Le Conseil national de l’Alimentation (CNA) réunit environ 60 parties prenantes de tous horizons, dont des représentants des agriculteurs, dont je fais partie.

Je précise en préambule que mes rapports avec le CNA sont un peu marqués par la provocation, m’étant dès le début de mon mandat montrée fortement opposée à la Directive nitrates européenne.

Pour lire la fiche thématique sur les nitrates, cliquez-ici.

Je suis certainement aussi perçue par une partie des membres comme un genre de paradoxe, de celui que les non-initiés aux questions agricoles ne perçoivent pas comme étant pourtant parfaitement cohérent et vertueux : pensez donc, je répète souvent que je pratique l’agroécologie avec du glyphosate puisque je suis en semis direct sur 100 % de ma ferme depuis 15 ans.

Depuis que je représente la Coordination Rurale (CR) au CNA, je remarque que c’est souvent toujours aux mêmes que l’on demande de faire des efforts : nous, agriculteurs. Nous sommes montrés du doigt : que ce soient les éleveurs au nom du bien-être animal, ou les cultivateurs à cause des intrants et des produits de santé du végétal qu’ils utilisent. Nous devons produire toujours plus et mieux, mais avec moins : moins de terres, moins de produits, et moins de collègues.

La stratégie de la Ferme à la fourchette de la Commission européenne en est l’expression : les efforts vont encore majoritairement reposer sur les agriculteurs, alors qu’en contrepartie on ne demande rien aux transformateurs, ni même aux consommateurs.

Mais la production agricole n'est pas responsable de la précarité alimentaire, pas plus que de l’état sanitaire de la société (obésité, diabète et maladies chroniques). Nos produits répondent à des normes particulièrement strictes. Nous produisons en quantité et en qualité. Nous travaillons d’arrache-pied au quotidien et n’avons rien lâché pendant la crise Covid et ses différents confinements.

L’alimentation la plus saine et la plus durable est à base de produits bruts, et c’est ce que produisent les agriculteurs en cultivant la terre et en élevant des animaux. Quel que soit le mode de production, l'importance est la fraîcheur grâce à la proximité. Ces constats, largement partagés lors du 1er confinement, ont été ensuite vite oubliés une fois celui-ci levé.

L'agroalimentaire s'est approprié « l'alimentation » depuis 40 ans, du prix de la matière première à la distribution. Pour des raisons sanitaires et réglementaires, cette industrie a sanctuarisé ces espaces de transformation, dont nous sommes tous dépendants. Seules les pratiques des agriculteurs sont remises en cause, mais celles de l’agro-industrie ne sont jamais questionnées. D’ailleurs, elle-même ne veut pas de transparence sur ses pratiques, comme par exemple sur les additifs qu’elle utilise pour stabiliser et standardiser les produits transformés, ou encore sur les nanoparticules et la nanotechnologie intégrée dans les aliments.

Quant au consommateur, les agriculteurs sont prêts à satisfaire ses exigences, mais celles-ci ont un coût et doivent être payées au juste prix. Mais pour que le consommateur puisse faire un choix en fonction de critères d’origine, de qualité, de composition, ou de degré de transformation, encore faut-il qu’il soit pleinement informé.

Pour la CR, la transparence complète est indispensable. Le consommateur est en droit de savoir ce qu’il mange et d’avoir connaissance de tous les éléments composant ce qu’il consomme. C’est pourquoi la Coordination Rurale soutient la nécessité d’un dispositif permettant aux consommateurs d’accéder à l’intégralité de ces informations via une plate-forme numérique ; laquelle serait directement accessible grâce à l’utilisation d’un flash-code disponible sur l’étiquette du produit.

Agnès HENRY Agricultrice en Seine-et-Marne Présidente CR Seine-et-Marne

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