Laurent Lheure, vous êtes le représentant de la Coordination Rurale à la commission Bioéconomie de FranceAgriMer. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur  le dernier groupe de travail biocarburants ?

Le sujet principal était l'impact du covid-19 sur les filières biodiesel et éthanol. On peut remercier les agriculteurs et leurs filières qui ont entre autres répondu ces dernières semaines à la très forte demande en gel hydroalcoolique puisque onze distilleries ont travaillé dans ce sens en s'adaptant à cette demande.

Quel impact a eu la crise Covid-19 sur la filière ?

La chute du prix du pétrole dépasse les – 50 %, - 66 % pour l'essence et - 60 % pour le gasoil. La crise du Covid-19 entraîne donc les filières de biocarburants françaises dans une impasse économique. En ce qui concerne le biodiesel, on peut noter que les triturateurs ont continué de produire avec d'énormes pertes financières, sans débouché pour l'huile du fait du confinement.

Cette situation est-elle uniquement due au Covid-19 ?

Non, mais cela accentue les difficultés déjà présentes. Nous savons que, depuis la levée des barrières douanières décidée par l'OMC, le biodiesel de soja transgénique argentin  arrive en Europe à des prix très compétitifs. Du côté des agriculteurs, les interdictions d'un grand nombre de produits phytosanitaires plongent les producteurs dans des impasses et se traduiront par l'arrêt des productions faute de pouvoir faire face aux ravageurs des cultures. Interdire en France l'utilisation des néonicotinoïdes, ne pas donner aux agriculteurs de solutions de remplacement efficaces, mais continuer à autoriser l’importation de denrées traitées avec ces mêmes produits est une aberration mais aussi et surtout une distorsion de concurrence que je trouve inacceptable !

Qu'attendez-vous ?

Nous n'avons aucun retour actuellement du ministère. Il reste 15 jours avant le PLFR-3 (projet de loi de finances rectificative) qui doit avoir lieu début juillet. Tous comptent donc sur cette échéance déterminante car, sans décisions courageuses, la filière biocarburant pourra compter dans un avenir proche les sites de production qui fermeront.

La production de canne à sucre annonce une excellente récolte 2020-2021 ; sachant que tout ce qui n'est pas transformé en carburant le sera en sucre. C'est le Brésil qui arbitre donc les débouchés de la canne à sucre. Il nous faut des mesures de soutien pour l'éthanol, jouer sur les taxes, les aides au stockage, l'augmentation du taux d'incorporation.

Un dernier mot ?

Il est vraiment dommage que le prix du pétrole puisse impacter à ce point le prix des productions agricoles. L'exception agriculturelle demandée par la Coordination Rurale serait un début de solution !

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