Les primes ont changé notre agriculture. L'Europe les a mises en place pour nous permettre de devenir concurrentiels sur le marché mondial. Les prix de nos produits ont été révisés à la baisse pour atteindre les cours mondiaux, mais pour que nous puissions nous en sortir, on nous a donné des compensations financières pour diminuer les pertes occasionnées. C’est ce que l'on appelle les aides PAC et ce pourquoi on nous appelle des assistés.

Un sac vide tient difficilement debout : encore une fois, l'Europe nous propose un sac vide. Comment être concurrentiels alors que vivons dans un monde plein d'inégalités : climat, surface, territoire, contraintes,... ? C'est impossible ! Ou alors, il faudrait détruire nos paysages, nos vallées, nos bocages, fermer les yeux sur l'impact écologique, produire, produire et encore produire sans aucune assurance de revenu !

Voyez, même le vide est indispensable : et pourtant, on continue ! On produit de bons produits en respectant notre terre, cet outil de travail qui nous permet de combler les désirs de nos chers consommateurs qui veulent manger sain pour pas cher et qui malgré tout, nous traitent de pollueurs. Tous savent que les prix ne couvrent pas nos coûts de production et que d’année en année les primes baissent. Chaque année, une nouvelle étude sort pour l'attester ! Mais rien en guise de réponse ! Le vide !

La douleur, c'est le vide : c'est ce qui attend nos campagnes, si nous continuons comme cela. Nous sommes trop pessimistes, nous dit-on. Mais c'est notre quotidien de voir nos villages passer d'une vingtaine de fermes à une ou deux. Ça été notre quotidien de nous rendre à l’enterrement de l'un des nôtres qui n'a pu se résigner à arrêter et a préféré mettre un terme à sa vie. Un homme seul n'est entouré que de vide : à la Coordination Rurale, nous avons toujours lutté pour avoir des prix et pas des primes afin d’assurer notre avenir grâce à une valeur réelle de nos produits. Mais le système a été plus fort que nous et aujourd'hui nous sommes pris entre la diminution des primes et des prix qui ne seront pas compensés. Ne lâchons pas ! Nous faisons l'un des plus beaux métiers du monde et surtout l'un des plus indispensables : manger est indispensable, ne l’oublions pas.

Une main, même vide, est parfois d'un grand secours : nous devons être solidaires, garder la tête haute et exiger encore et encore un prix juste et équitable pour maintenir notre agriculture et pouvoir en vivre dignement. Seuls nous, agriculteurs pouvons le faire. Ne restons pas seuls sur nos fermes, c'est ce qu'ils veulent ! Retrouvons-nous souvent pour refaire le monde, imaginer le meilleur et nous battre pour les générations suivantes. Pour que nos filles et nos fils puissent avoir l'avenir dont nous avons tant rêvé, une agriculture à sa juste place, celle qui remplit les assiettes, celle qui remplit les silos, celle qui remplit les sacs de courses, celle qui ne laisse pas de vide !

Thierry Coupey - Céréalier Président de la CR61

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