Dans un article paru dans L’Agriculteur provençal le 4 août dernier, Jean-Pierre Grosso, élu responsable des dégâts de gibier à la chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône, a indiqué que davantage de sangliers devraient être abattus pour limiter ainsi les dégâts. Il faut savoir que M. Grosso fait partie du bureau d’une société de chasse... qui n’ouvre que le dimanche. Son discours est par conséquent marqué par une certaine incohérence. S’il ne se prononçait ainsi qu’à titre personnel, nous n’aurions rien à redire. Or, les propos de M. Grosso, du fait de ses responsabilités, engagent également la chambre d’agriculture. Représentée par Bernard Derbez, Tristan Arlaud et Jean-Dominique Dedominici, la Coordination Rurale des Bouches-du-Rhône (CR13) a abordé toutes ces incohérences lors d’une rencontre avec Nicolas Chomard, chef du service Mer, eau et environnement à la DDTM le 13 octobre dernier.

 

Moins de sangliers abattus ; davantage de dégâts de gibier constatés !

En mai-juin, pendant trois semaines, les lieutenants de louveterie étaient présents toutes les nuits. Cependant, à partir du moment où les agriculteurs avaient besoin de leur présence, il n’y avait plus personne. Des rumeurs persistantes indiquent même que des menaces auraient été lancées par des chasseurs contre les louvetiers pour que très peu de sangliers soient abattus aux abords des cultures… La raison ? Il y a un commerce illégal autour de la viande de sanglier et, la demande étant faible en été, certaines sociétés de chasse estiment qu’il n’y a aucun intérêt à organiser des battues. Un véritable business s’organise autour de la viande de sanglier et un élevage extensif est mis en place. Le nourrissage des sangliers est interdit mais certaines sociétés de chasse le pratique quand même. La DDTM est prête à intervenir sur ces problèmes afin de les régler au plus vite.

 

Des dégâts sous-estimés

Lors de la venue d’un expert, les pertes sur les cultures sont sous-estimées dans la plupart des cas (-30 % environ). Cette sous-estimation entraîne l’obtention de données erronées sur l’ensemble du département et donc la mise en place de mesures qui ne correspondent pas à la réalité du terrain. Il faudrait que pour chaque expertise, des vidéos et/ou photos soient faites et elles puissent servir pour comparaison avec le papier de l’expert en cas de litige. Pour diminuer les dégâts, la DDTM soutient la mise en place de cages pièges et elle s’engage à signer autant d’arrêtés que nécessaire. Il s’avère que ce dispositif est efficace pour réduire les populations de sanglier, ce que soutient la CR13. Pour la CR13, il faudrait également délimiter des zones où les battues protégeront les cultures. De plus, il faut être très réactif et être présent lorsqu’on sait que les sangliers vont être présents (les jours d’arrosage par exemple). Les tirs doivent également être autorisés la nuit car en journée, les sangliers sont cachés. Ne rien faire, c’est prendre le risque de pousser certaines personnes à se mettre dans l’illégalité.

 

Il faut rétablir le droit d’affût

Jusqu’en 1969, les agriculteurs pouvaient défendre librement leurs cultures contre les sangliers. C’est ce qu’on appelait « le droit d’affût », qui était inscrit dans le Code rural. De jour comme de nuit, tout au long de l’année, lorsqu’un sanglier était sur le point de commettre des dégâts, les agriculteurs pouvaient tirer en toute légalité et ainsi protéger leurs cultures. Le droit d’affût a été supprimé par l’article 14 de la Loi de finances de 1969 et un fonds dédié a alors été mis en place pour indemniser les pertes aux agriculteurs. A partir de là, les populations de sangliers ont commencé à augmenter et l’élevage et la commercialisation de sangliers ont vu le jour. 40 ans après, les sangliers sont très, et même trop, nombreux. Les chasseurs se font de plus en plus rares et les dégâts constatés sur les cultures sont chaque année plus considérables ! Dans ces cas-là, pourquoi ne pas rendre aux agriculteurs le droit d’affût ? La vocation des agriculteurs est de nourrir les hommes. Pas les sangliers…

La CR13 a également remis un courrier à Nicolas Chomard, contenant certaines constatations et des propositions pour limiter les dégâts aux cultures :

Monsieur,

Nous vous remettons ce jour, 13 octobre 2017, nos observations et nos propositions concernant la lutte contre les dégâts de gibier dans notre département.

En consultant le site internet de la fédération de chasse des Bouches-du-Rhône, nous concluons que:

  • Le nombre des chasseurs est en décroissance constante depuis 20 ans
  • L'âge moyen des chasseurs est de plus en plus vieillissant
  • Les nuisibles comme le sanglier prolifèrent et nous constatons avec sidération que la fédération de chasse lâche des chevreuils afin que ceux-ci se répandent dans tout le département
  • Le nombre des dégâts ainsi que les indemnisations sont en forte hausse.

Notre syndicat ne peut accepter la solution de la Chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône préconisée par son élu Jean Pierre Grosso qui se résume à : LES CHASSEURS DOIVENT PLUS CHASSER. Vous noterez vous-même l'incohérence entre celle-ci et les 4 points précédents. Les chasseurs étant moins nombreux, vieillissants, incapables d'endiguer la population de sangliers et espérant faire proliférer la population de chevreuils. Lesquels accentueront des dégâts dors et déjà beaucoup trop importants. Où est la logique?

Aussi,

  • Les clôtures électriques sont des protections dérisoires, coûteuses et très contraignantes pour les agriculteurs qui doivent sans cesse désherber à proximité. D’autant plus qu’en agriculture biologique, le désherbage pour les clôtures à sangliers se fait manuellement et qu’il faut le refaire tous les 15 jours à 3 semaines.
  • Les altercations sont monnaie courante entre les lieutenants de louveterie et les sociétés de chasses. Ces dernières ne désirant pas voir le gibier abattu en trop grand nombre sur leurs territoires
 

Ainsi, la Coordination Rurale des Bouches-du-Rhône préconise :

  • La nomination de nouveaux lieutenants de louveterie indépendants des sociétés de chasse
  • La possibilité pour les exploitants agricoles d'organiser eux même la défense de leurs cultures sans contrainte de jours et d'horaires de chasse. Ils sont les seuls concernés par cette problématique. Les pertes réelles sont énormes pour les agriculteurs (temps perdu, coût des protections, stress, pertes sèches de revenus) .
  Veuillez agréer Monsieur, nos chaleureuses salutations.

Les administrateurs de la CR 13

 

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