Pays le plus peuplé au monde devant l’Inde, la Chine devrait atteindre son pic de population en 2030, d’où son principal objectif : disposer d’une agriculture capable de nourrir sa population croissante. Pour cela, les Chinois viennent, entre autres, se fournir en France, et investissent dans nos laiteries.

Des débuts flamboyants

Depuis quelques années, la Chine s’est lancée à la conquête de la production laitière française. Objectif : se fournir en lait de qualité, principalement pour les nourrissons. L'usine des Maîtres laitiers du Cotentin (MLC), située dans le département de la Manche, a ainsi été inaugurée en juin 2017. Elle représente pour l’entreprise 114 millions d’euros d’investissement dans le cadre d'un contrat de 11 ans avec le chinois Synutra. Elle porte sur la production de 690 millions de briquettes de 20 cl de lait infantile par an.

De la poudre aux yeux

Aujourd’hui, en dépit des fausses promesses, le marché chinois du lait n'a pas encore offert les clés du paradis. Bien au contraire... Le groupe Synutra est très présent sur le territoire français. Il s’est associé en 2012 à la coopérative Sodiaal et a construit dans le Finistère une usine de production de poudre de lait. Quelques années plus tard, ce sera à Méautis dans la Manche. Mais voilà, ce n’est plus en « grande pompe » que les usines de ces investisseurs chinois sont visitées, mais en catimini par les huissiers.

Conséquence : les Maîtres laitiers du Cotentin (MLC) ont suspendu, depuis le 1er août, leur production de lait à destination de la Chine. Il faut savoir que les MLC exportent en Chine 40 % de leur production de lait. Même si le directeur ne semble pas alarmiste, l’usine tourne au ralenti. La collecte de lait n’est pas remise en cause puisque le lait devrait être orienté vers d’autres fabrications.

L’effet vache du marché

Le lait est un produit qui en dit long sur la mondialisation et sur les rouages du marché alimentaire. « Les vaches que l'on traie dans nos fermes françaises mangent du soja américain pour nourrir les enfants de Chine » indique Yohann Quesnel, président de la CR50. « Mais dans cette mondialisation, il y a une victime : le producteur ! Le producteur respecte la qualité exigée et les volumes imposés par les laiteries. Et pourtant, la rentabilité n’y est pas... Nous sommes noyés dans la tempête d’une mondialisation qui ne fait qu’appauvrir une majorité pour remplir les poches d’une microscopique minorité ».

Une déception à la hauteur des espoirs

« On se croirait dans la fable de la laitière et le pot au lait de Jean de La Fontaine. Perrette s’en va au marché pour vendre son lait. En marchant, elle rêve de faire fructifier son capital : le lait achètera les œufs, qui deviendront poulets. Ces poulets serviront à acheter un porc. Ce porc sera gavé pour l'échanger contre une vache et un veau. Mais le lait tombe et Perrette perd tout, situation cruelle et comparable à ce que la Manche vit, que ce soit avec les abattoirs AIM et maintenant les MLC. Nous avions de l'espoir mais, à force de mettre à mal l'agriculture, c'est en Chine qu'il faudra aller chercher notre lait. Ou ailleurs. Si nous continuons sur cette voie, le consommateur doit prendre conscience qu'il pourra "s'assoir" sur la qualité alimentaire qu'il apprécie tant ».

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