Le ministère a transmis aux parties prenantes la première version du Plan stratégique national (PSN) ; un long document de plus 650 pages qui présente notamment les interventions des deux piliers de la PAC (paiements directs, interventions sectorielles et développement rural).

Si cette première version apporte des précisions par rapport aux arbitrages rendus par le ministre lors du Conseil supérieur d’orientation du 13 juillet 2021, elle présente encore des éléments « en l’état », soit parce qu’il reste encore du travail, soit parce que le contexte ou le cadre européen n’est pas encore clarifié ou l’a été tardivement pour les inclure. Il s’agit notamment des légumineuses fourragères, du coefficient de pondération des haies, et des éléments dépendant des Régions (MAEC en particulier). Sur ce dernier point, un accord a été trouvé avec les Régions sur la maquette financière, mais la répartition fine des enveloppes est encore à travailler.

Enfin, certains éléments ne sont pas encore ou ne figureront pas dans le PSN. En premier lieu, la définition de l’agriculteur véritable qui fait encore l’objet de discussions. Concernant les MAEC, si le menu global est fixé, l’architecture fine du catalogue est à finaliser. Pour les éléments qui ne seront pas dans le PSN, on peut citer par exemple la conditionnalité sociale qui n’a pas à être décrite dans le PSN, ou le ciblage de 30 M€ de l’enveloppe MAEC vers les zones intermédiaires car c’est une mesure de gestion.

Cette première version est actuellement entre les mains de l’autorité environnementale qui doit rendre son avis pour fin octobre. En novembre aura lieu une procédure de participation du public par voie électronique. La finalisation du PSN aura lieu en décembre (version 2) en tenant compte des remarques de l’avis de l’autorité environnementale, de l’avis du public et des avis informels de la DG AGRI. La transmission à la Commission européenne du PSN V2 devra avoir été effectuée au plus tard le 31 décembre 2021.

Par rapport aux arbitrages présentés le 13 juillet par le ministre de l’Agriculture, le PSN V1 apporte des précisions sur la convergence, l’agriculture bio et la conditionnalité (BCAE).

La convergence

Les droits à paiement de base de la nouvelle programmation (DPBn) vont poursuivre leur convergence pour atteindre 85 % (70 % actuellement).

Rappel sur la convergence : La convergence des droits à paiement à l'hectare vise à gommer les différences liées aux références historiques, et fait suite au découplage des aides compensatoires (2003). Pour la précédente programmation, l'Union européenne demandait aux États membres de converger au minimum à 60 %, la France a choisi 70 %. À noter que l'ancien paiement vert était aussi concerné, puisque lié à la valeur du DPB. Une convergence à 70 % signifie qu'aucune aide ne peut être inférieure à 70 % de la moyenne nationale.

Pour la nouvelle programmation, le système de droits à paiement avec convergence partielle de l’ensemble des droits à paiement dans l’Hexagone est maintenu.

• La valeur initiale des DPBn sera la valeur 2022 des DPB, ajustée sur la base de l’enveloppe 2023 disponible. • Il n’y aura pas de création de DPB. • À l’issue de la convergence, tous les droits au paiement auront une valeur comprise entre une valeur plancher établie à 85 % de la valeur moyenne et une valeur plafond établie à 1000 €.

La moitié du chemin de convergence restant à parcourir pour une convergence totale sera donc réalisée.

La convergence des droits à paiement se fera en 2 temps, en plus du mécanisme lié à la disparition du paiement vert.

1er temps : 2023 • Tous les droits de valeur inférieure à 70 % de la valeur moyenne seront portés à une valeur égale à 70 % de la moyenne ; • La revalorisation sera financée par l’application d’un plafond sur les DPBn de valeur élevée, à un niveau évalué à 1350 € (très peu de droits concernés)

2e temps : 2025 • Les DPBn seront plafonnées à 1000 € ; • Réduction de 50 % de l’écart à la moyenne des DPBn de valeur supérieure à la moyenne avec limitation des pertes : réduction de l’écart à la moyenne limitée à 30 % de la valeur initiale des droits (mais le plafond 1000 € s’applique dans tous les cas) ; • Mise en place d’un plancher à 85 % de la valeur moyenne et réduction d’environ 40 % de l’écart à la moyenne des DPBn à valeur inférieure à la moyenne.

Agriculture biologique

Le montant de l’enveloppe est maintenu à 340 millions d’euros, de même que l’ambition de 18 % de surfaces en bio en 2027 et comme dans la programmation actuelle, les engagements seront de 5 ans. L’aide à la conversion (CAB) est portée à 5 ans, en contrepartie de la suppression de l’aide au maintien (MAB).

Les montants actuels de CAB sont maintenus, sauf pour les grandes cultures qui bénéficient d’une revalorisation de 50€/ha pour atteindre 350€/ha.

Conditionnalité et BCAE

Pour rappel, la nouvelle conditionnalité sera plus exigeante, et relève de la conformité sur l’accès à l’ensemble des aides.

Conditionnalité 2015-2022 - BCAE (cross compliance) + verdissement : prairies permanentes, diversification et SIE (greening) = conditionnalité 2023-2027 (conditionality)

Attention, la numérotation des BCAE change par rapport à la précédente programmation, mais aussi par rapport à celle utilisée pendant les négociations entre institutions européennes du fait de la suppression de la BCAE 5. Les BCAE au-delà de la numéro 4 subissent un décalage d’une unité inférieure : l’emblématique BCAE « Rotation des cultures sur terres arables » qui portait le chiffre 8 lors des négociations européennes devient donc la BCAE 7.

Les BCAE suivantes ne sont pas modifiées :

BCAE 3 : interdiction de brûlage des chaumes (sauf motif sanitaire). Objet : lutte contre le changement climatique et plus particulièrement maintien de la matière organique des sols. Continuité de l’actuelle BCAE VI Sont concernées : les cultures de terres arables soit les céréales, oléagineux et protéagineux, y compris le lin.

BCAE 5 : gestion minimale des sols Objet : protection des sols en réduisant le risque de dégradation et d’érosion Reprise de la BCAE V actuelle, la réglementation européenne n’évolue pas. • Pas de travail sur les sols inondés ou gorgés d’eau ; • Sur une parcelle de pente supérieure à 10 %*, interdiction du labour réalisé entre le 1er décembre et le 15 février sauf dans les cas suivants : • labour effectué dans une orientation perpendiculaire à la pente ; • mise en place bande végétalisée de 5 mètres de large minimum an bas de parcelle. BCAE 6 : couverture minimale des sols Objet : stockage du carbone Reprise de la BCAE IV actuelle. L’évolution se situe dans la précision « pendant les périodes les plus sensibles », étant entendu que, pour la Commission européenne, la période des pluies est jugée la plus pertinente. • Application du Plan d’action nitrates en zone vulnérable, présence d’un couvert au 31 mai sur jachère ou entre l’arrachage et la réimplantation des vignes, vergers et houblon hors zone vulnérable.

Les évolutions sont à trouver dans les BCAE suivantes :

BCAE 4 : bandes tampons le long des cours d’eau Objet : protéger les sols des risques érosifs, améliorer leur structure et contribuer à la protection des eaux courantes en limitant les risques de pollutions diffuses. Continuité de l’actuelle BCAE I Extension aux canaux et fossés sous forme de bande de 1 m de large avec interdiction d’usage de produits phytos. Pas de changement pour la largeur minimale applicable en France des bandes le long des cours d’eau fixée à 5 m.

BCAE 2 : protection des zones humides et tourbières : Objet : lutte contre le changement climatique et plus particulièrement protection des sols riches en carbone. C’est une nouvelle exigence, dont la mise en œuvre est envisagée à compter de 2024, en raison du délai nécessaire pour définir les « zones humides », élaborer une cartographie, et définir les différentes obligations.

BCAE 1 : maintien du ratio des prairies permanentes Objet : lutte contre le changement climatique et plus particulièrement contre la conversion des prairies permanentes pour préserver leur stock de carbone. Continuité du verdissement, mais applicable maintenant aux bios • Maintien du régime d’interdiction à 5 % • L’échelon géographique pour le calcul du ratio est régional • Maintien par la France du régime d’autorisation à partir de 2% (au lieu de 2,5%)

BCAE 7 : rotation des cultures sur terres arables Dans le cadre du « paiement vert », l’agriculteur devait cultiver sur ses terres arables 3 cultures différentes dans le cas général. La BCAE 7 est une évolution liée au paiement vert.

Initialement pensée comme une rotation des cultures à la parcelle, cette BCAE peut finalement également autoriser la prise en compte de la diversité des cultures à l’échelle de l’exploitation. • Système basé sur le même fonctionnement que l’écorégime « diversification des cultures » (avec un score attendu de 2 points contre 4 et 5 points pour l’écorégime). • Dans certains cas particuliers où la diversité des cultures n’est pas adaptée au système d’exploitation, utilisation de la mesure culture principale/culture dérobée dans la rotation prévue par le Règlement plans stratégiques (RPS). • Les dérogations relatives à la part des surfaces en herbe, en riz, pour les terres arables inférieures à 10 ha et pour l’agriculture biologique s’appliquent.

BCAE 8 : part minimale consacrée aux activités non productives Objet : maintien d’éléments non productifs (ENP - éléments topographiques, indicateurs agroécologiques) pour améliorer la biodiversité sur la ferme. Interdiction de couper les haies et les arbres pendant la saison de nidification. Continuité de la BCAE VII et du verdissement.

Part minimale d’éléments non productifs :

• Taux minimal de 4 % d’ENP sur les terres arables de l’exploitation ou si prise en compte des plantes fixant l’azote et les cultures dérobées, le taux à respecter est de 7 % dont (nouveauté) 3 % d’ENP. • Interdiction de couper les haies et les arbres pendant la saison de nidification (= actuelle BCAE VII) • Exemptions : idem BCAE 7

BCAE 9 : interdiction de convertir ou de labourer les prairies permanentes dans les sites Natura 2000 Objet : maintien de prairies désignées comme sensibles d’un point de vue environnemental dans les sites Natura 2000 Continuité du verdissement.

• Maintien de l’interdiction avec actualisation pour tenir compte de l’évolution du zonage Natura 2000 • Nouveauté : extension de l’interdiction à toutes les exploitations, y compris celles en agriculture biologique

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