La section Retraités de la Coordination Rurale n'a pas manqué de faire savoir au chef de l'État que son coup de force bloquant la revalorisation des retraites agricoles n'a guère été apprécié par les non-salariés agricoles (NSA). C’est pourquoi,  Jean-Paul Vuilliot (CR02) et Jean-René Gouron (CR86) ont été reçus le 16 avril dernier par Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, et Jean-Paul Delevoye, haut commissaire à la réforme des retraites.

L’entretien a porté principalement sur trois grands thèmes : les retraites agricoles, la TVA sociale et la MSA.

1/ Les retraites agricoles

La proposition de loi votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale et par la mandature précédente permettant aux non-salariés agricoles de percevoir une retraite de 85% du Smic pour une carrière complète avait suscité un grand espoir. D’autant plus que la Commission des affaires sociales du Sénat a voté cette loi le 21 février 2018 avec application immédiate. Le report de l’application à 2020 reste incompréhensible, sauf pour Jean-Paul Delevoye qui estime que le vote de la loi de fin de législature aurait pu fragiliser l’ensemble de la réforme. Pour faire clair, il est demandé aux NSA de s’armer encore de patience malgré une situation évidente d’urgence… les ministres ont affirmé qu’il fallait garder espoir de voir ces griefs tomber dans les 9 à 10 mois à venir grâce à la réforme engagée. Reste le débat parlementaire qui aura lieu le 16 mai 2018.

Les pensions de réversion

Il y a deux catégories : ceux qui perçoivent la pension de réversion sans plafond de ressources et ceux qui sont soumis au plafond de ressources.

Conséquence de ce point : le formulaire de demande de la pension de réversion.

Pour les soumis au plafond de ressources, le formulaire mentionne les revenus à déclarer qui sont pris en compte dans le calcul du plafond qui détermine le droit à la pension de réversion. Il précise d’indiquer également la valeur des biens immobiliers détenus, sans indiquer pour autant que seulement 3 % de la valeur de ces biens seront pris en compte.

Cette omission, qui présente à coup sûr un caractère dissuasif envers des demandeurs qui pensent ainsi dépasser le plafond, a été soulignée.

Le caractère de double peine a fait l’objet d’une remarque puisque les biens géniteurs de loyers sont déjà pris en compte dans le calcul du plafond et subissent comme les autres la CSG (contribution sociale généralisée) et l’IRPP (impôt sur le revenu des personnes physiques).

En conclusion, il y a pour les premiers une situation très confortable et pour les seconds une entrée de plein pied dans la paperasse, la double peine, les contestations éventuelles de valeur des biens, c'est-à-dire injustices et tracasseries administratives.

La continuité d’activité

Après une carrière complète et en ayant atteint l’âge légal de départ à la retraite artisans, commerçants, salariés de l’industrie et des services peuvent cumuler retraite et activités d’entreprise. Par contre, un agriculteur(trice) ne peut cumuler sa retraite qu’avec un emploi salarié.

2/ La TVA Sociale ou TVA Compétitivité.

Comment financer les retraites agricoles mais aussi le social en général ?

La Coordination Rurale préconise depuis de nombreuses années de financer les prestations sociales par la consommation plutôt que sur le travail et le capital.

Les opposants répètent que taxer la consommation revient à taxer les plus faibles. Il n’en est rien pour plusieurs raisons. Il n’a échappé à personne qu’il y a plusieurs taux de TVA. Il est entendu que c’est le taux le plus faible qui doit frapper les produits de première nécessité. Chacun peut comprendre que les moins nécessiteux feront des achats bien au-delà des biens de première nécessité et contribueront ainsi plus fortement au social.

La suppression de charges sociales sur les salaires compensera la TVA supplémentaire, la suppression de la part patronale donnera de la compétitivité aux entreprises.

Surtout, le supplément de TVA fera contribuer plus fortement les produits d’importation à notre couverture sociale.

En conséquence, TVA Sociale = meilleure compétitivité, meilleure balance commerciale, meilleure situation de l’emploi.

En l’état, nous allons vers l’impossibilité de financer les retraites agricoles par la MSA !

Augmenter les cotisations des actifs à parité avec la solidarité nationale est impossible, la Coordination Rurale s’y oppose parce que l’agriculture est moribonde.

Par ailleurs depuis 1946, le nombre d’agriculteurs n’a jamais augmenté, nous avons et de manière malheureusement durable un rapport actifs/retraités très défavorable. Une pyramide des âges le pointe en bas. Il y a une nécessité absolue de faire appel aux autres caisses au titre de la compensation démographique.

Pour la Coordination Rurale il est clair que la MSA ne pouvait que disparaître.

3/ Divers sujets MSA

La Coordination Rurale a fait part des inégalités de traitements existantes auprès du même régime (valeur au 1er avril 2014) Les indemnités journalières

La période de carence est de 4 jours pour les NSA alors qu’elle n’est que de 3 jours pour les salariés agricoles.

Le montant de l’indemnité journalière est de 21,04 € par jour pour les non-salariés agricoles, alors qu’il est de 24,09 € par jour dans le cas d’un Smic pour les salariés agricoles. C’est évidemment supérieur si le salaire est supérieur au Smic.

Force est de constater que les non-salariés agricoles restent au niveau du Smic.

Les pensions d’invalidité

Pour un non-salarié agricole, la pension invalidité totale annuelle est de 4 356,37 €.

Pour un salarié agricole, la pension catégorie 2 annuelle (soit 80 % d’invalidité minimum) est de 18 744 €

La pénibilité

Pour un NSA, les événements survenus avant le 1er avril 2012 sont exclus du dispositif de retraite  pour pénibilité, pour les salariés agricoles, sont exclus les événements survenus avant le 1er juillet 1973. Soit un différentiel de 115 trimestres.

Les dispositions citées ici sont particulièrement discriminantes pour les NSA dans un contexte économique catastrophique. Les non-salariés agricoles, de façon directe ou par le biais de leurs organisations professionnelles agricoles, financent des services supplémentaires dont ils sont exclus pour une importante partie.

L’assiette minimum avec revenu zéro ou négatif

Pour le non-salarié agricole l’assiette minimum est de :

- 600 Smic pour l’AVA (assurance vieillesse agricole)

- 800 Smic pour l’AVI (assurance vieillesse individuelle)

- 1 820 Smic pour la RCO (retraite complémentaire obligatoire)

Que peut-on faire de mieux pour achever les plus fragiles ?

Au sein du même régime des taux de cotisations inéquitables

Soulignons que le taux des cotisations individuelles des exploitants non-salariés est près de 10 points supérieur à celui de la part salariale des cotisations des salariés.

Sources : Barème des cotisations et contributions sociales des non-salariés agricoles pour l'année 2017 Accident du travail (AT) Taux et valeurs applicables pour 2018

N’oublions pas que la part patronale de 40,45 % est payée par l’employeur qui a majoritairement le statut de non-salarié agricole. Au final, ils assument près de 80 % des cotisations perçues par la MSA.

Des anomalies criantes à la MSA             Les frais des régimes sociaux liés aux administrateurs. Chiffres officiels communiqués par la Direction de la sécurité sociale et le rapport Perruchot :

Pour 1 000 affiliés, les frais des régimes sociaux liés aux administrateurs sont de 4 620,17 € à la MSA alors qu’ils sont de 1 011,50 € pour le Régime Général et de 583,91 € pour le RSI.

            Une politique salariale avantageuse

Dans un rapport de septembre 2014, la Cour des comptes fait état d’une « politique salariale avantageuse » et indique notamment que « la rémunération principale brute annuelle des agents de direction s’élève en moyenne à 95 000 € (96 679 € au régime général, 89 517 € au RSI et 100 956 € à la MSA).

En plus de ses coûts de fonctionnement excessifs, le système spécifique de protection sociale et de retraite agricole présente des injustices qui sont certainement ignorées par les agriculteurs et la société dans son ensemble, à en juger par la pérennité du système.

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