La nouvelle Politique agricole commune entrera en vigueur en 2023 (PAC 2023-2027). Les négociations autour des règlements européens proposés par la Commission en 2018 qui auraient dû se conclure pour la PAC 2020-2027 n’ont abouti à un accord entre les institutions que fin juin. Les règlements introduisent quelques nouveautés avec toujours plus de complexité administrative :

Les Plans stratégiques nationaux (PSN). Ils devront être élaborés par chaque État membre (EM), puis approuvés par la Commission.
Pour la Coordination Rurale, c’est une sorte de renationalisation de la PAC.
Fin 2020, la Commission avait d’ailleurs formulé des recommandations à chaque EM en vue de la rédaction de leurs PSN.

Les eco-schemes, ou éco-programmes, sont un « instrument conçu pour récompenser les agriculteurs qui choisissent d’aller plus loin en matière de protection de l’environnement et d’action climatique ». Ils représenteront 25 % du 1er pilier.
Pour prétendre aux aides liées à l’éco-régime, l’agriculteur devra atteindre des objectifs selon la voie d’accès choisie.
Lors du Conseil supérieur d’orientation du 13 juillet, le ministre de l’Agriculture a présenté ses arbitrages définitifs ainsi que les montants.
Il y aura 3 voies d’accès, ainsi que 2 niveaux de montants et de paiements. Au niveau de base, le montant de l’aide est de 54 €/ha, et 76 €/ha au niveau supérieur.
Actuellement, environ 3/4 des agriculteurs peuvent accéder à l’éco-régime (niveau de base ou supérieur). 13 % pourront y accéder en modifiant 5 % de leur assolement, et 8 % n’y ont pas accès.

Une conditionnalité renforcée : l’ancienne conditionnalité (BCAE) et le verdissement (paiement vert) fusionnent dans une nouvelle conditionnalité. La fusion s’est opérée dans la logique d’une conditionnalité, c’est-à-dire d’obligations de conformité pour avoir accès à l’aide. Son périmètre est donc étendu et les mesures plus exigeantes. La conditionnalité ayant pour but de définir le niveau de base de la protection de l’environnement, elle s’appliquera à toute personne recevant des paiements de la PAC liés aux surfaces ou aux animaux. Les exemptions sont plus rares, et ne concernent plus les agriculteurs bio par exemple. Les mesures en faveur de l’environnement et du climat pèsent toujours plus sur les agriculteurs. Ces exigences seraient moins vues comme des contraintes que des opportunités de participer à la transition agroécologique si elles s’accompagnaient de mesures visant à garantir des prix rémunérateurs et une protection efficace face au dumping environnemental et social au sein et hors de l’UE.

Au niveau national, la principale nouveauté tient dans la répartition des aides couplées.
Si le taux ne change pas

– les aides couplées représentent toujours au maximum 15 % du 1er pilier

– leur répartition évolue.

Il faut voir les aides couplées comme des vases communicants : l’enveloppe est fermée, donc augmenter l’enveloppe d’une aide revient à devoir prendre sur les autres pour financer le transfert. Lors de la programmation 2015-2020, les aides couplées représentaient 15 % du 1er pilier : 2 % pour les aides protéines, et 13 % pour les autres aides couplées (végétales hors protéines et animales). Lors des arbitrages présentés le 21 mai, le ministre a fait une série d’annonces, notamment sur le ciblage des aides. Pour la prochaine programmation, et dès 2023, l’enveloppe des aides protéines va augmenter. De 2,3 % (toujours du 1er pilier) en 2023, elle passera à 3,5 % en 2027, soit une augmentation de 0,3 point par an. Pour financer ce transfert, ce sont les aides animales qui vont contribuer (les aides végétales hors protéines voient leur enveloppe stabilisée).

Il en résulte une baisse des aides couplées animales, qui font par ailleurs l’objet d’une réforme d’ampleur pour les aides bovines : les aides bovins allaitants (ABA) et lait (ABL) fusionnent pour former une aide UGB bovine.
Cette réforme s’accompagne d’un transfert de l’allaitant vers le lait, et donc d’une modification des montants : 57€/UGB en lait (limite de 40 UGB de plus de 16 mois) et 104€/UGB allaitant (dans la limite de 120 UGB de plus de 16 mois). L’enveloppe ABA + ABL et ensuite UGB bovine va diminuer, du fait de deux phénomènes que sont la convergence externe en 2022 et le transfert vers l’aide protéine dès 2023. Les laitiers sont donc très peu gagnants et les éleveurs allaitants sont fortement pénalisés.

On peut heureusement se satisfaire du maintien de l’enveloppe consacrée à l’ICHN, grâce à une participation conséquente de l’État (108 M€/an). Cette nouvelle programmation est celle qui est censée relever le défi du « grand déménagement rural », autrement dit, préparer et assurer le renouvellement générationnel pour compenser le départ à la retraite de la moitié des agriculteurs en fin de programmation. Ces départs massifs à la retraite font peser, dans un avenir très proche, un fort risque sur la production française, notamment pour l’élevage. La souveraineté alimentaire se reconquerra à travers la pérennité des actifs et grâce à la diversité de l’agriculture française. Si pour cette nouvelle PAC le ministre a joué la carte de stabilité en ne bouleversant pas – et c’est à saluer comme un moindre mal – la base des soutiens financiers, la Coordination Rurale considère que seule une PAC construite sur une logique de prix agricoles rémunérateurs permettra de stopper la disparition des agriculteurs et de garantir notre souveraineté alimentaire.

À lire sur le sujet :
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