L'apprentissage a donné lieu à de nombreux échanges entre certains partenaires sociaux. Malgré nos demandes nous n’avons pas été conviés aux débats. La réforme qui s’annonce est plutôt positive. D’ailleurs certaines mesures qui pourraient bientôt s’appliquer à l’ensemble du pays sont la copie conforme des pratiques de l’enseignement agricole (participation des professionnels aux référentiels de diplômes).

La réussite de cette réforme suppose l’engagement de tous les acteurs et notamment des agriculteurs. Or, depuis plusieurs années les exploitants croulent sous les contraintes et les incertitudes dès qu’il s’agit d’apprentissage. S’il était utile de redonner un second souffle au cadre général, les mesures envisagées ne permettront pas de restituer la confiance nécessaire. Il est urgent d’examiner les freins quotidiens qui découragent les professionnels.

Modifier le cadre général est une chose. Il nous paraît autrement plus utile de ne pas accumuler les contraintes qui éloignent les agriculteurs de la transmission de leur métier.

Nos constats

La sécurité

La sécurité des jeunes est notre priorité, il n’empêche qu’en la matière le bon sens a quitté les débats. Les employeurs sont considérés comme coupables avant tout. Dans un arrêt de Cassation de 2016 un employeur est rendu responsable d’une faute commise par un CFPPA. Nous constatons également l’absence de prise en compte des techniques visant à réduire l’accidentologie. Enfin, l’évolution permanente et anarchique des normes sur les matériels dangereux et l’absence d’informations sur ces sujets conduisent à la méfiance. Au final, seules les interdictions fleurissent : interdiction d’utiliser, de faire etc. Comme ces interdictions touchent tous les acteurs de la filière, l’apprentissage du geste n’existe plus.

Le droit social

Là encore les interdictions l’emportent sur la transmission des savoirs. Un exemple simple : les vêlages de nuit (la majorité) sont interdits aux apprentis mineurs. Il existe pourtant des dérogations dans certaines branches (boulangerie) mais l’agriculture semble ne pas devoir disposer de tels privilèges.

Le coût

Le contexte économique agricole ne peut que limiter la signature de contrats. Une simulation du ministère du Travail permet d’évaluer à 13 200 € la rémunération sur deux années d’un jeune de moins de 21 ans, et à 17 700 € celle d’un jeune de plus de 21 ans. En tenant compte du temps d’enseignement et des congés c’est l’équivalent du SMIC. Nous constatons également des ruptures de contrats d’apprentissage entre deux années scolaires, qui viennent « alourdir » le coût horaire. D’autres ruptures sont fréquemment constatées dès l’obtention du diplôme alors même que le contrat d’apprentissage n’est pas arrivé à son terme. Cette possibilité est en contradiction avec l’exigence formulée aux professionnels de s’engager sur 24 mois. De telles pratiques ne font que renforcer le doute des professionnels de s’engager dans l’apprentissage. Enfin, force est de constater que les aides sont partielles et créent plus de distorsions que de solutions.

Nos propositions

• Obligation pour les centres de formation de diffuser auprès des futurs apprentis et éventuellement auprès de leur famille une documentation (élaborée avec des professionnels de la filière) relatant la réalité et les opportunités des métiers visés.

• Permettre aux CFA d’estimer la réalité et la qualité de la transmission des apprentissages délivrés par les professionnels. L’estimation doit permettre d’améliorer la transmission des savoirs en quantifiant précisément les potentiels de l’apprenti par rapport aux exigences de la formation. Elle permet également aux centres comme aux maîtres d’apprentissage de questionner leurs propres compétences. L’implication de tous les acteurs de l’apprentissage est essentielle au bon déroulé de cette tâche.

• Revoir le code du travail afin d’annuler les effets de l’arrêt de cassation du 11 février 2016, et ainsi prévenir la désaffection massive des professionnels.

• Trouver des dispositions compatibles aux deux objectifs, que sont l’acquisition de compétences et le respect de l’intégrité des jeunes en formation, y compris par une réécriture des réglementations actuelles

• Prendre en compte, après examen par les commissions ad hoc, les aménagements réalisés par l’employeur afin d’assurer la sécurité des apprentis.

• Élaborer des dérogations (notamment pour le travail de nuit) permettant à tous les apprentis de participer au moins une fois aux actes essentiels de leur futur métier.

• Instaurer 5 jours de révision obligatoires (non consécutifs) pour tous les CFA. Le statut de jours de congés reste inchangé.

• Définir le coût réel de l’apprentissage pour les exploitations agricoles, afin d’aboutir à une charge financière compatible avec la situation économique actuelle des agriculteurs.

• Verser au maître d’apprentissage un dédommagement forfaitaire en cas de rupture anticipée du contrat du fait de l’apprenti.

• Créer une aide unique comme cela avait été envisagé. Le montant devant être fonction du niveau de qualification souhaité par l’apprenti. Nous sommes opposés à l’existence d’un lien entre le montant des aides et la taille de l’entreprise. Cette mesure n’a aucun sens pour le secteur agricole. Pour le cas où l’aide unique serait insuffisante pour couvrir l’ensemble des coûts générés nous proposons une aide complémentaire dont le montant serait calculé par filières agricoles. Enfin, en cas de rupture anticipée à l’initiative de l’apprenti, nous demandons le versement d’une compensation forfaitaire.

• Imposer la transparence pour tous les organismes impliqués dans le prélèvement des taxes et le versement des aides dont la publication annuelle des comptes détaillés.

• Affecter de la taxe d’apprentissage à l’apprentissage (enfin !).

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