La France est une grande puissance agricole qui importe près de 50 % des fruits et légumes frais consommés par ses citoyens. La protection des producteurs et la non-vulgarisation des productions françaises permettront d’avoir une souveraineté alimentaire, c’est pour cela qu’il faut agir en priorité sur ces vecteurs-là et ce maillon-là.

Le Gouvernement va proposer un plan de souveraineté pour les fruits et légumes frais dans les semaines à venir avec des objectifs pour 2030. Malheureusement, cela est beaucoup trop tard, il faut définir des objectifs dans le temps et l’instantanéité.

La Coordination Rurale (CR) défend un modèle agricole basé sur une véritable souveraineté alimentaire éthique et responsable.
Éthique, car elle respecte les agriculteurs des autres pays qui ne seraient pas aussi compétitifs.
Responsable, car elle protège les agriculteurs français d’une concurrence déloyale !
C’est pourquoi, depuis sa création, notre syndicat se bat notamment pour l’instauration d’une exception agriculturelle.

Alors que les consommateurs disent vouloir acheter plus de produits locaux, la situation agricole française est préoccupante, voire alarmante. D’une part, le nombre d’agriculteurs diminue ainsi que leurs revenus, et d’autre part, les importations toxiques augmentent ! Il est urgent d’agir !

1/ Le renouvellement des agriculteurs

Depuis plusieurs années, le nombre d’exploitants agricoles est en diminution constante, conséquence d’une baisse continue du revenu agricole rendant le métier peu attractif pour les nouvelles générations.
La transmission ne sera favorisée que par la mise en place d’une politique incitative et l’instauration de mesures visant à orienter ces transmissions vers l’installation plutôt que l’agrandissement : revalorisations des retraites, fonds d’avance des fermages… De plus, une politique volontariste et donc plus humaine, par la mise en œuvre d’outils et de procédures d’accompagnement plutôt que de contraintes, est aussi un moyen de favoriser la transmission.

2/ Des contraintes à éviter, ou du moins, à limiter

– Distorsions sociales
La main-d’œuvre et les installations sont des sujets phares pour développer l’emploi et tendre vers une véritable souveraineté alimentaire. La différence de coûts de main-d’œuvre entre la France et les autres États membres représente un véritable frein pour la production française, sans oublier les avantages sociaux et la valeur morale du travail en perdition dans notre société.

Plan souveraineté fruits et légumes

– Distorsions en matière de réglementation encadrant les produits phytopharmaceutiques (PPP)
Face à l’accroissement des infestations de maladies et de ravageurs, le Gouvernement répond de façon inattendue en interdisant l’utilisation de nombreux PPP. La CR, qui soutient tout ce qui peut améliorer l’indépendance des agriculteurs, ne s’oppose pas à la baisse de la consommation des PPP, mais exige au préalable la réalisation d’études d’impacts économiques et alerte sur la nécessité de ne pas laisser les agriculteurs seuls face à des impasses techniques.

Par ailleurs, la fixation des Limites maximales de résidus (LMR) sur les produits importés est en soi une distorsion de concurrence puisque ces LMR donnent l’autorisation de faire entrer des produits pour certains interdits au sein de l’Union européenne (UE) sous la forme de résidus dans nos aliments !
À noter que le Code rural interdit bien les importations des denrées alimentaires « pour lesquelles il a été fait usage » de PPP interdits en UE. Mais cet article étant français, il n’est pas appliqué…
La France impose à ses agriculteurs des normes franco-françaises qui vont bien au-delà des normes imposées par l’Europe.

– Les labels et HVE
Pour la CR, toute démarche de certification doit rester volontaire et doit avoir une plus-value dans le prix de vente dans la mesure où cela entraîne un surcoût. Mais des associations environnementalistes, avec la complicité de certaines organisations agricoles, militent pour une obligation de certification, conditionnant le versement de certaines aides ou autres. Devenant de fait obligatoire pour les adhérents de certaines coopératives, elle aggrave le déséquilibre, déjà important et difficile à assumer, existant dans leurs relations.
Dans le cadre de démarches collectives, la possibilité pour des organisations professionnelles agricoles de contrôler/auditer en interne les agriculteurs semble de nature à induire des inégalités de traitement, par manque d’objectivité, et à susciter l’appât du gain.

– L’assurance-récolte
La réforme de la gestion des risques, entrant en vigueur le 1er janvier 2023, généralise le recours à l’assurance-récolte et donc la fin du régime des calamités agricoles. C’est un désengagement de l’État qui impose par défaut de souscrire à l’assurance-récolte. Les agriculteurs doivent rester libres de s’assurer ou non. Il est indispensable de promouvoir et soutenir financièrement les moyens de prévention et de protection pour garantir les récoltes et nourrir la population. Des prix rémunérateurs constituent la meilleure protection contre les aléas climatiques en permettant de constituer des réserves.

3/ Comment améliorer les ressources ?

– Énergétique
La hausse récente du coût de l’énergie impacte fortement les agriculteurs et notamment les producteurs de fruits et légumes. Certains cherchent des alternatives pour faire des économies en retardant leurs plantations, mais cela ne sera pas sans conséquence sur le marché au printemps et à l’été.

– Humaines
La difficulté grandissante de trouver de la main-d’œuvre est de plus en plus pesante et mortifère sur les exploitations agricoles.

– Intrants : harmonisation des normes au sein de l’Europe
La CR demande une harmonisation des homologations au niveau communautaire pour les autorisations de mise sur le marché (AMM). Elle demande également l’interdiction des importations de denrées alimentaires pour lesquelles il a été fait usage de PPP ou de médicaments vétérinaires interdits en UE et que la preuve soit apportée par le pays exportateur.

– Normes environnementales
Il est du devoir du Gouvernement de protéger l’agriculture et d’éviter les distorsions de concurrence en :
– refusant toutes importations ne respectant pas strictement nos normes ;
– apposant clairement la provenance des produits bruts ou transformés ;
– limitant l’importation de produits hors saison par une taxe sanctionnant le bilan carbone.

4/ Quelles pourraient être les solutions ? Les propositions de la Coordination Rurale

– Développer l’emploi avec la TVA sociale. Pour cela, il faut faire porter sur les importations le coût de notre protection sociale.

– Protéger notre capital productif donnant une rémunération à nos producteurs en valorisant la profession.

– Communiquer sur le métier d’agriculteur pour éviter une incompréhension et un mépris des citoyens.

– Protéger les cultures en mettant les moyens sur la prévention afin de s’adapter aux changements climatiques.

– Favoriser les installations en rendant le métier attractif.

– Intervenir sur les charges et la fiscalité.

– Favoriser la saisonnalité et accentuer sur l’origine France aux consommateurs.

– Générer des productions énergétiques.
La production de fruits et légumes peut aussi conduire à la production de biomasse ainsi qu’à de la cogénération notamment pour les serristes. De plus, il serait intéressant d’accentuer le développement de panneaux photovoltaïques sous forme de pergola et sur les serres.

En conclusion

La France, par les errements successifs de son exécutif et de certaines organisations syndicales, connaît une perte de sa souveraineté alimentaire qui doit alerter toute la population.
Il est urgent de mettre un terme aux injonctions contradictoires (politique commerciale, OMC, Pacte Vert, sur-réglementation…) qui engendrent des impasses croissantes, et de faire émerger une ambition collective pour l’agriculture française. Le courage politique et gouvernemental se fera sur des choix et des opportunités en donnant des moyens financiers, humains et législatifs pour redonner une souveraineté nationale.
La France ne serait pas ce qu’elle est sans ses paysans. L’agriculture est le secteur stratégique qui doit devenir la préoccupation politique pour regagner en autonomie alimentaire.
Les agriculteurs sont prêts à relever le défi de la souveraineté si on leur donne des moyens et non pas des contraintes !

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