Suite au courrier que la CR58 a envoyé à tous les candidats aux élections législatives 2017 sur les circonscriptions de la Nièvre (voir l’article), Mme Monique Choquel et M. François Diot, candidats du Parti communiste français, ont répondu.

fff

"Nous tenons à vous faire part des grandes orientations politiques que nous défendons pour l’avenir de l’agriculture nivernaise et française, et auxquelles nous avons d’ailleurs consacré l’un des quatre pavés principaux dans notre 4-pages de campagne.

A notre sens, la « succession de crises » agricoles (terme généralement utilisé, à tort), n’a rien d’une juxtaposition de crises indépendantes les unes des autres : c’est tout notre système agricole qui, globalement, est en crise depuis des années, avec des agriculteurs épuisés et qui n’arrivent plus à vivre de leur métier ; avec des problèmes de transmission devenant ingérables (et les difficultés d’installation qui vont avec, pour les jeunes) ; avec une perte générale de « sens » pour l’ensemble de la profession, liée à la fois à une sur-lourdeur administrative incontestable, au mépris affiché par la grande distribution pour la rémunération du travail paysan, et à une opinion publique souvent déconnectée des réalités quotidiennes du monde agricole.

C’est, pour nous, le résultat de politiques (nationales et européennes) faisant la part belle à une agriculture à vocation majoritairement exportatrice, au détriment d’une agriculture de proximité, ancrée dans les territoires ; et cela, malgré les grands mots sur « l’agro-écologie » et les « circuits courts ».

C’est aussi le résultat des prix en permanence tirés vers le bas, de la suppression des mécanismes de régulation comme les quotas laitiers, des pleins-pouvoirs laissés à la grande distribution (notamment par la Loi de Modernisation Economique votée sous N. Sarkozy), de l’agro-business (terme galvaudé… mais correspondant à une réalité), de l’agrandissement sans fin au détriment des structures familiales…

En un mot, c’est le résultat du capitalisme sauvage, des logiques libérales poussées à l’extrême et de la « loi du marché » qui considèrent les produits agricoles comme des marchandises comme les autres, et la vie dans nos territoires comme des préoccupations subalternes.

Face à cela, nous défendons des orientations politiques fortes, tant au niveau national qu’européen et mondial :

Nous proposons d’adopter d’urgence le projet de loi d’André CHASSAIGNE (député PCF du Puy-de-Dôme) visant à encadrer les marges de la Grande Distribution et à garantir le revenu des agriculteurs. A plusieurs reprises ces dernières années, les députés communistes ont déposé des projets de loi à ce sujet (le dernier en date, le 26 mai 2016 : PL n° 3681 visant à garantir le revenu des agriculteurs). L’instauration, année par année et production par production, de prix plancher (définis par rapport aux coûts de production) et de coefficients multiplicateurs pour lier le prix de vente au consommateur et le prix d’achat au producteur, sont de nature à faire cesser le scandale du « pot de terre contre le pot de fer » quand il s’agit des relations entre producteurs et distributeurs. Pour cela, des conférences annuelles associant les représentants de la profession agricole, ceux de la grande distribution et les pouvoirs publics doivent se réunir et être légitimées par la loi.

► Nous proposons de passer des paroles aux actes concernant les circuits courts, la conversion en agriculture biologique (le scandaleux « retard » dans le versement des aides à la conversion illustre le double discours en la matière) et les plate-formes locales d’approvisionnement pour la restauration collective. Pour cela, il faut structurer et sécuriser les filières d’approvisionnement, et modifier le Code des Marchés Publics pour que des clauses favorisant l’approvisionnement local puissent se substituer aux règles du « moins-disant » et de la « concurrence libre et non faussée ».

► Nous proposons, plus particulièrement pour l’agriculture nivernaise, de construire de vraies filières pour valoriser localement nos productions agricoles, dont la valeur ajoutée reste trop souvent produite ailleurs (engraissement de nos broutards en Italie par ex ; le même problème se pose pour nos productions forestières, dont les industries de seconde transformation du bois sont installées hors-département, voire hors du pays) ; Gérard Le Puill (journaliste à La Terre et à l’Humanité) évoquait une « agriculture de matières premières » à propos de l’agriculture nivernaise, lorsque nous l’avons invité à une conférence-débat à Corbigny pour présenter son dernier livre. La formule est cruelle, et sans doute exagérée… mais elle a du vrai.

Nous proposons d’engager des politiques agricoles qui en finissent avec la « spécialisation des exploitations » et la « spécialisation des territoires » : le modèle de polyculture-élevage, autrefois quasi-systématique et qui reste encore bien présent dans la Nièvre, est le plus « durable », tant en matière économique qu’environnementale : la spécialisation céréalière dans la Beauce et la spécialisation porcine et volaillère en Bretagne posent des problèmes aberrants, tant en termes écologiques qu’agronomiques (baisse des taux de matière organique dans la Beauce quand on se trouve en zone d’excédent structurel en Bretagne !). Sans aller si loin, la monoculture de maïs irrigué en Champagne Berrichonne (encouragée pendant des années par les pouvoirs publics) est aujourd’hui dans une impasse. De ce point de vue, le modèle agricole nivernais est encore relativement préservé, et reste un atout… mais chacun voit dans la campagne nivernaise que des évolutions sont en cours, qui ne vont selon nous pas dans le bon sens.

► Pour cela, il faut remettre en cause les orientations de la PAC qui considère les produits agricoles comme des marchandises à exporter sur le marché mondial, et devant donc être produites de la manière la plus « compétitive » possible. Si nous avons vocation à exporter nos produits agricoles, cela ne peut pas constituer l’alpha et l’oméga de la PAC. Cette guerre économique sans fin ruine par ailleurs les agricultures des pays en développement, quand le « prix mondial » met sur le même plan, par exemple, les producteurs de riz de l’Arkansas et ceux du Delta du Saloum, au Sénégal…

► Dans le même ordre d’idées, nous pensons indispensable de sortir l’agriculture de l’Organisation Mondiale du Commerce (sauf à considérer que les produits agricoles sont des marchandises comme les autres), et de lutter contre la spéculation sur les matières premières agricoles : des pratiques criminelles quand il s’agit de la souveraineté alimentaire de pays entiers, et qui sont à l’origine de famines dans les pays en voie de développement.

► Enfin, nous refusons les traités commerciaux internationaux du type TAFTA et CETA, qui visent bien souvent à tirer toutes les normes sociales, sanitaires, écologiques vers le bas… et qui font bien souvent de l’agriculture européenne une monnaie d’échange avec les autres « partenaires » commerciaux, par exemple contre l’accès aux marchés de travaux publics aux Etats-Unis concernant le TAFTA. Nous sommes, tous deux, membres fondateurs et membres actifs du Collectif STOP-TAFTA dans la Nièvre.

C’est, à notre sens, en s’attaquant à ces logiques-là que nous réglerons, dans la durée, nombre de problèmes aujourd’hui rencontrés dans nos campagnes : installation des jeunes, sécurisation du revenu agricole, lutte contre l’isolement et la désertification rurale, niveau des retraites agricoles (à ce sujet, c’est André Chassaigne - encore lui ! - qui a fait voter à l’unanimité à l’Assemblée Nationale, le 2 février dernier, une proposition de loi des députés communistes visant à revaloriser le niveau des retraites agricoles à 85% du SMIC net, contre 75% prévus par le droit actuel… mesure financée par une taxe additionnelle à la taxe sur les transactions financières).

Nous savons que ces propositions font débat : elles n’ont rien de « consensuel »… et ne sont d’ailleurs pas faites pour cela ! Elles dessinent des choix de société, en cohérence avec notre vision du monde, notre conception du « bien commun » et notre sensibilité de communistes sincères."

Dans la même catégorie

Bourgogne Franche-Comté
CR 58
Bourgogne Franche-Comté
CR 71