Lors des questions au gouvernement, François De Rugy, ministre de la Transition écologique et solidaire, a déclaré avoir conscience de la nécessité de baisser les coûts de la méthanisation, qu’il estime à « environ 90 euros le mégawattheure quand le gaz importé est d’environ 20 euros le mégawattheure. ». Il fait cependant abstraction du fait qu’une très grande majorité des installations en France fonctionnent non pas en injection, mais en cogénération. L’Ademe estime que le prix de revient est alors d’environ 160 €/MWh (1) pour une unité de 95 kWe. Le pas est donc encore plus grand à franchir, mais cela n’est pas impossible à condition que le gouvernement reviennent sur les grandes lignes de sa Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).

L’impact du coût administratif

Beaucoup de projets de méthanisation se heurtent à la dure réalité des chiffres et ne voient pas le jour. Ce n’est donc pas un problème de volonté ou d’ambition de développer la méthanisation, mais bien un problème de coût, de financement et forcément de tarif de rachat.

En privilégiant les grosses unités, l’État enferme les éleveurs dans des projets collectifs trop coûteux. Au-delà des coûts de structures et de matériels, il faut regarder l’impact administratif, et sur ce point, l’État peut jouer un rôle important. Entre les diagnostics (2 à 3 000€), les études de faisabilités (5 à 10 000€), les demandes d’autorisation (15 000€) et le permis de construire (5 000€), ce poste de dépenses « administratives » n’est pas négligeable. Les subventions qui y sont consacrées pourraient être utiles sur d’autres postes. Cela représente également une perte de temps non négligeable.

Si les investissements représentent une part importante du coût de production, la maintenance des installations constitue un poste non négligeable. Pour réduire les coûts, le ministre pourrait se pencher sur cette question notamment au niveau des pièces de rechange dont le prix est trop souvent sur-évalué mais aussi des frais de déplacements des techniciens qui alourdissent les factures de maintenance.

La nature du substrat

Les besoins d’investissements en Allemagne sont réputés être presque deux fois inférieurs à ceux constatés en France, ramenés à la puissance des installations. Pour autant, ils sont similaires au regard des tonnages traités. Cette différence s’explique en partie par la nature des substrats utilisés et les différences de pouvoir méthanogène. En Allemagne, le recours aux cultures dédiées permet une meilleure production de méthane.

Cependant, pour la Coordination Rurale, cette voie n’est pas la bonne car elle détourne les surfaces agricoles de leur vocation première : la production alimentaire. La méthanisation doit rester un outil de valorisation des effluents et donc représenter une source de revenu diversifiée. Cela devient possible en développant des unités de méthanisation adaptées à la taille des élevages, mais ce n’est malheureusement pas le chemin que semble vouloir prendre le gouvernement.

Voir des déchets industriels ou des boues d’épurations utilisés comme substrat constitue une autre crainte de la Coordination Rurale, car les sols agricoles reçoivent les digestats (bien souvent les agriculteurs ne sont inclus dans les projets collectifs industriels que dans ce but). Quels impacts auront ces digestats « industriels » sur les productions agricoles futures ? À l'origine, le process avait pour but de collecter le méthane dégagé par les fumiers (et d'améliorer sa production). La sur-utilisation de cultures dans les méthaniseurs  nous éloigne fortement de cet objectif environnemental.

(1) https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/injection-biomethane-reseau-gaz-rapport.pdf – p109

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