Le constat
Les industriels laitiers ont de très bons résultats. Très bien, mais n'oublions pas les producteurs de lait qui y participent mais qui n'en reçoivent aucun bénéfice. Les prix du lait sont lamentablement faibles et largement insuffisants partout en Europe. Les coopératives françaises, et même les laiteries privées, se défendent de payer le lait plus cher que leurs homologues européens ! Sauf que sur les deux dernières années (2014 et 2015), leurs prix étaient supérieurs : respectivement, 450,50 € et 372 € chez Friesland Campina (ristournes comprises), 417 € et 337 € chez Arla ! Les contrats de 1ere génération arrivent à échéance et ceux de 2e génération sont à écrire, mais en attente : la loi Sapin 2, qui prévoirait notamment une prise en compte des coûts de production, n'est pas encore votée !
Les contrats
Danone travaille avec les OP pour améliorer son contrat mais, les visions et objectifs étant trop différents trop d'une région à l'autre, sans qu'il ne soit envisageable de travailler collectivement avec les différentes OP maison.
Lactalis proposera d'ici peu sa nouvelle version de contrat - qu'elle travaille de façon unilatérale -. Sodiaal reste plus vague. Comme si les coopératives n'avaient pas à travailler la question ! Espérons tout de même que si la loi Sapin 2 impose une prise en compte des coûts de production, les coopératives ne bénéficieront pas encore d'une exception.
La régulation de la production
Danone vise à maintenir sa source d'approvisionnement. Lactalis regrette la mise en place tardive des mesures de réduction alors que les marchés reprennent. D'ailleurs, de façon tout aussi imprévisible, un inversement de tendance pourrait de nouveau avoir lieu du fait d’un nouveau retrait des Chinois ou d’une accélération de la production américaine. Quant à Sodiaal, sa stratégie de volumes A et B ne serait pas si mauvaise selon eux puisqu'ils l'ont présentée à différents pays nordiques. Des collègues allemands seraient même dits intéressés. Sodiaal se défend que personne n'est obligé de faire le volume B, et que son prix pourrait repartir…. Est-ce sous-entendre « Faites le quand même, il n'est pas cher pour nous dans le moment ! ». Évidemment, à 200 €, ça diminue les charges de la coopérative, mais ça ne couvre pas nos charges et nous n'en avons pas le retour !
Les AOP de bassin
Auprès des trois industriels, nous avons questionné et défendu la mise en place d'AOP de bassin, avec un lieu de concertation qui pourrait être le Cniel. Ses outils pourraient être notamment l'Observatoire du marché du lait européen (le MMO) et le PRM proposé par l'EMB. Nous avons bien compris les possibles faiblesses de telles AOP, surtout si elles sont réduites à un transfert d'informations vers les OP, sans participation à la stratégie de régulation, avec bien sûr une facturation de ses services à chaque OP !
Le prix payé au producteur
Les trois industriels rencontrés sur deux jours (Danone puis son OP Sud-Est, Sodiaal représentée par trois administrateurs, dont le président et le directeur de la filière bio, et enfin Lactalis) ont reconnu la qualité exceptionnelle du lait produit en France et le savoir-faire qu'on ne trouverait nulle part ailleurs. Argument normalement suffisant pour valider un prix supérieur !
Nous avons encouragé l'idée d'un prix plancher qui pourrait être le coût de production moyen de chaque région, en insistant sur le fait que tous les États membres devraient rentrer dans cette logique.
Enfin, dans la loi Sapin 2, nous espérons ne pas voir ressortir l'idée de prix A et B, le volume B étant celui destiné à l'export. Si tel était le cas, ce serait certainement le résultat du lobby des coopératives. Nos administrateurs auraient-ils oublié que le lait B est aussi blanc que le lait A ?
« La crise ne sera pas réglée malgré les 150 millions d'euros dépensés » « Un producteur Sodiaal aura le même prix payé qu'un producteur Lactalis »Chez Danone
Danone a de bons résultats et le reconnaît. L'équation laitière est optimisée : cinq usines en France, pas d'excédent et des produits à haute valeur ajoutée. Côté prix : ils ne sont pas satisfaisants pour les producteurs Danone de la délégation. Danone se défend en s'appuyant sur un contrat, certes perfectible, qui prend déjà en compte les coûts de production pour 30 % du prix final. Ces coûts sont le résultat d'une étude de coûts réels menée dans la région, répartis en cinq quartils regroupant des exploitations de typologie identique. Seuls deux quartils ont été retenus pour faire une moyenne et ont été traités à un niveau qui ne couvre que les charges fixes et opérationnelles. Mais c'est un début !
Chez Lactalis
Lactalis regrette les attaques personnelles qu'elle subit. Côté prix : la formule est écrite dans les contrats tout comme le calage à 2 € près des 1 000 litres sur son environnement proche. Calculs déjà faits : Sodiaal et Lactalis sont bien à mettre sur le podium des moins bons payeurs ! Lactalis se défend en disant qu'elle n'a pas contribué à la surproduction (pas d'attribution de volumes de développement), qu'elle aussi a collecté tout le lait contractualisé et qu'elle aurait même pu en acheter à 130 €/tonne aux Hollandais, preuve de la responsabilité de nos collègues nordiques dans cette crise ! Autre argument de Lactalis : conserver les marchés à l'export, lesquels représentent 40 % du lait transformé.Chez Sodiaal
Les résultats nets sur chiffre d'affaires sont faibles chez Sodiaal (moins de 1%). Mais, ce constat est normal puisque les résultats de Yoplait ne sont rapportés qu'en équivalent, et que la part de chiffre d'affaires revenant à Sodiaal (la moitié de plus de 5 milliards) ne vient pas consolider le CA ! Mais Sodiaal investit avec les Chinois, entre autres, pour se positionner, notamment à l'export ! Avec quelles perspectives ? Quel plan A ? Quel plan B ? Pas de soucis, Kees Gielen a été embauché pour les aider à trouver la bonne stratégie ! Nous verrons bien. Sauf que Kees Gielen vient de chez Friesland Campina. Il a certes quitté la coopérative hollandaise, ou presque puisqu’il n’est plus que Friesland Philipines…