Monsieur le Premier ministre,
Votre prise de fonction intervient dans un moment charnière pour l’agriculture française. En tant qu’ancien ministre de l’Agriculture, vous savez à quel point l’agriculture française représente un secteur vital pour notre pays, pilier de notre souveraineté et de notre liberté. L’orientation que vous choisirez de lui donner par le choix du ministre de l’Agriculture devra chercher à apporter des réponses à la colère qui pourrait exploser à nouveau cet automne. Cette année, les récoltes atteignent des niveaux historiquement bas. La pluviométrie exceptionnelle de ces derniers mois couplée à des normes de plus en plus contraignantes, a conduit à une baisse des rendements de plus de 30%, à laquelle il faut ajouter une baisse drastique de la valeur nutritionnelle des grains. Le poids spécifique est loin d’atteindre les 76 kg/hl habituels. Pour les céréaliers français, c’est la double peine : ils vendent beaucoup moins en volume et moins cher ! Les éleveurs en bout de chaîne, qui pour 80% d’entre eux produisent leur propre fourrage, vont aussi faire face à des défauts d’approvisionnement. A ces problèmes de rendements s’ajoutent des crises sanitaires successives : FCO, MHE, Grippe aviaire… Autant de virus importés des pays tiers qui engendrent des pertes massives actuelles et menacent nos troupeaux de disparition. Les viticulteurs français quant à eux, sont contraints d’arracher leurs vignes face à la pression des importations de vins à bas prix d’Espagne, d’Italie, des États-Unis. La production viticole 2024 attendue est aussi en net recul, 18% en moyenne en moins sur un an du fait de conditions climatiques extrêmement défavorables dans pratiquement tous les bassins de production. Une telle situation ne peut plus durer. Il y a urgence à agir après des années d’immobilisme. En tant que présidente de la Coordination Rurale, je vous partage nos propositions qui sont autant de solutions pour rebâtir une agriculture française viable, libre et responsable. Les agriculteurs français ne peuvent plus continuer à vendre leurs productions au prix mondial alors que leurs coûts de production ne sont pas indexés sur ces prix mondiaux… Ils ne peuvent plus continuer à rester soumis aux accords de libre-échange. Depuis toujours, la Coordination Rurale défend l’exception agriculturelle et espère que votre gouvernement sera l’acteur de ce changement. Nous demandons des prix, pas des primes qui perfusent notre agriculture à l’Union européenne. Les paysans doivent pouvoir vivre dignement du fruit de leur production comme dans tous les autres secteurs économiques. Les producteurs français ne peuvent plus non plus supporter les vagues successives de suppressions de produits phytosanitaires sans solutions alternatives qui les privent de toute possibilité de faire face à la concurrence importée de l’étranger. Des produits qui ne respectent pas les normes très strictes imposées aux producteurs français inondent notre marché intérieur. Il faut que les clauses miroirs soient appliquées de toute urgence pour les protéger. Monsieur le Premier ministre, nous comptons sur votre engagement et votre volonté politique pour mettre en place des mesures plus justes. Il est indispensable de redonner aux agriculteurs français les moyens de vivre décemment de leur travail pour sauver les 400 000 fermes de métropole et d’Outre Mer qui font la fierté et la richesse de notre pays. Nous demandons des solutions concrètes et immédiates. L’État doit répondre présent pour sauver la Ferme France. Il faut ramener de la production et de la valeur dans nos fermes et arrêter d’importer ce que nous sommes en mesure de produire. Je souhaite vous rencontrer dans les plus brefs délais afin de vous soumettre nos propositions qui font partie de la solution. Cet échange sera aussi l’occasion de partager nos idées concernant la nomination du futur ministre de l’Agriculture. L’agriculture française est en demande d’une forte personnalité capable de défendre les intérêts des agriculteurs auprès des instances décisionnelles de l’Union européenne et du reste du monde. Veuillez agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de ma considération distinguée. Véronique Le Floc’h
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Lettre au premier ministre M. Barnier - Coordination Rurale - page 1
Lettre au premier ministre M. Barnier - Coordination Rurale - page 2