Fin avril, dans le cadre des discussions relatives à l’élaboration du pacte et de la loi d’orientation et d’avenir agricoles, François Walraet a, en tant que président de la CR Auvergne-Rhône-Alpes, participé à la plénière de clôture signant la fin de la concertation régionale.

Après la plénière de lancement le 1er février 2023 et au cours des trois mois qui ont suivi, les responsables de la CR AURA ont activement participé aux différents groupes de travail qui se sont réunis et ont mobilisé près d’une vingtaine de structures. De par leurs contributions, ils ont ainsi pu faire entendre leurs revendications et défendre les positions portées par le syndicat autour de trois thématiques centrales : l’orientation et la formation, l’installation et la transmission, l’adaptation et la transition face aux changements climatiques.

À l’issue de ces groupes de travail et après une consultation menée en parallèle auprès des jeunes dans les établissements d’enseignement agricole de la région, des propositions prioritaires ont été dégagées et compilées dans un document synthétique de 43 pages (téléchargeable ici).

 

1. L’orientation et la formation

Pour l’orientation et la formation, il est notamment souligné l’importance de :

  • Promouvoir l’agriculture et ses métiers auprès des familles, des enseignants, des acteurs de la formation et de l’orientation ;
  • Donner la possibilité aux BTS agricoles de poursuivre sur une 3ème année d’enseignement supérieur au sein des lycées agricoles pour valoriser la formation agricole et favoriser les passerelles avec l’éducation nationale ;
  • Moderniser les référentiels de l’enseignement agricole en s’appuyant sur la réalité du métier actuel et des années à venir ;
  • Revoir les contenus et la durée des formations ;
  • Professionnaliser et faire monter en compétences les employeurs et salariés agricoles sur la gestion d’entreprise.

L’avis de la CR : Si les jeunes de 40 ans et moins représentent la grande majorité des nouveaux agriculteurs, il n’en reste pas moins que 30,3 % des nouveaux installés ont plus de 40 ans. La société a évolué, les parcours professionnels sont moins linéaires et les reconversions sont une ressource essentielle pour le renouvellement des générations en agriculture. Ainsi, le critère d’âge doit être revu, les formations pratiques et l’expérience prises en compte pour éviter de barrer la route aux nouveaux installés qui n’auraient pas les bons diplômes. Il faut absolument éviter les démarches inutiles et les stages obligatoires pénalisants.

Les métiers de l’agriculture sont, en effet, confrontés à une exigence croissante des connaissances techniques (produire autrement, ferme numérique, changement climatique, traçabilité, labels qualité, etc.). En plus des compétences professionnelles, le futur installé devra se former à la gestion d’entreprise.

Dans un cadre général où la poursuite d’études vers le supérieur est devenue le but prioritaire, les diplômes permettant l’installation se trouvent pris entre le marteau d’une foultitude de connaissances toujours plus pointues et l’enclume d’une durée d’enseignement qui stagne voire diminue (baccalauréat professionnel passage de 4 à 3 années).

L’enseignement agricole et de l’agriculture doit rester professionnel, accessible et lisible.

2. L’installation et la transmission

  • Concernant l’installation et la transmission, il est proposé de :
  • Créer des PAIT (Points Accueil Installation Transmission) comme portes d’entrée uniques ;
  • Revoir le statut des SCOP et SCIC ;
  • Développer des dispositifs d’essai au métier ;
  • Faciliter l’accès au foncier : contrôle des structures, location du foncier, portage collectif, droit de préemption des collectivité ;
  • Créer, développer et soutenir des dispositif incitatifs à la transmission (fiscaux et sociaux).

L’avis de la CR : La logique est simple : des prix rémunérateurs = des installations viables = un métier attractif ! Pour la Coordination Rurale, il faut faciliter au maximum les démarches d’installation et assouplir les critères d’attribution des aides. Par conséquent, nous demandons :

  • Une évolution de la Dotation Jeunes Agriculteurs et de l’aide à l’installation du nouvel agriculteur vers une unique Dotation Nouvel.le Installé.e, terme qui nous semble plus adaptée aux enjeux actuels avec une désignation de « Nouvel installé » durant 7 ans après l’installation pour pouvoir bénéficier des aides, crédits d’impôts ou autres facilitations
  • Un cautionnement de l’État sur les prêts liés à l’installation ;
  • Une limitation du Plan de professionnalisation personnalisé au stage 21h pour tous les titulaires d’un diplôme de niveau IV (sauf demande du jeune installé d’accès à certains stages, formations) ;
  • Un assouplissement des conditions du suivi et d’engagement ;
  • Une meilleure prise en compte du statut de pluriactif ;
  • La fin des discriminations entre installés aidés et installés non aidés ;
  • Une valorisation des formations et de l’expérience professionnelle pour l’obtention de la Capacité professionnelle agricole (CPA) ;
  • L’instauration d’un cautionnement public de 50 % pour les prêts contractés à l’installation.

3. L’adaptation et la transition face au changement climatique

Enfin, concernant les processus d’adaptation et de transition face au changement climatique, il est retenu de :

  • Faciliter la mise en œuvre de la réglementation : simplification et mise en cohérence, contrôles pédagogiques, adaptation des textes et évolutions, études d’impact, nouvelles règles fiscales, etc. ;
  • Reconnaître et promouvoir le rôle des prairies permanentes et des systèmes herbagers ;
  • Accompagner la prise de risque des agriculteurs : droit à l’essai, accompagnement technique, sécurisation financière ;
  • Former les animateurs de collectifs d’agriculteurs en transition, pour qu’ils soient davantage dans une posture d’accompagnateurs, de stimulateurs d’idées, de facilitateurs de changements, plutôt que dans la posture de conseil individuel préconisateur ;
  • Prioriser l’usage de l’eau pour l’agriculture, constituer des réserves dans le cadre de projets concertés et coconstruits à des échelles territoriales pertinentes, faciliter la captation des eaux de pluie des bâtiments agricoles, réutiliser les eaux usées.

L’avis de la CR : Pour répondre aux défis imposés par le changement climatique, la (ou les) transition(s) appelée(s) à se produire doivent également répondre de manière cohérente aux autres défis imposés à l’agriculture et, ce, tout en gardant en tête son caractère économique et stratégique. Pour rappel : la définition de l’agroécologie inscrite dans le Code rural précise que les systèmes agroécologiques doivent être économiquement viables ! Sans agriculteur avec des structures viables, il n’y aura plus que du béton et de l’ensauvagement.

L’activité agricole dépend certes de la météo et du climat, mais elle est aussi, et de plus en plus, soumise à des pressions économiques, géopolitiques, politiques (parfois contradictoires), environnementales, sanitaires, sociales et sociétales. Demander à l’agriculture de supporter des efforts et de réduire sa capacité de production pour que d’autres secteurs puissent continuer le business as usual n’est pas soutenable. De même, ce n’est pas à l’agriculture de supporter tous les efforts de décarbonation de l’alimentation.

Il est indispensable de prendre en compte les services rendus à la société au-delà des seuls surcoûts et des manques à gagner. Les agriculteurs sont les premiers impactés par le changement climatique. Ils sont dépendants des cycles naturels et, à ce titre, sont doublement pénalisés : d’une part, parce qu’ils en sont directement victimes ; et d’autre part, parce que c’est sur eux que l’on fera peser les efforts pour y remédier. Les agriculteurs se sont toujours adaptés, mais le fruit de leur travail doit être rémunéré à la hauteur des services qu’ils génèrent par leurs pratiques et en considérant les contraintes qui pèsent sur eux qu’elles soient climatiques ou administratives.

Face aux propositions retenues et en guise de conclusion, François Walraet a regretté que le terme de « rentabilité », pourtant déterminant, n’ait pas constitué le fil rouge de cette concertation : « pour relancer une dynamique d’installation, les candidats ont besoin d’indépendance dans leurs décisions et de perspectives de prix qui couvrent leurs coûts de production et leur permettent de se verser un salaire décent. Il ne doit pas s’agir uniquement de compensations ou d’avantages fiscaux, mais bien d’une véritable politique de prix. » a-t-il souligné lors de la plénière de clôture, face au directeur de la DRAAF, au président de la Chambre régionale d’agriculture et au vice-président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes délégué à l’agriculture.

Enfin, on peut s’interroger sur la présence massive des associations écologistes. Il s’agira bien d’une loi d’orientation et d’avenir agricoles, ceux qu’elle concernera en premier lieu, ce sont donc bien les agriculteurs. Pourquoi, dès lors, interroger la FNE ou WWF ?

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