Des missions fondamentales bafouées

La Politique agricole commune vise, depuis 1962, un objectif stratégique européen. A cet effet le traité de Rome, fondateur de l’Union européenne, lui a assigné des missions précises parmi lesquelles la garantie de la sécurité des approvisionnements, la stabilisation des marchés et l’assurance d’un niveau de vie équitable à la population agricole. De fait la PAC est aussi un contrat social entre des citoyens qui bénéficiaient d’une alimentation saine, de qualité et à un prix raisonnable, et des agriculteurs vivant dignement de leur métier. Aujourd’hui le constat est accablant : le Traité de Rome est bafoué, aucune des missions de la PAC n’est plus assumée, suite à la dérive ultralibérale impulsée par la France et la Commission européenne sous l’influence des hauts responsables de la FNSEA (voir le Xème Plan publié dès 1989) et qui s’est concrétisée par la réforme de la PAC de 1992.

Dès 92 l’Europe contraint ses agriculteurs à vendre à perte sur le marché mondial

Le soutien par les prix des produits tenus à un niveau suffisant par l’application du principe de la préférence communautaire a fait place à un soutien par des aides (de moins en moins) compensatoires des cours mondiaux généralement très bas, financées par le contribuable européen et nécessitant une gestion administrative (de plus en plus) fastidieuse et coûteuse. Accompagnant l’insertion de l’agriculture dans des traités de libre-échange dévastateurs, les réformes de la PAC suivantes n’ont fait qu’en accentuer les dégâts économiques, sociaux et environnementaux.

Des conséquences dramatiques

La CR affirme que baser la stratégie agricole sur l’export sur le marché mondial est une erreur majeure, qui expose fortement les agriculteurs aux événements diplomatiques (conflits, embargos…) et à la concurrence de pays produisant à très bas coût économique (Argentine, Brésil, Nouvelle-Zélande, USA notamment). L’UE est aujourd’hui déficitaire pour nourrir sa population, en particulier à cause de son énorme et dangereux déficit en protéines végétales pour nourrir le bétail. L’UE importe 78,6 % du soja qu’elle consomme (source FranceAgriMer). Le déficit européen en protéines est de 15 millions de tonnes de graines et de 18 Mt de tourteaux de soja importés – chiffres FEDIOL – soit l’équivalent de 17 millions ha de soja importés, (source : think-tank Opera).

La position de la Coordination Rurale

La CR milite pour que la PAC retrouve ses missions premières, plus que jamais d’actualité, à travers notamment la garantie d’un niveau de vie équitable pour les agriculteurs, avec des prix rémunérateurs pour leurs produits, qui enclenchera un cercle vertueux global (développement rationnel de la production, sécurité qualitative et quantitative des approvisionnements, équilibre des territoires, préservation de l’environnement).

Pour cela, il s’agit tout d’abord de rééquilibrer la production européenne pour la satisfaction de nos besoins (notamment en développant la production des oléagineux et protéagineux et en réduisant celle de céréales) afin de maintenir un équilibre entre l’offre et la demande sur le marché européen, et donc parvenir à des prix stables et justes (reflétant les coûts de production, y compris la rémunération normale du travail de l’agriculteur). Cela suppose l’instauration de droits de douanes variables aux frontières de l’UE, pour éviter le dumping par les moins-disants mondiaux et permettre des prix agricoles européens viables, accompagnée de la création d’un Observatoire Européen des Productions et des Marchés (OEPM) qui répercuterait vers les organisations de producteurs les consignes d’ajustement de chaque grande production, pour tenir les prix dans des fourchettes prédéterminées. Si les prix baissent (ou augmentent) trop, la production sera orientée à la baisse (ou à la hausse). Il s’agit de stabiliser les marchés en gardant les signaux, mais en abandonnant l’illusion destructrice de la régulation par leur « main invisible ».
Les exportations des produits d’excellence gardent bien sûr tout leur intérêt mais le rééquilibrage des productions et leur organisation doit limiter la partie des autres produits exportables à celle dont la valorisation procure un revenu suffisant aux producteurs européens et qui ne vient pas déstabiliser les marchés des pays importateurs.
Il est en outre nécessaire d’harmoniser les normes européennes en matières sociale, fiscale et environnementale, pour supprimer les sources de concurrence déloyale au sein de l’Europe. Ce mouvement doit aller jusqu’à la mise en place d’une parfaite traçabilité jusque dans les produits transformés, permettant aux citoyens d’être acteurs de leur consommation.

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