Lettre d’information CR44

Agriculteurs d'aujourd'hui, qu'allons nous devenir demain après toutes les désillusions de ces dernières années et devant tant d'incertitudes ?
Certes cela va mieux pour les céréaliers, mais quelle galère pour d'autres (viande bovine, porc, lait, fruits et légumes...) ! Pour la viticulture ça ne s'améliore pas non plus.

Nous travaillons toujours autant, nous produisons plus, tout en étant moitié moins nombreux qu'il y a 20 ans. De 650 000 exploitations en 1990, nous sommes descendus à 310 000 en 2010. Nos surfaces ont doublé voire triplé et pourtant, nous n'arrivons plus à vivre de notre travail. 70h/semaine pour certains, se retrouver au RSA, et finir avec les retraites les plus basses de la société… Comment s'étonner, dans ces conditions, que des collègues enfoncés dans les difficultés financières et le désarroi n'ont pas vu d'autre solution que d'en finir avec la vie ? Ne les oublions pas et ayons une pensée pour leur famille.

Ce mal qui ronge est bien dû aux méfaits de la mauvaise politique agricole. A partir de 1958, les prix agricoles étaient indexés sur ceux des produits industriels et suivaient l'inflation. L'agriculture était alors prospère, les progrès de la mécanisation et les investissements créaient de nombreux emplois dans l'industrie grâce à la main d'oeuvre issue de la campagne.

Or depuis 1992, le subventionnement de l'agriculture décidé par l'Union Européenne a donné un sérieux coût d'arrêt. C'est une erreur fatale et l'argent des contribuables est gaspillé : sur 5 euros pris dans leur poche, 1 euro seulement revient dans celles des agriculteurs.
De plus, nos efforts sur la qualité, le sanitaire, la traçabilité, etc, ne nous rapportent pas. Les plus-values générées sont récupérées par les IAA et les GMS qui se préoccupent plus d'accroître les hauts salaires de leurs dirigeants que de partager les marges avec ceux qui les méritent. Les coûteuses mises aux normes deviennent des charges supplémentaires que nous ne pouvons pas répercuter sur nos prix de vente.

La PAC est aussi grandement responsable de la pénurie des matières premières comme le blé et nous sommes toujours dépendants en protéagineux à 75 %. Tout ceci entraîne de graves déséquilibres et fait flamber les prix. Les marchés financiers, via la spéculation, déclenchent les émeutes de la faim dans les pays les plus pauvres et menacent la paix. N'oublions pas que dans le monde 25 000 personnes meurent de faim chaque jour et que ce sont en premier des paysans. La dérégulation et le marché mondial ce n'est pas tenable !

Cela fait trop longtemps que ça dure et rien ne change !

En France, notre Ministre de l'Agriculture a bien tenté d'enrayer le processus en remettant l'agriculture et l'alimentaire au 1er plan. Malheureusement après avoir fait voter la LMA avec comme point d'orgue la contractualisation, ce mot magique, présenté comme un remède à la volatilité des prix et à la chute des revenus, nous restons plus que septiques. C'est un leurre ! Les seuls qui s'en réjouissent, ce sont les IAA et les GMS qui seront assurés d'être approvisionnés mais qui ne nous paieront pas mieux. Pour eux, nous ne sommes pas assez compétitifs et nous devons encore baisser nos coûts de production. Nos charges sont franco-françaises et les plus fortes d'Europe. Les distorsions de concurrence sur le coût salarial, les différences en matière de fiscalité, notamment avec nos voisins Allemands ou Espagnols sont déloyales et par dessus le marché nous devrions vendre au cours mondial ! Ce qu'il nous faut, c'est des prix équitables qui prennent en compte nos coûts de production. Les aides et les subventions, on n'en veut pas !

Les consommateurs doivent accepter de payer l'alimentation à sa juste valeur. Dans les années 50, ils y consacraient 50 % de leur budget et aujourd'hui seulement 14 %. Par contre, quand l'électricité, l'essence, le gaz ou la téléphonie mobile augmentent, ça bronche un peu mais au final tout le monde paie.

Alors nous devons réagir et garder la tête haute, car l'arme alimentaire c'est nous qui la détenons. Nous ne voulons pas être pieds et mains liées aux coop et aux industriels. C'est à nous de nous organiser sous de nouvelles formes à l'exemple de l'office du lait qui est en préparation et dont nous parlerons avec nos intervenants de l'OPL ( la section laitière de la CR) cet après-midi. Reprendre la commercialisation de nos produits en main, c'est possible pour toutes les productions. Il faut le vouloir et être unis face aux acheteurs.

Quant à nos élus politiques au pouvoir, qu'ils prennent leurs responsabilités ! L'aménagement et l'équilibre du territoire ne se feront pas sans les agriculteurs. La croissance et la richesse de nos pays se feront par une véritable démocratie économique et solidaire. Tout d'abord sortir l'agriculture de l'OMC, réguler les volumes de production, remettre en place la préférence communautaire, harmoniser les charges sociales et fiscales entre les pays de l'UE et taxer fortement tous les produits importés qui ne répondent pas aux mêmes exigences environnementales que les nôtres.

Il est aussi de leur devoir de légiférer pour empêcher la spéculation financière sur l'alimentaire. En clair la valeur du travail doit primer sur le pouvoir financier. Pour nous, c'est tout l'enjeu des prochaines négociations sur la PAC 2013.

Une autre échéance déterminante nous attend, celle des élections aux Chambres d'agriculture de 2013. La Coordination Rurale sera au rendez-vous. Nous sommes désormais présents dans 90 départements (75 en 2007) et bien organisés.

Rappelons que La CR est le seul syndicat libre et indépendant de toute structure politique et économique. Nous sommes des agriculteurs responsables et quelques soient les productions nous nous battons ensemble et dans le même sens pour que demain les jeunes puissent reprendre le flambeau.

Je n'en dirais pas autant du syndicat qui est au pouvoir depuis des décennies et qui trahit les siens. Après tout ce qui s'est passé ces deniers temps, avec la grève du lait surtout qui va laisser des traces indélébiles dans les esprits, les évènements du Space qui ont sérieusement ébranlé ce syndicat, co-gestionnaire de cette politique agricole qui nous ruine les uns après les autres. Qui peut encore avoir confiance dans une organisation dont les leaders se remplissent les poches d'indemnités ? Ils sont devenus des paysans de bureau. Nous ne supportons plus la technocratie française et bruxelloise qui nous empoisonne. Nous devons casser ce système parce que ce n'est plus tenable.

Soyez bien conscients que pour y arriver nous n'avons qu'une seule solution, gagner ces élections.

Mais ça ne se fera pas sans vous.

 

Si vous voulez rester libre et debout, battez vous !

Tous unis et en avant la CR !

 

Catherine Laillé.

 

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