Face à la détresse des agriculteurs, le président Macron a convoqué les « États généraux » de l’alimentation. Des 14 ateliers, il ressort, entre les lignes, la volonté d’entériner une alimentation, et donc une agriculture, duale (à deux vitesses), parfois antagoniste, selon le niveau de revenu des consommateurs, comme cela se fait déjà dans d’autres domaines (éducation, santé…).

Voici quelques éléments descriptifs de cette vision binaire, pour ne pas dire manichéenne, de l’agriculture et de l'alimentation :

Ce système dual que l’on tente de nous imposer, différenciant une production élitiste et une production de masse, rappelle le système allemand, avec d’un côté une alimentation « industrielle » respectant un standard sans recherche qualitative, et de l’autre, une alimentation plus élitiste, sous label bio notamment. En effet, à côté de son système d’élevage intensif adossé à la méthanisation et de son industrie usant et abusant des travailleurs détachés, l’Allemagne a également une agriculture bio plus développée qu’en France, en pourcentage de la SAU. Les hard-discounters font face aux magasins bio !

Dans le sillage des Etats généraux de l’alimentation, il est envisagé de « positionner » davantage notre marché intérieur sur une « montée en gamme », quitte à importer les produits plus standards, que l’on ne produira plus nous-mêmes, et sur lesquels nos agriculteurs ne sont plus assez « compétitifs ». Dans le même temps, pour « relever les défis à l’international » (1 tonne de blé ou de maïs sur 2 est exportée), les agriculteurs français devront gagner en « compétitivité », c’est-à-dire, s’habituer à vendre à bas prix.

Cette « segmentation de marché » est le système imaginé pour sauver ce qui peut encore l’être, avec Europe ouverte à la mondialisation et une PAC à périmètre constant, continuant d’être déconnectée de la réalité des coûts de production. Songeons également aux traités de libre-échange que la Commission Européenne s’empresse de négocier : le tout constitue une forme de division internationale de l’agriculture, allant à l’inverse du principe de « souveraineté alimentaire », expression pourtant employée par le président Macron.

Cette vision n’est pas celle portée par notre syndicat. Depuis sa création en 1992, la Coordination Rurale se bat pour une PAC équilibrée, contrat entre agriculteurs et citoyens, les premiers garantissant la sécurité alimentaire des seconds en échange de prix rémunérateurs.

Avant tout soucieuse de l’intérêt général (agriculteurs/consommateurs), la CR souhaite une agriculture et une alimentation « unitaires » comme elles l’ont été depuis le néolithique jusqu’à un passé récent. Avant tout soucieuse de l’intérêt général (agriculteurs/consommateurs),  la CR refuse cette vision binaire et se bat pour une seule agriculture : celle qui n'oppose pas les modes de production, qui impose un niveau de qualité satisfaisant, qui garantit une alimentation en quantité suffisante et à un prix raisonnable pour le consommateur et rémunérateur pour l'agriculteur.

La Coordination Rurale invite les responsables politiques, citoyens et consommateurs à y réfléchir : quelle agriculture veulent-ils ? Pour quel projet de société ?

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