À l'attention du Président de la République.

Je vous interpelle aujourd’hui au sujet des actions de plus en plus radicales qui secouent le paysage agricole. Le problème ne date pas d’hier. On se souvient du McDonald’s démonté à Millau. Coup d’épée dans l’eau d’un point de vue agricole, mais belle réussite pour lancer la carrière politique d’un leader syndical de l’époque.

On peut citer aussi les « faucheurs volontaires », autre dénomination pompeuse pour des activistes qui saccagent impunément les essais de nos semenciers nationaux. Parlons encore de la ferme des mille vaches, maintes fois entravée (la ferme, pas les vaches!). Ailleurs, ce sont les retenues d’eau qui sont détruites et des équipements volés… Dernièrement, c’est l’usine de Bayer à Lyon qui a été la cible de dégradations. Même dans le Jura nous avons assisté le 29 janvier dernier à une spoliation pure et simple. Un terrain privé a été envahi et des travaux lourds ont été entrepris par des manifestants sans l’accord du propriétaire. Ces actes répréhensibles sont pudiquement qualifiés de « désobéissance civile » par des brigands qui se voient en nouveaux Robins des bois.

Quels sont les points communs de toutes ces actions ? J’en vois deux principaux.

Premièrement : la présence systématique d’un syndicat autrefois agricole. Ce syndicat paysan proche des ONG environnementalistes et des tendances écologistes est en effet partie prenante, si ce n’est instigateur, de ces dérives. J’attire votre attention sur ce que ça implique : dans le cas du Jura, c’est le droit de propriété, fondement d’une démocratie en bonne santé, qui a été violé. Dans le cas des bassines, c’est l’outil de travail de plusieurs agriculteurs, regroupés pour irriguer, qui a été vandalisé par d’autres agriculteurs bafouant ainsi toute morale professionnelle. Ce comportement me révolte autant qu'il me désole. Je considère que ces gens n’ont plus leur place aux tables de négociations concernant le monde agricole car, pour moi comme pour de nombreux collègues, ce syndicat ne défend plus les agriculteurs, il participe au contraire à l'agribashing dont est victime notre profession.

Deuxièmement : l’absence de réponse de l’État suite à ces dérives. Les interpellations sont peu nombreuses, les procès encore plus rares et les sanctions généralement inexistantes. Ce laisser aller de l’État est considéré comme une validation tacite de ces comportements délictueux dont chaque opération est un peu plus violente que la précédente. Je vous pose donc la question, combien de temps allons-nous devoir subir ces exactions ? Allez-vous attendre une confrontation et un drame humain comme à Sivens ? Comment pouvons-nous travailler avec un syndicat qui ne respecte pas les lois de la République et saborde toute avancée, même quand la guerre est sur notre continent  ?

Nous avons tenu la France pendant la crise Covid. Nous serons encore en première ligne dans la crise d’Ukraine mais le « vert » est dans le fruit. Si rien n’est fait, la pomme entière sera bientôt gâtée.

  Billet d'humeur rédigé par Emmanuel Rizzi, éleveur dans le Jura et vice-président national de la Coordination Rurale, et publié dans La France Agricole

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