Aujourd’hui plus que jamais, avec la crise sanitaire et le confinement, les autorités publiques nous demandent d’être sur le front, de continuer à travailler, de continuer à produire pour nos concitoyens ! Producteur d’agneau label rouge installé en société avec mon fils en Ardèche, passionné par mon métier, je continue de travailler. Comme d’habitude, je ne compte pas mes heures. Comme d'habitude, je produis dans le respect des normes en recherchant la qualité la plus irréprochable possible. Et comme d'habitude, j'ai l'impression que les discours rappelant notre utilité sont encore et toujours des feux de paille...

Produire de l’agneau mis à la vente pour les périodes de Pâques suppose une préparation de minimum 10 mois minimum. Nous y travaillons donc depuis juin 2019. Dès novembre 2019, donc 5 mois avant, nous prévoyons la quantité d’agneau pour les semaines avant et après Pâques. Et aujourd’hui patatras… Ma coopérative annonce qu'elle ne prendra pas mes agneaux car elle n'aurait pas de ventes d’agneaux français. Cependant, je remarque que les grandes et moyennes surfaces (GMS) vendent, elles, des agneaux de Nouvelle-Zélande. Sans aucun souci ni scrupule. Ces agneaux sont vendus sous la forme « chilled », c’est-à-dire des pièces conditionnées dans un emballage plastique étanche. Cette technique permet de conserver de la viande sans la congeler pendant plusieurs semaines et de continuer à la vendre en qualité de viande fraîche. Cette viande a voyagé plus de 22 000 kilomètres. Quelques-uns des 60 millions de spécialistes de l'agriculture si avides de conseils tout au long de l'année pourraient-ils m'indiquer ce que je dois faire de mes 280 agneaux prêts pour Pâques ?

Qu’est-ce qu’on attend de nous ? Qu’on produise à perte ? C’est fait. Qu'on se tue à la tâche ? C’est fait. Et maintenant qu'on produise pour RIEN ? Aujourd’hui, c’est fait !

L’Ardèche est un territoire accidenté avec des zones difficiles. L’élevage de moutons est l'une des rares activités économiques qui s’y prête parfaitement ! Sans cet élevage, il n’y aura plus de paysages et les touristes ne pourront plus venir les découvrir sans se munir préalablement d'une bonne débroussailleuse.

Qu’attendent les autorités pour rendre prioritaire l'approvisionnement en produits français ?! Nous vivons une crise sanitaire sans précédent. Avec le confinement, nous voyons des débouchés locaux se fermer. Dans bien des endroits, les grandes et moyennes surfaces deviennent les principaux lieux d’approvisionnement pour les Français. Et une fois de plus, nous sommes obligés de constater que bon nombre d'entre elles ne jouent pas le jeu de la solidarité et de l'entraide et préfèrent choisir des produits venus de l'autre bout du monde pour conserver des marges mirobolantes plutôt que soutenir l'élevage français.

Je suis fatigué mais je dois vous laisser : des agnelles gestantes mettent bas ! Il faut encore que je reste de bonne humeur et motivé malgré une bergerie déjà pleine d’agneaux… invendus !

Jean-Pierre JUNIQUE, adhérent de la CR07

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