Objet : Lettre ouverte : demande de positionnement clair envers les actions illégales de destruction des réserves d’eau

Madame la Ministre,

Le Varenne de l’eau codirigé par vos services réaffirme que la souveraineté alimentaire est un enjeu stratégique pour une nation et que « déléguer notre alimentation est une folie ». Il structure en ce sens une série de réponses au changement et aux aléas climatiques qui mobilisent l’ensemble des leviers permettant notamment l’optimisation de la ressource en eau pour l’irrigation, dans le respect de son renouvellement et du bon état des milieux.

Créés dans le cadre des Assises de l’Eau en 2017, les Projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) sont des outils de planification concertée portant sur l’ensemble des usages de l’eau sur un territoire (eau potable, agriculture, industries, navigation, énergie, pêches, activités récréatives, etc.). L’eau est précieuse, mais aussi indispensable pour l’ensemble de notre économie et pour le bon fonctionnement de nos milieux naturels. La croissance des plantes dépend en effet de l’eau qu’elles reçoivent. La stocker est donc une condition indispensable à notre production alimentaire et à notre autonomie s’agissant des importations. Seule une approche concertée et intégrant dans les calculs l’ensemble des usages dans le respect de ce que la ressource peut nous offrir nous permettra de progresser. Les travaux du Varenne confirment que les PTGE sont les outils adaptés pour trouver les réponses spécifiques dans les bassins en tension.

L’eau est également essentielle au bon fonctionnement des milieux en hiver : recharge des nappes phréatiques, régime d’écoulement des cours d’eau et apport d’eau douce jusqu’aux estuaires. Mais comme l’indiquent les conclusions du Varenne : une fois que ces besoins sont satisfaits, il serait dommage de ne pas capter l’eau « excédentaire » pour la stocker pour l’été suivant.

Comme vous le savez, vos services régionaux (DREAL) contrôlent les débits et les niveaux des nappes phréatiques et des cours d’eau. Des niveaux ont été établis au dessus desquels des volumes de prélèvement sont possibles. Autrement dit, si des agriculteurs sont à l’origine de demandes pour des créations de réserves, ils ne décident pas pour autant quand et combien ils prélèvent et stockent pour arroser leurs cultures l’été.

Pourtant, depuis des mois le collectif « Bassines Non Merci » organise en Nouvelle-Aquitaine des rassemblements de militants dans le but clairement affiché de détruire des bassines destinées à l’irrigation agricole locale. Ces réserves de substitution se situent sur des terrains privés et ont été autorisées par les services de l’État, y compris les vôtres. Alors que toutes les autorisations nécessaires ont été accordées, les membres du collectif ne l’acceptent pas, en ont détruit certaines et appellent régulièrement à des mobilisations visant à poursuivre ces destructions.

Vos services ainsi que ceux du gouvernement encadrent les volumes prélevés pour l’irrigation et valident des projets de stockage ; aussi la Coordination Rurale vous demande de vous exprimer sur ces agissements en communiquant sur les travaux de votre ministère pour l’encadrement de la gestion de l’eau afin de faire cesser cette bataille.

Le 15 janvier dernier, les agriculteurs ont pu compter sur le soutien des forces de l’ordre pour empêcher la destruction d’une réserve d’eau. Alors que les pertes s’élèvent à des centaines de milliers d’euros de dégradations, que des gendarmes sont blessés et que le sentiment d’impunité s’accroît, ces saccageurs, fiers de leurs actes, diffusent des images sur leurs sites et réseaux sociaux, sans se sentir inquiétés par la justice !

Alors que 3 jours de mobilisation fin mars sont d’ores et déjà annoncés par les anti-bassines et qu’ils ont promis qu’elles seraient toutes détruites, il est urgent d’apaiser les tensions en communiquant sur l’encadrement actuel de l’irrigation qui n’a rien à voir avec ce dont on peut entendre parler dans des pays en manque d’eau où les prélèvements sont bien supérieurs à ce que le milieu peut restituer ! En France, notre réglementation sur la gestion de l’eau est stricte (probablement la plus stricte au monde), respecte la biodiversité et les débits d’étiage et participe au maintien de notre souveraineté alimentaire.

Les sécheresses s’enchaînent et les agriculteurs accompagnés des services techniques font de leur mieux pour tendre à plus de sobriété et pour optimiser la gestion de l’eau. Au-delà d’un mépris total pour le monde agricole, ces actions relèvent donc de l’absurde.

Madame la Ministre, nous vous demandons de bien vouloir vous exprimer sur ces actes malveillants qui divisent les Français ! Il est urgent d’apaiser la situation.

Certain de l’attention que vous porterez à ce courrier, je vous prie d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de ma très haute considération.

Bernard Lannes, Président national

Copie du courrier à Monsieur Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation

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