Dans son intervention télévisée du 26 août, à la suite du G7 de Biarritz, le président de la République Emmanuel Macron a semblé montrer qu’il avait compris l’origine du principal problème de l’agriculture européenne : le déficit en protéines végétales. Ce déficit « est le fruit d’un vieil équilibre qui a été conclu dans les années 60 entre l’Europe et les États-Unis d’Amérique » a-t-il affirmé. Il a ensuite appelé à mettre en œuvre une « souveraineté protéique de l’Europe ».

Pour France Grandes Cultures, il s’agit d’une évolution très positive car le discours officiel français n’évoquait jusqu’à maintenant que la « stratégie protéique nationale ». Le lien avec les anciens accords commerciaux n’était par ailleurs jamais mentionné.

Mais FGC rappelle que pour acheter moins de soja au Brésil, il va aujourd’hui falloir commencer par renégocier les accords commerciaux et engager un réel bras de fer, notamment avec Donald Trump qui a obtenu de l’Union européenne qu’elle favorise le soja étasunien dans ses achats. Emmanuel Macron y est-il réellement disposé ?

Le soja, responsable du faible revenu des agriculteurs

En un demi-siècle, les importations de soja ont déstructuré toute l’agriculture européenne et déformé nos balances commerciales. Aujourd’hui, l’Union européenne importe 36 millions de tonnes de soja (graines et tourteaux). Pourquoi ? Parce qu'elle ne produit que le quart de ses besoins. Les surfaces qui devraient être cultivées en luzerne, soja et autres espèces de légumineuses, sont par défaut cultivées en blé. Résultat, l’Europe est devenue artificiellement excédentaire en céréales et exporte 24 millions de tonnes de blé au cours mondial.

Le cours du blé est la valeur étalon sur laquelle se calent les prix de toutes les autres productions agricoles. Des légumes aux viandes, les importations de soja sont par conséquent bien la cause du faible revenu des agriculteurs européens. 60 millions de tonnes de « commodités » agricoles traversent donc inutilement les océans dans des navires fonctionnant au fuel lourd. La relocalisation de ces productions serait également excellente pour la biodiversité et la rotation des cultures. Elle permettrait par ailleurs de réduire les utilisations d’engrais et de produits de phytosanitaires.

Soja brésilien, étasunien... De quel soja parlons-nous ?

« Si le diagnostic est établi, le problème n’est pas simple à résoudre. Le soja que nous importons ne provient pas que d’Amérique du Sud mais également des États-Unis, explique Nicolas Jaquet, président de France Grandes Cultures. Suite aux problèmes commerciaux avec la Chine, le président Donald Trump a obtenu de l’Union européenne qu’elle favorise le soja d’origine étasunienne dans ses achats ».

A sein de l’Union européenne et en France, existe aussi un lobbying très fort des géants du grain. Ils profitent aussi de ces échanges. Y compris au sein des filières, de nombreux opérateurs se sont bien accommodés de cette déstructuration de notre agriculture. Ils opposent par conséquent une certaine résistance à les remettre en cause.

Selon, Damien Brunelle, secrétaire général de FGC, « pour réussir à développer une souveraineté protéique, il est impératif de sortir l’agriculture des accords commerciaux. C’est ce que nous appelons l’exception agriculturelle ».

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