Le mardi 23 août, la Coordination Rurale 38 a reçu Lionel BEFFRE, préfet de l’Isère, sur les exploitations des adhérents et sympathisants du syndicat.

La rencontre a permis d’évoquer les difficultés rencontrées par les agriculteurs et les solutions envisageables, en présence de nombreux acteurs de l’agriculture isèroise.

Étaient également présents à la rencontre :

- Florence GOUACHE, Sous-Préfet de Vienne

- Jean-Pierre BARBIER, député de l'Isère et président du conseil départemental

- Robert DURANTON, Vice président dédié à l'agriculture

- Yannick NEUDER, président de la Com'Com' BrièvreIsère

- Marie-Claire BOZONNET, directrice de la DDT38

- Anne TYVAERT, Chef du Service Agriculture de la DDT38

- Bénédicte BERNARDIN, Adjointe au service Agriculture de la DDT

- Claude COLARDELLE, directeur de la DDPP38

- Hubert JANIN, Maire d'Ornacieux

- Gilles GELAS, 1er adjoint au maire de Brézins

La régulation laitière au cœur des débats à Brézins ...

La rencontre avec le préfet a débuté à la Ferme des 13 Fontaines à Brézins, exploitation laitière qui accueille une centaine de vaches laitières en aire paillée. Deux robots de traite ont été installés sur la ferme permettant ainsi aux vaches de se faire traire 24h/24, 7j/7, à leur simple demande. Avec 3 associés et 2 salariés, la ferme dispose aussi d’un atelier de transformation de noix. Et c’est bien notamment grâce à cet atelier que l’exploitation tourne car la forte baisse du prix du lait n’a pas permis d’avoir un retour sur les investissements. Les éleveurs ont expliquer la situation compliquée dans laquelle se trouve la filière lait avec des chiffres à l’appui :

Coût de production d’1 litre de lait (Ferme des 13 Fontaines):

Campagne 2015-2016 pour une production d’environ 700 000 litres livrés :

0,55€ le litre (rémunération de 2 SMIC comprise pour 2 UTH) pour un prix de vente de 0,35€/L

Viande et autres produits de l’atelier : 0,11€/L

Résultat : perte de 0,09€/L

Début de la campagne 2016-2017 (5 mois)

Pris de vente du lait moyen : 0,30€/L avec les mêmes coûts de production que la campagne 2015-2016.

Pertes provisoires pour la campagne : 0,14€/L

Le Préfet a interrogé les membres de la CR38 sur la contractualisation qui a suivi l’arrêt des quotas laitiers ainsi que sur le rachat des stocks de poudre de lait et de beurre par l’Europe. Pour la CR, le système de la contractualisation mis en place n'est pas satisfaisant car le risque final repose toujours sur le maillon production. Les instabilités sur les marchés sont aussi valables pour les céréales et les tourteaux. Ces charges ne sont pas prises en compte dans les contrats pour la fixation des prix. De même, l’intervention de l’Europe sur les marché n’est pas une solution et coûte cher au contribuable. En effet, si l’Europe rachète le surplus de production, d’autres pays européens, notamment de l’Europe du Nord, vont augmenter leur production car il savent très bien que leur lait sera acheter. On se retrouvera donc avec des stocks immenses de poudre de lait. Et quand l’intervention de l’Europe s’arrêtera, les prix seront pires qu’avant. D’autre part, l’élargissement du stockage européen de la poudre de lait écrémé à 1700 € la tonne correspond à un prix du lait à 220 € la tonne et ne va donc pas enrayer la chute de prix printanière. Le doublement du volume à stocker (218 000 T de poudre de lait écrémé) correspond à 1 million de tonnes de lait supplémentaire (« réhydraté ») soit 0,7 % de la production annuelle UE, à mettre en regard avec les 7 % d’augmentation UE du début 2016…

C’est pour cela que la Coordination Rurale et l’Organisation des producteurs de Lait proposent un système de régulation à l'échelle européenne ayant pour but la maîtrise des volumes de lait pour le maintien des prix dans une fourchette liée aux coûts de production. La régulation de l’offre est la seule solution de bon sens pour sortir de la crise. L’OPL de la CR estime à cet égard que ceux qui demandent plus d’outils pour couvrir les risques se fourvoient : il s’agit plutôt de travailler en amont pour empêcher les crises, à travers une vraie régulation. Une réduction de la production européenne de l’ordre de 3 % serait suffisant pour qu’elle ait un effet réel sur le marché.

la crise céréalière et les charges sociales à Ornacieux.

C’est une grave crise qui se profile pour les grandes cultures. Les récoltes en cours confirment les craintes émises sur le terrain suite aux excès de pluviométrie de juin. Les rendements sont très bas, les qualités sont menacées de déclassement et les prix des marchés sont bien en deçà des coûts de revient. Aujourd’hui, de nombreux agriculteurs se demandent comment ils vont boucler leur trésorerie pour envisager les prochains semis. Ainsi, malgré les chiffres fantaisistes des résultats économiques présentés récemment par le ministère de l’Agriculture, les producteurs de grains viennent de vivre deux exercices comptables très défavorables et l’année 2016/2017 s’annonce comme la pire.

Les céréaliers ont présenté au Préfet une simulation pour l’année 2016 des charges moyennes d’une parcelle de blé :

- Phyto-Engrais-Semences : 530€/ha

- Fermage : 150€/ha

- Cotisations sociaux : au minimum 100€/ha

- Frais de mécanisation : 350€/ha

- Impôts-Taxes : 100€/ha

Charges moyennes : 1230€/ha

Sachant que le rendement moyen pour l’année 2016 est de 60 quintaux de blé par hectare et que le prix moyen est de 120€/qx, le chiffre d’affaire est estimé à 720€/ha. Ainsi, la perte pour l’exploitant est de 510€/ha.

Pour se sortir de cette situation désastreuse, la CR et l’OPG ont proposé un plan d’allègement de charges digne de ce nom. Parmi les mesures :
  • une année blanche pour les remboursements d’emprunt ;
  • une année de suppression de la taxe foncière sur le non bâti ;
  • prêts de trésorerie au taux de 0 % (intérêts pris sur les minimis) ;
  • suppression des taxes et CVO.

Il est urgent d’agir : la situation des producteurs de grains est dans un état de gravité jamais atteint.

Un autre sujet a été abordé : les cotisations sociales.La MSA, en déséquilibre structurel, dépend aujourd’hui à 85 % du régime général pour son financement. En dépit de son nombre extrêmement élevé d’élus (24 000 délégués élus en 2015 pour 6 millions d’assurés, soit 1 délégué pour 250 assurés), la MSA ne parvient pas à répondre efficacement aux besoins du terrain. Dans l’intérêt de tous (agriculteurs, employeurs de main-d’œuvre, retraités) et pour sauver un système au bord de l’agonie, il est urgent d’agir!

La Coordination Rurale a fait 4 propositions au Préfet :

- Appliquer une TVA sociale pour l’agriculture

- Simplifier les procédures et alléger les charges pour les agriculteurs et les employeurs de main-d’œuvre

- Instaurer un moratoire sur les pénalités et sur le contentieux

- Porter le montant minimum des retraites à 85 % du SMIC net pour une carrière complète en prenant en compte les 25 meilleures années et non plus l’ensemble des années de cotisation

Le seuil de pauvreté dans sa définition la plus restrictive (50 % du revenu médian) est à 823 € net, alors que le montant brut moyen des retraites des agriculteurs ayant cotisé à temps plein est de 809 € ! Les agriculteurs travaillent pour la plupart plus de 60 heures par semaine durant toute leur carrière, leur revenu est soumis aux aléas du marché mondial, et ils sont encore maltraités une fois retraités. Leur condition, malgré les multiples promesses reçues depuis des années, demeure indigne pour une catégorie professionnelle qui a travaillé durement pour nourrir la population dans d’excellentes conditions. C’est scandaleux et cela ne peut plus durer !

D’autres sujets ont été abordés comme la classification des cours d’eau (la CR n’ayant pas été invitée aux concertations), les arrêtés pour le prélèvement du loup, la méthanisation ou encore les produits sanitaires.

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