Aujourd’hui, le prix des matières premières n’est plus fixé par la loi de l’offre et de la demande. Ce sont les marchés des matières premières à Chicago, Atlanta et Londres qui fixent le cours du blé, du riz et du maïs. Des chiffres, entrés dans ces ordinateurs, dépendent les prix de vente des aliments dans le monde entier.  

Des spéculateurs déconnectés de la réalité, mais des conséquences dévastatrices bien réelles

Les spéculateurs achètent des matières premières lorsque leur prix est faible et vendent leurs stocks lorsqu’ils peuvent en tirer un bénéfice, sans que la moindre matière ne soit physiquement déplacée. De leurs clics découlent des variations imprévisibles du marché. Ils provoquent des fluctuations de prix et pourtant, ils n’influent pas sur le stock réel de matières premières.

De ces manœuvres totalement virtuelles résultent des conséquences bien réelles et parfois terribles. Au tout début de la chaîne alimentaire mondiale, les producteurs ne parviennent plus à vivre décemment de leur métier et, à l’autre extrémité, les consommateurs des pays les plus prospères voient leur pouvoir d’achat réduit. Quant à ceux des pays les plus pauvres, c’est la famine qui les guette. Un climat d’agitation sociale et d’instabilité politique s’installe dans toutes les parties du village planétaire. Poussés à l’extrême, les peuples se révoltent et c’est ainsi, qu’en 2010, le printemps arabe a éclaté. S’en sont suivies des années de guerre, de misère et de famine. Pourtant, la nourriture ne manquait pas, elle était juste trop chère. En cause : des spéculateurs qui s’amusent et s’enrichissent à outrance avec les marchés financiers.

Ces spéculateurs sont derrière leurs écrans, totalement déconnectés de la réalité. Agnès Henry, présidente de la CR 77, s’insurge : « la déréglementation des marchés financiers permet aux traders de spéculer à l'infini sur les matières premières. Cela génère des fluctuations gérées par des algorithmes, qui viennent encourager davantage de spéculation. La volatilité des prix qui en découle est source de misère et de famine dans des pays où les niveaux de vie sont terriblement faibles. Le marché n'est plus celui de l'offre et la demande. Nous sommes dans un autre monde ! Qui plus est, le changement climatique va empirer ces phénomènes. »

 

Les spéculateurs se nourrissent de la guerre et de la pandémie

Depuis le début de la crise en Ukraine, ces transactions boursières déconnectées de la réalité du terrain, ont fait grimper les prix des denrées agricoles, notamment des céréales, à des niveaux jamais atteints dans l’Histoire. Elles ont ainsi rendu impossible l’accès à ces aliments de première nécessité pour les pays du Sud. En Afrique subsaharienne, le niveau de vie de la population ne permet pas de répercuter cette hausse des prix sur les aliments. Dans d’autres pays, au bord de la crise financière, les institutions bancaires ne sont plus en mesure de garantir les paiements, rendant les exportateurs méfiants et frileux à l’idée d’y expédier des marchandises.

En France et en Europe, une partie de l’élevage est en crise, car le coût des aliments n'est pas répercutable sur le prix de vente des animaux.Certains pays, tels que l’Espagne, sont amenés à assouplir les normes maximales de résidus sur les importations de maïs de provenance extra-européenne afin de s’approvisionner à bas prix. Cela accentue la mise en concurrence des agriculteurs européens avec leurs homologues internationaux dont les productions ne sont pas soumises aux mêmes normes environnementales et sanitaires.

 

La famine guette à nouveau l’Europe et nous savons que nous en paierons les conséquences, mais « les marchés » continuent de faire la loi. De leur fait, les prix du blé, du gaz et du pétrole montent en flèche. « Les états doivent reprendre leur pouvoir de gestion des marchés des denrées alimentaires pour le bien des peuples » soutient Agnès Henry.

Si le sujet vous intéresse, vous pouvez regarder ce documentaire d'Arte.

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