De nombreux exploitants vendent une partie de leur récolte par le biais de contrats-types Incograins (1) ou soumis au Code RUFRA (Code des Règles et Usages Français pour le Commerce des Grains et des Produits du Sol). Ces contrats sont très courants, notamment à l’export. Tout va bien quand on est conscient de la démarche dans laquelle on s’engage, et qu’un écrit est signé. Mais il peut aussi arriver que l’on se soumette à  entre dans ces contrats sans s’en rendre compte et sans les signer, ce qui doit inciter à une très grande prudence dès lors qu’on est  démarché par un courtier ou un agent commercial qui sert d’intermédiaire, ou même par son organisme stockeur qui propose un contrat intéressant.

Bien que cela heurte le bon sens, juridiquement les choses sont ainsi, car l’écrit n’est que très rarement une condition de validité du contrat. Celui-ci sert à prouver le contrat, le prix, la quantité, la date de livraison, mais il n’est pas toujours indispensable et la preuve qu’un contrat existe peut être rapportée au moyen d’une série d’indices (échanges de fax, prise d’échantillon, attestation d’un tiers).

Or, il peut arriver que l’agriculteur qui souhaite vendre ne soit pas conscient qu’il vient de passer le cap au-delà duquel, il ne peut plus reculer, alors que, de bonne foi, il se croit encore dans la phase de négociation. Ainsi, il suffit qu’il accepte une prise d’échantillons par un courtier à qui il a indiqué vouloir vendre à tel prix, et que ce courtier confirme à un acheteur l’existence d’une offre de vente conforme à  l’ordre donné par cet acheteur, pour que le contrat soit formé.

Il faut en toutes hypothèses être prudent, et refuser la prise d’un échantillon avant la signature d’un écrit comportant les principales caractéristiques de l’affaire (prix, quantité, qualité, et délais de livraisons). Quand on reçoit une offre d’achat, il faut toujours y répondre par écrit (fax) dans les 24 heures, pour signifier que l’on n’est pas vendeur dans ces conditions.

A défaut, les choses peuvent vite dégénérer. Dans certains cas extrêmes l’acheteur est en droit de considérer que la vente étant formée, il peut revendre la marchandise qui aurait dû lui être livrée, même si elle ne l’a pas été effectivement. S’il perd de l’argent, il en fera supporter le prix au vendeur.

La prudence s’impose d’autant plus qu’en cas de litige, c’est la Chambre arbitrale de Paris qui est compétente pour trancher l’affaire. Devant elle, l’agriculteur est souvent désarmé, car il se trouve en face d’arbitres qui règlent les affaires en fonction des règles RUFRA ou INCOGRAINS, lesquelles leur laissent beaucoup de latitude pour reconnaître l’existence d’un contrat non écrit.

Le seul espoir en cas de condamnation est alors de faire annuler la sentence devant la Cour d’appel, soit en faisant appel, soit en introduisant un recours une annulation. Mais cela a un coût, et la jurisprudence démontre que les magistrats professionnels déjugent rarement les arbitres. De quoi réfléchir avant d’engager des frais.

(1) Les contrats les plus utilisés sont les contrats-types 19 et 20, téléchargeables sur le site de l’OPG (http://www.opg.fr/incograin19-20.html)

Dans la même catégorie

Élevage
Aides animales
Aides animales
Retraités