, qui sont tenus de les faire vérifier tous les 7ans, sachant qu’actuellement la vérification coûte aussi cher que le remplacement.

Que faut-il faire pour économiser l’eau ?

C’est rechercher les meilleures façons d’accroître les volumes disponibles. Au  XXIème siècle, il est invraisemblable que nous soyons incapables et surtout empêchés de surmonter une simple question de répartition de la pluviométrie.
L’eau n’est pas un élément rare : lorsque je passe à Châtellerault ou à Bonneuil-Matours, j’en vois en quantité toute l’année. Pourquoi ? Parce qu’il y a une levée sur la rivière qui permet de garder des millions de m3. Ce qui fonctionne ici sans révolutions, pourquoi ne pas l’imaginer tout le long des cours d’eau, à intervalles bien choisis ? Nous aurions un fantastique réservoir d’eau pour satisfaire tout le monde. Il y a aussi des terrains imperméables propices aux retenues collinaires.
Ceux qui s’opposent à tout stockage d’eau sont les mêmes qui nous disent que l’eau est rare. Nous sommes là devant un paradoxe. Quand un bien est rare, que fait-on ? Le bon sens commande de le garder, de le retenir.
Ce qui est détestable, déplorable et irresponsable, c’est de laisser filer tant d’eau douce à longueur de temps vers les masses énormes d’eau salée qui recouvrent 70% du globe (rappelons que près de 75% de l’irrigation se fait avec des eaux de surface).
La maîtrise de l’eau, c’est l’âme du métier de l’agriculteur du XXIème siècle. Ceux qui veulent restreindre toujours plus notre accès à l’eau s’attaquent à notre cœur de métier.

JR Gouron

En 2010, de nombreuses actions pour préserver l’irrigation

Particulièrement concernés par le problème, les agriculteurs du Sud-Ouest sont à la pointe du combat contre les nouvelles règles en matière d’irrigation, qui se traduisent par un renchérissement des taxes (+247 % pour l’agence de l’eau Adour Garonne !) et une réduction des volumes autorisés.

Cette loi sur l’eau passe d’autant plus mal que les revenus des agriculteurs sont au plus bas et que cette nouvelle menace sur les rendements est intolérable. Le 22 février, une réunion de la Chambre d’Agriculture 47 avait ainsi réuni près de 700 agriculteurs en colère, préambule aux actions suivantes. Face à la gravité de cette nouvelle contrainte et compte tenu de la faible représentation des agriculteurs au sein de l’agence de l’eau, les CR ont en effet contacté les chambres d’agriculture pour faire cause commune et défendre les irrigants. Une grande manifestation intersyndicale s’était déroulée le 9 mars dans plusieurs villes du Sud-ouest. Interrogé par les journalistes, T. Guilbert, CR32, avait expliqué que « 5 à 6 000 ha de cultures risquaient de ne plus être irrigués » si le nouveau système était appliqué. « Quand un agriculteur aura dépassé son quota de volume d'eau, il ne pourra plus en puiser même s'il y en a assez dans la rivière », a-t-il regretté.

L’irrigation est vitale car en région Midi-Pyrénées, un agriculteur sur deux irrigue pour la production de maïs, de tabac, de melons, de fraises, de tomates, ou pour les vergers. C’est pourquoi le 21 août, lorsque la suppression de la dérogation accordée aux cultures spécialisées irriguées de la vallée de la Grande Barguelonne a été annoncée, la CR46 avait demandé le rétablissement immédiat de cette dérogation puisque la situation hydrologique du département n’était pas alarmante et qu’aucune mesure de restriction  n’avait été prise pour les utilisations de loisirs !
Tout au long de l’année, des rencontres avec les DDT, des courriers aux élus, aux responsables de bassin ont été envoyés. Les syndicats avaient entrepris des démarches auprès des différentes instances départementales pour demander un report de paiement et un gel des redevances sur la base de 2007.

Quelles réponses politiques ? N. Sarkozy, lors de son passage éclair du 21 mai en Lot-et-Garonne, à la veille de l’étude par le parlement du projet de LMA, avait dit être prêt à favoriser les retenus collinaires mais soulignait que l’on ne peut pas traiter tous les départements de la même manière. Pourtant, depuis, aucune autorisation de création de retenue n’a été donnée.

Cela est insuffisant !

La CR, avec sa section hydraulique, mène une réflexion de fond en faveur de l’irrigation.
L’irrigation, source de richesse n’est pas polluante :

  • elle permet d’optimiser la fertilisation et de limiter le lessivage,
  • l’eau brute est dépolluée par filtration sur les champs et par l’évapotranspiration,
  • elle entretien les nappes phréatiques,
  • elle contribue à réalimenter les cours d’eau en restituant l’été l’eau stockée dans les réserves durant l’hiver qui se serait perdue dans la mer,
  • elle dépollue l’air et lutte contre l’effet de serre.


A ce titre, la CR demande :

  • La gratuité de l’eau brute.
  • La gestion des volumes d’irrigation prélevés dans les cours d’eau par débit et non par volume : le même volume de prélèvement aura des répercussions complètement différentes selon le débit de la rivière d’origine. Il faut donc adapter la loi à l’environnement au lieu de fixer arbitrairement un volume !
  • La suppression des taxes liées à l’irrigation. Le principe «pollueur-payeur» signifie aussi : «dépollueur-non payeur» ou même «dépollueur payé»

Dans un contexte de baisse généralisée des prix et de concurrence internationale, sans normes environnementales (PECO), nous ne pouvons pas accepter d’être taxés pour une pollution qui n’existe pas alors que nous rendons gratuitement un énorme service à la société urbaine et industrielle en acceptant l’épandage des boues sur nos terres, seul moyen économique de les dépolluer.

 

Dans la même catégorie

Environnement
Alimentation
Économie
Élevage